La nouvelle qu’on n’avait pas envie d’apprendre – Adam & Logan

Quand j'arrive devant l'église, elle est vide. Et pas son parvis, mais aussi l'intérieur. Y'a plus personne, j'ai raté tout le monde et je me sens con. Je suis en colère contre moi parce que j'ai cette impression d'avoir moi-même jeté Logan dans les bras de Moïra et c'est seulement d'entendre les jumeaux derrière qui m'apaise. On a une famille, des enfants, ça va aller. Ça va forcément aller. Il retournerait pas avec celle qui lui a fait tant de mal, même si elle est la mère de sa fille...

Du coup, la seule chose qu'il nous reste à faire, c'est d'aller chez mes parents et d'attendre qu'ils rentrent, tous autant qu'ils sont. Ce qu'on fait en peu de temps. On arrive chez mes parents en même temps qu'eux et ma mère est déjà gaga de voir ses petits trésors.

— Comment ça se fait que t'étais pas à l'église ? Tu rates jamais ça, normalement !
— J'ai eu un imprévu, j'ai pas su le gérer comme il fallait. Ça va vous ?

Je demande, pas certain de vouloir inventer une excuse, mais sans l'envie de dire la vérité pour autant. Même si je sais pertinemment au regard que me lance ma mère qu'elle connait la raison, et qu'elle trouve ça vraiment stupide.

— Ça va ! Marie et Chris sont juste derrière avec les filles. Et Gabriel est parti à pied avec Logan et Livie.

Je meurs d'envie de demander comment ça c'est passé, si en plus cette pétasse a été présentée à toute ma famille comme si c'était normal, alors qu'elle n'a absolument rien à foutre avec eux. Mais je garde ma rage pour moi, parce que ce serait avouer trop de choses.

Quand on arrive à la maison, tout le monde est déjà là, mais je suis complètement vidé émotionnellement et fatigué. J’ai mal au crâne, aux hanches. Je suis crispé, j’en peux plus. J’arrive à peine à me concentrer alors j’ai pas du tout écouté Gabriel. Je vais juste m’asseoir dans le canapé après avoir fait un signe de la main à tout le monde.

GABI

Logan a rien capté à ce que je disais de tout le trajet alors j’me dis qu’on a bien fait de le faire ensemble parce qu’il aurait encore perdu sa gamine, ce con. Ou bien c’est elle qui l’aurait amené ici par la main.

Je rejoins directement mon frère dans la cuisine.

— Ton mari est chelou. Il est pas là. Genre... j’ai demandé s’il continuait le sport il m’a répondu qu’il achèterait du lait demain. T’es pas venu à cause de Moïra ? J’trouve ça con. Elle est restée derrière. Logan lui a à peine parlé. Juste pour l’envoyer chier, un peu.

Je l’ai pas vu depuis une éternité, ça me fait trop plaisir. Même s’il a l’air au bout du rouleau.

Gabriel me dit même pas bonjour, il attaqué directement avec les sujets qui fâchent. Je lève les yeux au ciel quand il dit que mon mari est chelou, je grimace plus quand il précise pourquoi. Est-ce que c'est la fatigue, ou autre chose ? On devait aller voir un médecin après ce qu'il s'est passé la dernière fois, mais le mariage de Romie est arrivé un peu en surprise et on n'en pas reparlé depuis. Comme il ne voulait pas, ça a du l'arranger...

— Il est où ? Il va bien ?

Mon inquiétude se ressent dans ma voix.

— Mais pourquoi con ?

Je demande finalement à propos de Moïra, sans comprendre.

— Elle a pas déjà assez niqué ma vie comme ça ? C'est pas dans tes bras à toi que je venais chialer tous les deux jours à cause d'elle ? Putain mais elle revient s'installer ici Gabou, j'ai envie de lui enfoncer des pieux dans le cœur et je viens de passer une heure à chialer comme un con dans mon canapé. Elle me fera chier jusqu'à ma mort, c'est ça ?

Je soupire.

