See You Again - Adam & Logan.

— Mais j’étais en train de tout préparer pour revenir, tu comprends pas ? C’était la première fois que j’étais autant attaché à quelqu’un et je ne savais pas comment m’y prendre ! Et toi putain mais tu sonnes pour rendre les clés. T’as voulu te venger et t’as bien réussi parce que j’ai tous mes torts pour le divorce. Elle a eu toutes les preuves qu’elle voulait que je l’avais trompé et je me réveille neuf mois plus tard avec une gamine de quatre ans, des dettes à n’en plus finir, plus de boulot et.. putain de merde, tu me fais chier.

Il me fait chier et je me sens vivant à nouveau. Parce qu’il est là, parce qu’on est nous et parce que je l’aime toujours autant. Je voulais simplement le protéger de Moïra mais il ne le comprendra jamais alors je ne cherche même pas à me défendre.

— Peut-être que c’est de ma faute et que c’est trop tard. Mais si je n’avais pas eu cet accident, ça n’aurait pas été trop tard. À cette époque-là, ce n’était pas trop tard et tu le sais. Mais t’es fiancé maintenant alors bravo et va bien te faire foutre. Putain mais j’en reviens même pas que tu mettes ça sur mon dos. T’as essayé de m’appeller toi ? D’appeler ma secrétaire ? De comprendre pourquoi je ne répondais plus ? Bien sûr que non. Parce que t’étais trop occupé à bâtir ta petite vie parfaite. J’sais pas qui c’est mais tu te fais chier, Adam. Et tu peux te mentir à toi-même, si je n’avais eu aucune chance, tu ne serais pas venu aujourd’hui.

— Mais bien sûr que non j'ai pas essayé ! Quand Austin m'a dit que tu venais plus au cabinet, j'ai pensé que Moïra avait gagné. Que t'étais parti vivre en Ecosse avec ta famille et ton putain de futur enfant ! J'aurais du faire quoi ? Essayer de te joindre alors que j'ai passé des semaines à me dire que tu m'avais pris pour un con et que, si ça se trouve, t'étais peut être même déjà en train de sauter quelqu'un d'autre dans ton appartement ?

Je me remémore ces semaines de douleurs, à ne penser qu'à lui chaque fois que Max évoquait quelque chose de détaillé.

— Putain mais je suis passé devant chez toi le jour de ma rentrée ! J'étais déjà fiancé et je suis passé devant chez toi parce que j'étais en train de crever à petit feu que t'ai pas été là, toi ! Merde ! C'est même pas correct, mais évidemment que c'était pas trop tard ! Évidemment que le jour où mon frère m'a demandé si j'étais sûr de moi avec Max et qu'il m'a demandé ce que je ferais si tu revenais...

Ma gorge se serre, parce que c'était il y a des mois, mais que Logan a encore raison à ce jour. Logan a raison parce que si aujourd'hui Max et moi n'étions pas ensemble et heureux, il ne serait toujours pas trop tard non plus...

— Je ne sais pas pourquoi je suis là ! Je sais pas ce que j'attendais ! Je pouvais pas rester chez moi sans savoir ce que tu voulais, c'était plus fort que moi ! Mais ça veux pas dire que je me fais chier Logan, ni que je ne l'aime pas et que tu peux parler de lui comme ça !

Je lève les yeux au ciel.

— Je parle de lui comme je veux, t’as compris ? Un mec qui prend ma place pendant que je suis en train de crever, c’est pas un mec que j’estime. Et je m’en fous que tu sois heureux et que t’aies la belle vie parce que je sais que c’est avec moi que tu serais le mieux.

Je soupire.

— Putain mais comment t’as pu croire que je t’avais menti ? J’ai organisé ma vie entière pour qu’elle tourne autour de toi ! Peut-être que j’étais pas très expensif mais parfois les actions parlent bien plus que de simple mot. Merde quoi ! Tu me connais ! Tu sais que je tenais à mon travail malgré tout alors qu’est-ce que j’aurais été foutre là-bas ? Putain mais je ne l’ai jamais aimé bordel de merde ! Jamais. Qu’elle ait porté ma fille ou un autre enfant n’a rien changé à ça alors que t’as tout bousculé en arrivant et tu as douté que je t’aime ? Putain mais s’il te faut une alliance pour comprendre que t’es important je t’en donne une demain !

— Il a pas prit ta place pendant que t'étais en train de crever ! Il a juste...

Je soupire en me rendant compte une énième fois de la situation.

