Start to sweat so hold me tight - Adam & Gabriel

Il y a tellement d’amour dans les yeux de mon frère que sa détresse me fait mal au ventre.

— Dis-toi qu’il s’est accroché une fois sans personne à ses côtés alors qu’aujourd’hui t’es là. Tout est écrit, Adam. Je suis conscient de la force avec laquelle tu l’aimes et ça compte.

Je lui souris sincèrement. Dieu ne fait pas ça pour lui prendre Logan. Ça n’aurait aucun sens.

— Il y est pour un peu moins de trois heures, c’est ça ? Je reste avec toi jusqu’à ce qu’il soit dans sa chambre.

J'espère que ça compte vraiment. Parce que je l'aime si fort que ça doit s'entendre partout, non ? Le Seigneur doit forcément le savoir et être magnanime... Il ne peut pas me l'arracher de nouveau maintenant.

— Ils m'ont dit trois heures oui. Peut-être un peu plus en fonction du réveil, justement...

Je dépose ma tête contre l'épaule de Gabriel, craintif, mais apaisé. Mon frère est là et je ne suis pas tout seul.

— Merci Gabou, j'aurais finis par péter un plomb tout seul là-dedans je crois..

— Qu’il dorme autant qu’il veut, tant qu’il se réveille en forme.

Je crois que c’est ce qui compte le plus. Puis ils ne touche pas à son cerveau, c’est ce qui compte.

— Ça fait du bien d’être dehors.

Notre bref silence est interrompu par le portable d’Adam. Il décroche tellement vite et se met rapidement debout alors je crois comprendre que c’est l’hôpital.

— Mr Saint-Clair ? Nous vous avons cherché en 105 mais vous n’étiez pas là. Il y a du un changement de programmation et le chirurgien qui devait s’occuper de Mr Wheeler n’est plus disponible. Nous avons besoin de vous pour savoir ce que vous souhaiteriez faire ? Vous êtes inscrit comme étant décisionnaire. Pourriez-vous nous rejoindre en salle d’attente du troisième rapidement ?

Le poids que j'avais dans l'estomac s'empare de tout mon corps. Si ce n'était pas pour Logan que je devais tenir, je crois que je me laisserai tomber ici même et me ferait passer pour mort.

— Suis-moi.

À la place, j'attrape Gabou par le bras et l'entraîne avec moi. Le temps de monter là-haut je lui explique ce qui est en train de se passer et on arrive à dédramatiser un peu la situation. Ça va aller, tout va bien se passer...

Une fois au troisième, je m'attends à avoir du mal à trouver la personne à qui m'adresser, mais la salle d'attente est quasiment vide et je reconnais l'anesthésiste de Logan.

— Rebonjour ! Excusez-moi de vous avoir fait chercher, j'étais dans le parc dehors. Il se passe quoi exactement ?

Je les vois jeter un coup d'oeil à Gabriel.

— C'est mon frère, il peut rester, non ?

— Bonjour, oui.

Le médecin affiche un air gêné et moi je crois que mon frère va nous péter un plomb. Genre littéralement. Il fait genre il maîtrise, mais franchement je ne sais pas comment il marche encore.

— Son chirurgien est absent, mais Mr Wheeler est déjà endormi. Nous avons un autre chirurgien disponible qui pourrait prendre le relais tout de suite, mais il nous faut évidemment votre signature.

— Mais comment c'est possible une telle situation ? Qu'à la limite il ne puisse pas être présent, je conviens, un imprévu peut arriver. Mais pourquoi vous avez endormi Logan si c'est ça ?

J'essaie de rester calme, parce que sinon je vais taper une crise de nerf et decompenser ici, en pleine salle d'attente.

— C'est qui l'autre chirurgien ? Un spécialiste aussi ?

Je ne sais pas quoi faire. Parce que Logan est suivi par la même personne depuis longtemps et que changer sans rien savoir, je n'aime pas l'idée. Et en même temps, il est déjà anesthésié..

— Il y a eu un problème dans la programmation informatique.

Il explique sobrement. Mon frère est calme. Moi, j’aurais tué l’anesthésie.

— Ce n’est pas un spécialiste le la hanche, mais c’est un excellent chirurgien. Il est au courant du cas, il attend simplement votre feu vert. Dans le cas où vous refuseriez, ce que nous comprendrions, nous n’aurons pas de place au bloc avant le mois prochain.

— Non mais vous vous foutez de ma gueule ?

Ça sort de ma bouche avec tellement de naturel que je sais que je suis en train de commencer à ne plus me contrôler.

— Il est où son chirurgien ?

Je demande en essayant de me recentrer.

— S'il est simplement chez lui, j'aimerais qu'on le rappelle parce que Logan sort d'un coma de plusieurs mois et que j'aimerais bien qu'il se réveille soigné par un spécialiste et sans avoir à un subir non seulement une autre anesthésie, mais en plus à devoir attendre un mois. S'il s'apprête à aller opérer quelqu'un d'autre, j'aimerais qu'on demande à cette personne si elle veux bien signer une décharge pour un autre chirurgien elle aussi. Pourquoi je serai tout seul ici si le chirurgien est entre deux patients ?

