Balthawouaf

Madeleine prépare le petit déjeuner et elle va directement prendre Austin dans ses bras pour lui faire un câlin.

— D’accord. Je vais m’occuper d’elle, ne t’inquiète pas de ça. Viens t’asseoir, Gabriel va bientôt descendre. Je te prépare quelque chose ? J’ai fait des tartines.

Je secoue la tête, je n'ai pas très faim. J'ai le babyphone que Madeleine m'a acheté pour me rassurer. Au début quand Darcy dormait dans le sous-sol, je n'osais même pas monter chercher quelque chose à la cuisine de peur de la laisser seule, alors elle nous a acheté ça. Je me sers un verre de lait.

— Je vais rester avec elle aujourd'hui, je ne veux pas la laisser.

— Tu es sûr ? Je peux prendre soin d’elle, ça ne me gêne pas. Tu le sais..

— Je sais...

C'est juste que dès qu'elle va mal, je vais mal moi aussi je n'imagine pas m'éloigner d'elle quand elle est comme ça. Madeleine le sait, elle me connait. Gabriel arrive à ce moment-là avec Balthazar. Je me lève, mais je ne l'embrasse pas, jamais devant ses parents, je n'ose pas.

— Hey.

J’ai eu du mal à émerger. Je suis sorti faire le con avec Balthazar au milieu de la nuit alors... forcément, le réveille est dur. Je descends comme un zombie. J’ai du porter mon chien car il n’arrive pas à descendre les marches encore. Je suis surpris de voir Austin ici, mais il se lève alors j’embrasse ses lèvres.

— Salut.

Je vais m’asseoir à côté de ma mère qui s’approche pour me faire un câlin.

— T’as bien dormi mon ange ?
— Hm, hm.

Elle finit de mettre la table.

— Tout va bien ?

Je demande à Austin. Il ne prend plus le petit déjeuner ici maintenant qu’il a le studio.

Il embrasse mes lèvres devant sa mère et je rougis. Mais Madeleine ne relève pas, je sais qu'elle est d'accord avec notre relation, c'est Gabriel qui me l'a dit, mais je n'en ai jamais parlé avec elle pour de vrai. Je me rassoie.

— Elle s'est endormie il y a environ une demi-heure, elle ne va pas à l'école aujourd'hui, je vais rester avec elle.

— Qui ? Ah.

Je percute. J’ai vraiment du mal le matin.

— Mince... mais faut pas qu’elle retourne voir un psy ? Elle est grande maintenant, les terreurs nocturnes devraient passer. Puis toute la nuit, ça prend des proportions énormes...

Je fronce les sourcils parce que ça ne me plait pas ce qu'il dit.

- Elle voit un psychologue chaque semaine, et toute sa vie vient de changer, je suis revenu le visage abîmé et quand elle s'est cassée la jambe sa mère est resté endormie à côté d'elle. Elle a le droit d'être perturbée.

Quand je vois le visage de Madeleine je préfère quitter la pièce.

Ma mère me met une tape derrière la tête.

— Mais t’es pas bien ou quoi ?
— Mais quoi ! Je savais pas qu’elle allait chez le psy moi, c’est bon. Mais j’trouve que hurler toute la nuit, c’est pas normal. Normalement ça dure une vingtaine de minutes max et puis l’enfant se rendort. Là c’est vraiment un cirque.
— Gabriel !
— Mais non pas Gabriel ! Franchement si ça se trouve elle a une terreur nocturne et après elle fait une comédie pour pas qu’Austin la lâche. Elle va faire ça toute sa vie peut-être ? Jusqu’à 15 ans ? L’année prochaine il part à l’université, comme elle va faire ? Elle aura pas le droit d’être sur le campus.
— Ça suffit ! Tu vas t’excuser !
— Mais non j’y vais pas ! Non mais ça va là ! Marie a pissé au lit jusqu’à 13 ans, bon bah vous saviez qu’il y avait un problème et vous n’étiez pas sur elle comme ça à l’etouffer ! C’est pas son père !
— T’es pas possible bon sang ! Ils ont une situation de famille compliquée !
— Donc elle a le droit de chialer toute la nuit ?

La gifle que je me prends, apparemment, je ne la vole pas, et je me relève pour quitter la cuisine.

— Merde. Voilà. C’est le matin et là, c’est bon. C’est autre chose que des terreurs nocturnes. Y a un gamin qui en avait en Colombie et c’était pas un cinéma comme ça. Donc à mon avis, elle est loin d’être bête et elle a bien compris que son frère accourt à tout bout de champ, c’est tout.
— Va faire un tour, Gabriel.
— Ah ouais ? Et où putain ? OÙ ?

Je lui hurle dessus et le regard qu’elle me jette en dit long. Mon père est déjà parti à cette heure-là et comme il ne peut pas tempérer, ni Adam, je me fais violence pour traverser la cuisine et sortir dans le jardin le plus loin que je peux, n’oubliant pas mon chien avec moi.