— ...fait exactement ce que tu fais là. Il est arrivé en pensant que j'étais resté seul pendant trois ans alors qu'il avait acheté une maison, alors forcément quand il a compris que t'étais plus là, il n'a pas vraiment essayé de me repousser.

La différence entre eux, c'est que c'est moi qui suis aller vers Max, il ne s'est pas vraiment battu pour que je le fasse. C'est le départ de Logan qui m'a poussé dans ses bras. Alors que Logan...

— Mais imagine moi deux minutes. Je suis fou amoureux de toi, mais t'es toujours avec ta femme, tu m'enfermes dans un placard, j'y apprends ce que j'y apprends, puis après tu me dis de dégager et de me rendre tes clés. J'ai aucune estime de la personne que je suis Logan, tu le sais ! Comment j'aurais pu me convaincre que j'avais pas tout édulcoré et que j'étais pas tout seul dans cette histoire ? Bien sûr que ton accident à tout remis en question, parce que tu serais revenu, mais... Mais il a été là. Il est survenu et pendant que t'étais dans le coma, moi j'acceptais que j'aurais plus jamais de nouvelles de toi et que je devais tourner la page parce que je pouvais pas rester malheureux toute ma vie simplement parce que je n'aimais pas la bonne personne...

— Ah oui alors comme il achète une maison ça change tout. En effet vaut mieux que tu restes là-bas parce que moi j’ai plus rien.

Je réponds avec amertume. Il n’y peut rien mais ça fait des semaines que je rumine ma haine contre le monde entier et il est le seul avec qui j’arrive à l’exprimer. Il est le seul avec qui j’arrive à parler et ça me rend malade.

— Mais putain pourquoi est-ce que je t´ai demandé de dégager, hein ? Parce que tu m’as encore pété les couilles avec ton caprice alors que je venais de me prendre l’équivalent d’un parpaing sur le coin de la tronche ! Je n’ai même pas eu le temps d’assimiler cette fausse information parce que t’as pété un câble en une seconde ! Je couchais même plus avec elle et j’ai tellement été sonné que je n’ai même pas fait le lien !

Les souvenirs sont vivaces. Comme si seul ce qui se rattache à Adam est encore intacte.

— Je suis revenu, maintenant. Je suis revenu et dès que j’ai pu te contacter, je l’ai fait.

Je l’ai fait mais c’est trop tard et ça me trou le cœur de le réaliser. Adam était la dernière chose qui me faisait tenir et je n’ai plus rien à quoi me raccrocher, maintenant. J’aurais dû y rester, tout aurait été plus simple.

Je sors pour portable pour contacter une compagnie de taxi. Apparemment, ce n’est pas avant une demi-heure. Fait chier. Je repère l’arrêt de bus un peu plus loin alors je commence à m’y rendre lentement. Je n’ai pas pris ma béquille et pour quoi ? Être plus séduisant ? Qu’est-ce qu’il en a à foutre maintenant qu’il a un fiancé et une maison.

— Mon caprice ? Non mais attends, tu réagirais comment si je t'apprenais qu'on est en train de monter un dossier pour avoir un gosse ?

Au moment où ça sort, je me rends compte que c'est exactement la situation dans laquelle je suis et mon visage se crispe automatiquement. Je viens de balancer ça comme ça, sans réfléchir une seule seconde à mes mots. Et ce n'est bien pour personne, surtout pas pour Logan...

Le temps que je le comprenne, il s'est déjà éloigné vers l'arrêt de bus. Je pourrais le laisser y aller et rejoindre ma voiture. C'est sans doute ca que je devrais faire, meme, par respect pour tout un chacun. Je ne peux pas être avec Logan et je n'ai pas le droit d'agir comme je le fais à cause de Max.

Pourtant je presse le pas après lui et même si ce n'est pas le moment, je souris rapidement. Je le préfère comme ça que courant pour m'échapper.

— Monte avec moi, je t'emmène !

Je me mets devant lui et je ne lui laisse pas le choix.

— C'est pas le moment de faire la forte tête Logan. Tu as un rendez-vous important et il est hors de question que tu le rates par fierté ou colère ! J'aimerais bien que tu restes en vie et que tu te portes bien, s'il te plaît.

J'essaie de dédramatiser les choses, même si je sais que ça me fait peur de le laisser tout seul dans de telles circonstances. Il aurait pu mourir et je crois que ça m'a foutu un coup, même s'il est bien là devant moi maintenant.

Il me rattrape et tout ce que j’entends c’est qu’il monte un dossier pour avoir un enfant. C’est le coup de grâce et je crois que j’aurais aimé que ma brève amnésie le gomme de ma mémoire. J’aurais préféré ne pas me souvenir de lui plutôt que d’être seul tout en sachant qu’il construit sa vie ailleurs.