— Je sais que j'aurais dû venir, que là j'ai juste poussé Logan dans ses bras, mais je craque par avance. Je veux pas d'elle dans nos vies. J'en veux plus.

GABI

— Con ouais. Tu lui donnes de l’importance alors que tu pourrais juste t’en foutre. Elle a zéro place dans la vie de Logan, il l’a même pas présenté.

Je lève les yeux au ciel.

— Putain t’es vraiment une drama queen. Si t’en veux pas, pourquoi t’agis comme si elle en faisait partie ? Chie lui dessus, wesh. Genre... j’sais pas moi, viens parader au bras de ton mari et prendre plaisir à lui montrer qu’elle c’est du passé et qu’elle a eu beau t’humilier sur un parking, Logan t’a choisi. J’sais pas. Si tu veux faire des drames, fais les bien ! Genre « salut pétasse, tu regrettes pas trop de l’avoir lacher quand il était dans le coma ? »

— Mais tu l'as vu celle là ou quoi ? Avec son regard de pétasse justement, qui me juge des pieds à la tête chaque fois qu'elle me voit. Et ''Ton mari ce gamin'' par-ci et ''le briseur de mariage'' par là. Et je vais devoir affronter ça tous les dimanches ? Génial. Encore heureux qu'il l'ai pas présenté, elle voulait pas non plus du champagne ?

A chaque fois, je me sens comme la pire merde du monde et maintenant, je vais devoir le supporter dans un endroit où je suis censé être à l'aise. Mais bon, au moins je sais qu'elle a été invisible aux yeux des miens.

— Puis Logan la seule chose qu'il trouve à me répondre c'est que c'est la mère d'Olivia et que c'est comme ça. Putain ! Mais je sais pas, rassure-moi; dis moi que tu m'aimes, que tu t'en fous et que ça va rien changer ! Plutôt que de faire comme elle et de dire que je suis un gamin juste parce que je crève de jalousie !

Merde ! Ca fait un bien fou de le sortir, alors que je ne savais même pas que c'était ça qui coinçait.

— Vous êtes chiants tous les deux sérieux. J’ai des noeuds au cerveau.
— Salut les frérots. Vous parlez de quoi ?
— De l’ex femme de Logan.
— Ah ouais, pourquoi elle était là tout à l’heure.
— Pour faire de la vie d’Adam un Enfer. Le pauvre malheureux. La mère d’Olivia refuse de ne plus être la mère d’Olivia.
— Arrête Gabi, ça doit être dur de la voir.
— C’est pour elle que ça doit être dur. Elle sait qu’elle a tout perdu et c’est sous ses yeux et en plus c’est un autre type qui élève sa fille ! Moi à sa place, je viens pas seulement le dimanche à l’église !
— Parce que t’es un fouteur de merde.
— MAMAN MARIE AUSSI ELLE MÉRITE D’AVOIR DU POIVRE DANS LA BOUCHE !!
— Tais-toi !! Puis d’ailleurs, je suis venu te dire que Logan est monté se coucher. Il est tout pâle. Il voulait rentrer mais bon... Maman lui a dit non, pas dans cet état.

— Putain mais t'es sérieux là ?

Je suis obligé de rire en donnant un coup à Gabriel.

— Dur de quoi ? Si c'était pas une conne, il aurait pas été voir ailleurs ! Elle peut s'en prendre qu'à elle même. Et comme tu l'a bien dit, elle l'a abandonné. Alors casse toi connasse, je prends la place due !

Je crois que là, on a tous les trois besoin de poivre dans la bouche. Et je ne veux même pas savoir pourquoi elle a menacé Gabriel, ça devait être sale.

— Merde ! Il est où ? Dans ma chambre ?

Je demande en abandonnant la conversation, prêt à monter voir ce qu'il se passe.

— Vous jetez un œil sur mes enfants, merci. Je vous offrirais un cadeau de Noël de feu pour remercier.

Et je leur fait un bisou volant avant de partir à l'étage. Une fois devant ma porte, je toque doucement pour m'annoncer et quand j'entre, je trouve Logan vraiment très blanc.

