Hallelujah — Adam & Gabriel #3

Le second choc est rude. Je me retiens de jurer parce qu’on est à l’église, mais.. bon sang. Wow.

— Mais t’es qui ? T’es possédé, c’est ça ?

J’écrase mon chapelet sur son bras et murmurant un vade retro satanas qui ne fonctionne pas.

— Adam.. mais si tu couches avec lui et que vous êtes pas en couple, c’est un plan cul.
— Dehors !

Ma mère s’est approchée sans que je ne l’ai entendue et elle choppe méchamment mon oreille.

— Tu patientes dehors, c’est clair ? Et tu rentreras à pied.
— C’est parce que j’ai dit sexe ou plan cul ?

Comme ma mère est une bonne chrétienne, elle me gifle. Tout le monde attendait ça visiblement, car le soulagement autour de nous est palpable. Quand on est un bon parent, on corrige ses enfants. J’suis pas sûr que la maison du Seigneur soit le meilleur endroit pour le faire, mais au moins je sors.

En sortant, j’ai croisé le regard d’Austin et ça m’a tordu le ventre tellement il était beau. Il m’a adressé un sourire gêné et je suis sorti avec autant de papillons dans le ventre que d’aiguilles dans le cœur. Hier soir, il était avec Jenny. Je sais qu’ils ont couché ensemble et ça me rend malade.

Je m’assois sur l’un des bancs du parvis. Le seul qui soit à l’abris du vent et de la neige. Je sais que je ne rentrerai pas à pied, maman s’en voudrait que je tombe encore malade.

J’attends dehors comme un con, je crève de froid, mais je bouge pas. Quand les gens commence à sortir, ma mère déboule en furie et je me retiens de lever les yeux au ciel.

— T’es complètement cinglé ou quoi ?

Je feins une toux et je sens qu’elle est sur le point de m’en décoller une autre.

— Tu vas aider le père Abraham à tout remettre en ordre. Tu feras ce qu’il te dit et j’appellerai pour savoir si tu peux rentrer.
— J’ai pas trop envie de rester seul avec lui.
— Ça suffit, Gabriel !
— Mais quoi ?? T’as jamais entendu ce qu’on dit sur les prêtres ? Franchement tu veux vraiment que je subisse un traumatisme aussi lourd ?

Cette gifle là est vraiment très violente. Elle me sonne et ça me fait mal dans tout mon corps – certainement à cause de la honte que je ressens.

— Je ne te supporte plus, Gabriel.

Cette phrase, je l’ai entendu des milliers de fois, mais jamais avec ce ton-là. Comme si c’etait La limite.

— Nous étions inquiet pour toi, mais là, notre patience a atteint sa limite.
— Cool.
— On en a parlé longuement avec ton père et on pense que tu devrais quitter la maison.

J’attends qu’elle rigole, mais elle est sérieuse. Mon père nous a rejoint, l’air grave. Puis Marie et Adam. J’ai l’impression que c’est une blague, mais non.

— Juste quelques temps.
— C’est un gag ?
— Non.
— Juste parce que j’ai parlé trop fort à l’église ? Mais papa ! Dis un truc là !

Mais lui, c’est évident qu’il dit rien. Il va pas sacrifier sa baise du premier samedi du mois juste pour ma gueule.

— On a vu avec ta sœur, tu peux aller chez elle. Nous, on ne sait plus comment s’y prendre.
— Mais maman !
— Tu rentres à pied, Gabriel. On t’attend d’ici une heure grand maximum. Ensuite tu feras ta valise et tu te rendras chez ta sœur par tes propres moyens.

Y a carrément un flot d’insultes qui me passe par l’esprit. Mais je me tais. Y a personne qui prend la parole et ça me tue. Ma mère se casse et demande à Adam d’aller chercher du pain puisqu’il est venu seul en voiture. Elle lui interdit formellement de me ramener, évidemment. Quand je me retrouve là tout seul avec Adam, j’ai trop envie de mourir.

— Putain mais c’est ta faute ! J’me fais jeter dehors à cause de ton plan cul ! Puis tu dis rien là ? Genre tu flippes de maman à ce point-là ? Famille de merde, là. Et me gonfle pas avec nia nia t’as un toit sur la tête et Austin c’est pire. Je sais, c’est bon. Débile va.

Je m’emporte sur lui car il est là, mais au fond, j’suis sûr que ma mère va pas vraiment me mettre dehors alors je suis pas inquiet. Je suis juste en colère car c’est injuste. C’est tout.

— D’aileurs j’t’ai attendu genre 20 minutes dans le froid. J’me fais sortir de l’église par ta faute et même pas t’as la politesse de me rejoindre. Ton plan cul il aime les gars soumis, nan ? Genre il claque des doigts et t’accourt parce que tu confonds envie de baiser et affection, c’est ça ?

Un mec aussi obéissant et fleur bleue que mon frère sait forcément pas comment gérer ce genre de situations. Pour lui, on fait l’amour, y a des sentiments.

Je me marre. Il est con.

— Nan, mais sérieux...

Mais il mouvte pas. Son visage est fermé et, putain, je crois qu’il ne ment pas. En fait, il ne peut pas mentir parce qu’il ne sait pas le faire.

— Il était trop tard pour rompre ? Pourquoi ? Il te menace ?

— Mais... Adam.

Je reprends tout mon sérieux parce que je comprends que pour lui, ce n’est déjà plus de la baise sans prise de tête.

— Tu peux pas t’embarquer là-dedans. C’est pas pour toi, ça va te blesser. Sans parler du fait que c’est tout sauf moral mais.. enfin j’sais pas, c’est pas ton genre de faire ça. Ça peut détruire une famille. T’imagines si papa faisait ça à maman ? C’est pas bien.

Mon ton n’est pas du tout celui d’un reproche. Je suis calmé et sincèrement inquiet pour lui. Il ne doit réaliser parce que c’est grisant et flatteur. Mais c’est pas bien. Même moi, je le sais.

— C’est avec lui que t’es parti en week-end, c’est ça ? Vous faites autre chose que coucher ensemble, pas vrai ?

Parce qu’échanger trois banalités avant de se déshabiller, c'est bien loin de passer des après-midis ensemble avant de le faire.

— Tu penses que ça peut être sérieux ? Il pourrait quitter sa femme ?