J’accepte de monter dans sa voiture uniquement pour ne plus l’entendre insister. Ils ne sont pas juste fiancés. Il n’est pas juste avec ce mec pour m’oublier moi. Ils sont ensemble et c’est bien plus sérieux que tout ce que j’ai pu partager avec lui. Je n’ai pas envie d’abandonner et pourtant, cette histoire de dossier m’a anéanti. Je n’ai plus envie de me faire mal. Je boucle ma ceinture, la jambe en feu, en espérant qu’il n’ait plus rien à me dire.

L'avoir assis là, dans ma voiture, est tellement étrange. Toutes les dix secondes, je quitte la route des yeux pour tourner mon regard vers lui, juste histoire d'être sûr que ce n'est pas une image et un délire. Il est bien là, à mes côtés, et pourtant nous sommes très loin des retrouvailles que j'espérais il y a des mois de cela.

La vérité est là, évidente, et je l'ai compris dès que mes yeux ont croisés les siens. Mes sentiments à son égard ne sont jamais morts... Mais que faire et dire, quand il est trop tard pour réparer certaines choses ? Ou quand il est trop tard pour en briser d'autres ?

J'aime Max, je n'aurais pas construit ma vie entière sur ce qu'il m'a offert si ce n'était pas le cas. Mais est-ce que je l'aime autant que j'ai aimé Logan... ? Est-ce que j'ai ressenti cette flamme lorsqu'il est revenu après trois ans d'absence ? Non. Est-ce qu'elle est déjà en train de bouffer toutes les parois de mon corps alors que Logan est ici ? Je crois bien que oui.

— J'ai failli t'envoyer un sms, peu de temps après que tu m'ai demandé tes clés...

Je ne sais même pas pourquoi je lui dis ça, alors que ça ne mènera à rien de plus.

— Je te demandais de ne pas mal agir avec la personne qui prendrait ma place lorsque Moïra te lasserait de nouveau et que tu aurais besoin de sortir de ta routine avec cette conne. Je te demandais de prendre soin de lui et de ne pas briser son coeur comme tu avais joué avec le mien. C'était dramatique, tellement j'étais dans une détresse évidente... Si je te l'avais envoyé au lieu de l'effacer, je suppose que ça aurait changé bien des choses.

Je n'ai jamais autant pleuré et souffert de notre rupture que lorsque j'ai écris tout ça. C'était un moyen de me libérer... Rien qu'y penser me donne les larmes yeux de nouveau.

Je refuse de le regarder, il ne roule pas assez vite, d’ailleurs. J’étouffe d'être à la fois si proche et si loin de lui. C’est maintenant que tout est terminé que je réalise à quel point il doit faire partie de ma vie, à quel point c’est important pour moi. Pour nous. Mais il parle au passé d’une histoire qui est bien récente pour moi. Il a avancé, comme tout le monde autour de moi. Personne n’a arrêté de vivre, personne n’est resté à mon chevet en priant tous les jours pour que je me réveille. Personne.

— Si tu l’avais fait, tu aurais su que personne n’aurait pu prendre ta place. Mais je suppose qu’avec des « si » tout serait différent. J’espère que tu seras heureux, c’est tout ce que tu mérites.

Alors ça va s'arrêter là ? Il est là, si proche et si loin, il m'annonce tout ça et puis voilà, c'était sympa, je te souhaite une bonne vie.

Je ne réponds pas, parce que je n'ai aucune idée de ce que je veux réellement lui dire. Je suis complètement perdu... Il lui aura suffit de se présenter pour balayer mes certitudes et mes envies.

Quand on arrive à la clinique, ma gorge se serre parce que je n'ai pas envie qu'il parte. Je n'ai pas envie que ce soit ça ma dernière image de lui, plus maintenant que je sais que je suis maître de mon destin. Du notre. Il me suffirait de quelques mots je le sais, mais je suis dans l'incapacité de les prononcer.

— Tu auras besoin de quelqu'un pour te raccompagner, tu crois ?

Je me rattrape aux branches comme je peux, on dirait un enfant apeuré.

Il se gare devant la clinique et j’ai l’impression que plus rien ne va. J’ai trop perdu depuis ces derniers mois et je vais également le perdre lui. Peut-être que c’est la perte de trop.

— J’ai besoin de toi au quotidien, Adam. Pas parce que j’ai besoin d’un chauffeur ou de quelqu’un qui s’assure que je n’oublie pas mes rendez-vous, mais parce qu’il y a quelques semaines, enfin quelques mois, je n’envisageais plus ma vie sans toi et c’est toujours le cas même si tu as continué d’avancer.