Madeleine descend rapidement avec ce qu’elle a préparé pour le petit déjeuner.

— Austin ? Trésor ?

Elle chuchote.

— Tiens, c’est pour vous. Je suis désolée du comportement de Gabriel.

Quand Madeleine descend je suis en train de rajuster les couvertures de Darcy, elle dort toujours, au milieu de mon lit. Je secoue la tête.

— C'est de ma faute, je n'aurais pas dû réagir comme ça.

Je récupère ce qu'elle me tend et je la remercie. J'ai conscience que quand il s'agit de ma soeur, je suis vite sur la défensive. Surement trop, mais je n'arrive pas à le contrôler.

— Tu as le droit de réagir comme tu l’entends. C’est normal d’être inquiet.

Je regarde Darcy qui dort, elle est loin d'être paisible, juste épuisée.

— J'ai l'impression que c'est à chaque fois qu'elle est très excitée la journée. Hier elle est heureuse à cause de la bonne note qu'elle a eu.

— L’important c’est qu’elle ait toujours cette stabilité et ses rituels du coucher. Le psychologue a dit que ça allait se dissiper avec le temps.

Elle regarde Darcy avec tendresse.

— Tu devrais aller au lycée, Austin. Elle va beaucoup s’en vouloir si tu rates une journée d’école. Elle va se dire que c’est de sa faute et se rajouter une inquiétude.

Je regarde Darcy embêté.

— J'ai peur de la laisser.

J'avoues. J'ai peur qu'elle est besoin de moi et que je ne sois pas là.

— Gabriel est là, il va rester avec elle toute la journée. Il va te tenir au courant chaque fois que tu le voudras. Je serai là aussi.

Elle lui sourit.

— Elle va certainement dormir jusqu’à 11 heures déjà. Alors là journée sera à la moitié. Et tu finis assez tôt.

J'hésite plusieurs secondes, c'est pas facile pour moi, mais c'est le début de l'année et j'ai entrainement aujourd'hui à la pause déjeuner alors je finis par lentement hocher la tête. Je remercie Madeleine et je me prépare pour les cours.

Dans la journée :

SMS à Gabriel : Excuse-moi pour ce matin, j'étais fatigué, j'aurais pas dû réagir comme ça.

Ma mère est venue me dire que j’avais intérêt à me calmer et à être moins égoïste et méchant parce qu’autrement, elle me pousserait hors de la limite de mon bracelet. Je sais qu’elle ne ferait jamais ça, mais j’ai compris qu’elle n’était vraiment pas contente. Puis... maintenant que je suis réveillé, je réalise que je suis soulagé qu’Austin n’ait pas entendu tout ça. Alors je n’ai pas quitté Darcy d’une seconde et on regarde la télé dans ma chambre pendant qu’elle somnole sur son sandwich, Balthazar couché dans son panier à côté de mon lit.

SMS : c’est moi, j’étais pas réveillé. Je suis désolé... :(

Je souris en lisant son message parce que ça veut dire qu'on n'est plus fâchés.

SMS : Qu'est ce que tu as envie de manger ce soir ? Je rapporterai.

SMS : Toi
SMS : Ou japonais mais c’est un peu moins fantaisiste.
SMS : Ta sœur vote pour McDo. Elle a récupéré le courrier pour moi, je me range donc de son côté. Pas le choix.

SMS : Ça peut se négocier, le cabanon du jardin est dans ton périmètre.
SMS : Mcdo validé. Comment elle va ?...

SMS : On ira y faire un tour au clair de lune !
SMS : Ça va. Elle se souvient à peine de cette nuit. Elle somnole. On a joué au Monopoly. Elle a mangé (ce que ma mère a préparé, hein). Elle voulait retourner à l’école cette après-midi mais bon.

Je m'arrête au magasin de jouer en rentrant pour acheter une poupée à Darcy. Quand je rentre à la maison, ils sont en train de dessiner avec Gabriel, je me joint à eux. Quand je donne sa poupée à Darcy, elle est heureuse comme si je lui avais acheté quelque chose de fou. Elle part dans sa chambre jouer avec.

— Merci d'avoir veillé sur elle aujourd'hui.

Madeleine m'a dit qu'il avait passé la journée avec elle.

— Bah.. t’as une nounou gratuite qui ne peut pas s’enfuir, autant en profiter...

Je dis en riant.

— Ça a été ta journée ?

Je souris puis hoche la tête.

— Ça a été, j'ai tous les cours dans mon sac. Mais tu me manques au lycée, j'ai hâte que tu puisses revenir.

Ça me surprend tellement qu’il dise ça qu’un sourire idiot s’affiche sur mon visage.

— C’est vrai ?