— Hey... Ça va pas mon cœur ?

Je demande en m'approchant de lui. Je fais inévitablement le lien avec les incohérences dont Gabou m'a parlé.

Je crois que j’ai envie de rentrer à tel point que mon corps m’envoie de l’aide. J’ai pas envie d’être là à prétendre que tout va bien alors que c’est pas le cas. Quand Adam rentre, je me tourne pour lui tourner le dos. J’ai pas envie qu’il me voit comme ça.

— Ça va. Petite migraine. Ça va passer.

Il me tourne le dos et je grimace. À l'évidence, il n'a toujours pas envie de me voir et la dispute n'est pas vraiment terminée.

— T'es sûr ?

Je demande malgré tout.

— Marie m'a dit que tu voulais rentrer. On est venu en voiture avec les jumeaux, alors on peut filer si tu veux. Personne nous en voudra.

— On est là, tes parents sont contents, c’est le principal.

Je réponds simplement.

— Tu peux fermer les volets, s’il te plaît ? Et éteindre la lumière ? Je me sens épuisé.

— Ils seront contents aussi si on vient la semaine prochaine.

Je lui réponds en éteignant la lumière et je me hâte d'aller fermer les volets.

— Tu veux que je te monte un verre d'eau ? Un doliprane ? Ça t'as pris comme ça... ?

— Non ça me prend pas comme ça. Ça me prend parce que je suis contrarié et pas bien. J’arrive pas à tout gérer et j’ai envie de me mettre sur pause. Alors à défaut d’avoir encore un accident, mon cerveau me casse les couilles a être dans une confusion de dingue. Je dois me concentrer tellement fort pour garder le fil. Je me déconnecte toutes les secondes. Je sais même pas pourquoi tu fermes les volets !

Ça servirait à quoi de lui dire qu'il me l'a demandé ? Il semble déjà dans un assez mauvais état comme ça pour en rajouter une couche.

— Excuse-moi, je pensais que ça pourrait te faire du bien d'avoir moins de lumière.

Je réponds avant d'aller m'assoeir derrière lui.

— Demain je t'emmène à l'hôpital. Tu peux m'engueuler, m'en vouloir ou me dire que ça sert à rien, je m'en fous. On ira quand même. Parce que c'est pas normal que tu réagisses comme ça à cause de la contrariété et que ça te rende aussi confus. T'as besoin de plus que du repos mon cœur...

Je tente de venir caresser ses cheveux.

Je soupire.

— Demain tu travailles. T’arrêtes pas de prendre des jours de congés, on a quand même besoin de ton salaire. Moïra a juste dit bonjour et au revoir.

Quand il enchaîne du boulot à Moïra, je vois ce que Gabriel voulait dire encore plus.

— Tant mieux alors, t'es mon mari à moi et elle a pas le droit d'en faire plus.

Je rigole doucement, pour détendre un peu l'atmosphère. C'est pas la première fois que ça arrive à Logan , mais là il semble être vraiment au bout du rouleau.

— Je vais demander à avoir des jours de télétravail. Au moins un par semaine. J'aurais du faire ça avant, mais j'y ai pensé seulement dans la semaine. Ce serait plus facile pour garder les enfants, pour ce genre de rendez-vous et pour toi. Tu pourras donner tes cours plus facilement. Et je suis presque convaincu qu'on ne va pas me les refuser. Donc on aura plus a s'inquiéter du salaire, d'accord ?

Je pose la question, mais c'est purement rhétorique.

— Lève toi mon cœur, on rentre. T'as besoin de repos, dans notre lit et sans être dérangé. Et comme j'ai pas la force de te porter, ça m'arrangerais vraiment si tu y mettais du tien !

— Non, on va pas gacher le dimanche de tout le monde. J’ai pas envie. Comme on est venus, autant rester. Là au moins quelqu’un s’occupe des enfants. Va manger. Je vais pouvoir rester là. J’en ai marre qu’on se dispute, ça me fatigue.

J'ai aucun pouvoir sur lui, comme d'habitude et insister ça va le rendre encore plus agressif. Alors qu'il ne veux plus de disputes. Putain de caractère à la con.