Je soupire et je me détache.

— Je ne vais pas te demander de faire un choix, on est plus adultes que ça, je suppose. Mais tu sais où je vis, tu sais que je t’attends et que je t’aime. Je crois que c’est suffisant pour le moment parce que je ne peux pas me battre pour toi tout en essayant de me reconstruire. Je repars de zéro pour bien des choses alors..

Ça me serre le cœur. Jamais je n’aurais pu penser que ça m’affecterait à ce point-là, mais je réalise que je n’envisageais pas ma convalescence sans lui, je n’envisageais pas d’être seul et de n’avoir personne pour qui me battre. Je n’ai même plus ma fille et me battre pour moi ne m’intéresse pas : j’ai passé ma vie à faire les mauvais choix, le karma me récompense plutôt bien aujourd’hui.

— Je sais que j’ai tout foiré et que j’ai tous les torts dans notre relation. C’est difficile à admettre mais j’en ai conscience parce que... autrement.. tu l’aurais su, pas vrai ? T’aurais su que j’étais à l’hôpital ? T’aurais cherché ? T’aurais été à mes côtés ?

Mon cœur me remonte dans la gorge et j’ouvre la portière. J’essaie de me rassurer mais la vérité est que personne n’était là. Ni mes parents, ni mon ex-femme, ma fille, ni l’homme que j’aime. Personne. Une amie est passée une fois, peut-être pour se donner bonne conscience mais je suis seul et c’est le plus dur. Ma vie entière n’est qu’une mascarade et j’en paie les frais aujourd’hui.

— Merci d’être venu malgré tout. De m’avoir laisser une chance d’y voir plus clair et de rétablir la vérité.

J'ai du mal à contenir tout ce qui ne demande qu'à sortir de mes paupières. Je sais pertinemment que si je ferme les yeux, je n'aurais plus aucun contrôle sur rien.

— Si j'avais su j'aurai passé chaque jour à tes côtés...

Je sais bien qu'il vient de me dire qu'avec des "si" on pourrait refaire le monde, mais j'ai besoin qu'il sache.

— Si Moïra me l'avait dit, si je l'avais su par mon amie qui travaille ici, si tes patients avaient eu une note et qu'Austin m'avait informé je... Même en étant persuadé que tu m'avais pris pour un con, je serai venu. J'aurais jamais pu te laisser vivre ça sans être là si j'avais su. Je t'aime beaucoup trop pour ça...

Je ne me corrige même pas sur le temps employé, parce que ça ne sert à rien. C'était le cas il y a un an, c'est toujours le cas aujourd'hui. Fiançailles, église, poules ou potager rentrant en jeu... Je n'ai jamais su mentir, de toutes façons. Et je ne sais même pas comment je vais pouvoir regarder Max rentrer ce soir et faire comme si rien n'avait changé.

— Merci à toi Logan. Même quand elle fait mal, la vérité est toujours meilleure à prendre que le mensonge...

— Ouais. Mais tu ne l’as pas su et tu as bâti une autre vie ailleurs.

Et je suis resté seul. Ce n’est pas un reproche, juste un simple constat. Les choses sont compliquées lorsqu’on est engagés et je suppose qu’il le comprend enfin.

— Merci de m’avoir conduit ici.

Je sors difficilement de la voiture et, Dieu merci, je peux interpeller un ambulancier qui passe par là pour qu’il me ramène un fauteuil. Si j’avais pu rentrer directement par mes propres moyens sans aller à ce rendez-vous, je l’aurais fait. Aujourd’hui je n’ai plus de raison de réapprendre à marcher, je n’ai plus d’enfant à promener et plus de petit ami avec qui me balader. Demain ça ira peut-être mieux, mais aujourd’hui, je n’ai plus du tout envie de me battre.

Je claque la portière et j’attends sans bouger sur le trottoir ce foutu fauteuil qui soulagera ma hanche.

Je suis resté là jusqu'à ce qu'on vienne le chercher. Je ne sais pas ce que j'attendais. Peut-être qu'il me retienne, comme dans un film. Ou peut-être juste l'occasion de me rendre compte que rien n'avait changé.

Lorsqu'un infirmier arrive, lui apporte un fauteuil roulant et qu'ils entrent, je peux enfin craquer. J'ai l'impression

J'ai roulé pendant des kilomètres sans savoir où j'allais. Je ne voulais pas rentrer chez moi, ni voir Gabriel, ni personne. Juste flâner, et penser, et pleurer.