— On ne se dispute plus là, Logan. Tu m'en veux, je t'en ai voulu, Moïra est là quoiqu'on fasse, alors ça sert à rien d'y passer mille ans. On pourra en reparler posément une fois à la maison, si tu en as envie.

Il est chaud, en plus. Son crâne est bouillant.

— Pousse toi, mets toi sous la couette, tu seras mieux.

Je soupire en levant les draps pour qu'il se glisse dessous.

— J'ai rêvé de toi des dizaines de fois dans ce lit, sache-le. Ça devrait t'aider à bien dormir, c'est rempli de bonnes ondes.

Il me borde et au moment où il va passer la porte pour me laisser tout seul, j’ai pas du tout envie.

— Adam...? Tu peux rester un peu ?

— Évidemment mon cœur.

Je referme la porte derrière moi et je viens m'allonger à côté de lui.

— Je peux venir sous la couette avec toi ?

— Hm.

Je dis alors qu’il me prend dans ses bras. Je me sens bien contre lui et je niche mon visage sans le creux de son cou.

— On devrait revenir plus souvent le dimanche si on peut avoir ce genre de pause.

J’embrasse son cou et je ferme les yeux.

— J’ai l’impression d’être un père minable quand je dis ça.

Je dis en riant un peu.

Je caresse ses cheveux avec tendresse, mon corps si proche du sien qu'on pourrait se fondre l'un dans l'autre.

— Ça fait pas père minable ! Plutôt homme trop amoureux de son mari !

Je rigole doucement en embrassant sa joue.

— Tu sais... Peut-être que de temps en temps, des dimanches par ci par là, on pourrait laisser les enfants à mes parents ou à Marie. Même Gabriel il aimerait bien je suis sûr ! De toute façon, entre l'église et le repas, ils seraient pas mal tous avec eux. Et nous, on en profiterais pour se retrouver un peu tous les deux.

Je le serre contre moi, comme si plus était encore possible.

— Même si on traine juste à la maison, qu'on veux aller déjeuner dans un bon resto ou qu'on fasse l'amour toute la journée. Ça pourrait nous donner une pause un peu plus grande.

— Franchement, là, tout de suite, je te dirais bien que si je veux une pause, c’est pour dormir et faire le mort.

Je souris contre ça peau. Ça me fait du bien.

— On ira à la piscine après Noël. D’ailleurs on fête Noël où ?

J’entends que je pars ailleurs alors je grimace.

— Merde, pardon. Ça sort tout seul. J’ai pas bu assez d’eau.

— Tant que tu te réveilles et que tu me laisses pas sur Terre sans toi, je te laisserai dormir tout le temps que tu veux !

Je souris en embrassant le sommet de son crâne. Il est en plein délire, et je ne sais pas si je dois rire ou pleurer. Je suppose que la seule chose que j'ai à faire pour le moment, c'est de me laisser aller à cette courte pause.

— On verra pour Noël, ok ? Mais ce sera le premier Noël de Romie ! Faut que ce soit parfait ! J'ai déjà des idées de cadeaux pour tout le monde !

Je ne sais même pas s'il capte ce que je raconte, mais au moins on est au calme. Je caresse son dos, il fait des bisous dans mon cou, on est bien tous les deux.

— Et tu vas adorer le tien !

— Ah ouais ? Moi j’ai pas d’idée. Enfin j’oublie de les noter et je les oublie. Olivia croit encore au Père Noël ? Je m’en souviens plus.

— J'aimerais beaucoup partir en week-end en amoureux. On n'a pas fais ça depuis qu'on a les enfants. Et Paris, c'était pas pareil !

Je glisse ça là, au cas où, même si j'ai conscience ce qu'il y a peu de chances qu'il s'en souvienne en se réveillant.

— C'est un peu dur en ce moment. Elle y croit encore, pas mal grâce à sa foi d'ailleurs, mais avec l'école ça devient de plus en plus compliqué. Et toi ? T'y crois encore ?

Je demande en rigolant.