— Le chirurgien n’est pas disponible. Mais nous vous proposons une solution. Souhaitez-vous que Mr Wheeler soit opéré ou bien souhaitez-vous qu’il soit ramené en salle de réveil ?

Il répète sans sourciller.

— Donc soit il se fait opérer par un chirurgien non spécialiste parce que Vous avez une erreur informatique, soit il doit se faire anesthésier de nouveau dans un mois parce que Vous avez administré l'anesthesiant sans prendre cas de ce qu'il en était du chirurgien.

Le gars acquiesce à mes dires et j'ai envie de lui arracher les dents. Je suis pas quelqu'un de mauvais, mais on ne touche pas aux miens.

— Très bien. Je porte plainte maintenant où j'attends que Mr Wheeler se réveille ?

— Vous refusez donc qu’il soit opéré ?

Il soupire doucement.

— Je comprends votre colère. Je la respecte. Je ne veux pointer le doigt sur personne pour cette erreur, il y a eu un imprévu et je m’en excuse au nom de la clinique. Nous avons trouvé une solution, même si ce chirurgien n’est pas un spécialiste de la hanche, il est urgentiste et tout a fait qualifié pour retirer des broches ou procéder aux injections. Je vous répète donc que nous sommes désolés pour l’erreur qui a été commise, mais tout comme vous, nous connaissons les risques liés à cette anesthésie, et votre compagnon est actuellement en train d’attendre sur une table avec toute une équipe autour de lui, prête à intervenir. Si vous voulez porter plainte, il n’y a pas de problème, nous connaissons le système et sommes protégés contre ces erreurs puisque personne ne pouvait prévoir que votre chirurgien perdrait l’un de ses proches aujourd’hui. Nous avons été mis au courant trop tard. Je vous demande simplement de nous donner une réponse ferme et définitive au plus vite car c’est un patient qui nécessite des précautions et nous ne pouvons le faire patienter plus longtemps. Je suppose que la plainte peut attendre, elle ne sera pas moins valide d’ici une minute ou deux.

Je rigole nerveusement, parce que je ne supporte pas sa façon de dire tout ça pour se dédouaner alors qu'en réalité la faute vient de lui. Le chirurgien n'avait pas son téléphone avec lui en salle préopératoire, c'est qu'il a forcément appris le décès de son proche avant, et malgré ça l'anesthésiste a lancé les opérations sans réfléchir.

— Il est hors de question qu'il subisse une seconde anesthésie dans un mois.

J'ai pas envie de laisser un autre chirurgien l'opérer, je pourrais même dire que j'ai ma fierté à tenir, mais je ne suis pas au travail. On parle de Logan, on parle de sa vie, de sa hanche, de sa douleur qui pourrait s'ammoindir, de son envie d'aller de l'avant et de reprendre le sport et surtout, de la confiance qu'il a placé en moi pour ce genre de décisions.

— Opérez le, dites moi ou je dois signer ou je sais pas quoi. On aura tout le temps de discuter après de l'erreur qui a été commise et de la compassion dont vous avez fais preuve à mon égard, en ne vous excusant qu'au moment où vous m'avez annoncé le décès du proche du chirurgien pour me faire culpabiliser. Et pour lequel je suis désolé, au passage.

Le médecin lui lance un regard noir.

— Je vous envoie quelqu’un en 105.

Il s’en va presque en courant pour pouvoir lancer l’opération. Je regarde mon frère, je crois qu’il va pleurer.

— Ça va aller, t’inquiète pas. Au moins c’est toi qui décides. Imagine si ça avait été son ex-femme.

Je regarde Gabriel en levant les yeux au ciel.

— Tu parles. Cette connasse leur aurait dit de le faire opérer le dentiste et de laisser un chiffon dans la plaie.

Je soupire et je réalise avec les mots de Gabriel qu'en effet, si elle avait été la personne à contacter, elle n'en aurait rien eu à foutre du bien être de Logan.

— Ils ont même pas intérêt à se planter ou je deviens fou. Et le quelqu'un qui arrive a pas intérêt à être con.

Je marmonne en retournant vers la chambre de Logan.

Quand on arrive dans la chambre de Logan, je crois que j’ai envie de rire en reconnaissant Alexis. Dans toute la clinique, c’est elle qu’on envoie.

— Coucou, je viens en paix.

Elle dit avec un petit sourire.

— Eh bah courage, il veut tuer des gens.

Je dis en allant m’installant dans un fauteuil, dans le coin de la pièce.

— Alors... ils n’ont pas eu le temps de t’expliquer, je suppose ?

Je grogne à l'attention de Gabriel qui manque de rire en allant s'asseoir. Je suis paniqué, ok.

— On m'a expliqué que le chirurgien avait eu un décès et que soit c'était un type moins compétent qui opérait Logan, soit on devait attendre un mois de plus et lui faire subir une autre anesthésie générale ! Des malades ! C'est quoi ce dilemme de merde ?!

Je gesticule de partout. Au moins avec Alexis, je peux évacuer tout en essayant de comprendre un peu mieux ce qu'il vient de se passer.

— Ils sont pas clair dans cette clinique Alex, je déconne pas. Vous vous défoncez à un truc le matin en arrivant ou quoi ?

— En fait, l’équipe de nuit n’a pas passé l’information et le chirurgien était là ce matin pour récuperer je ne sais quoi. Dans la confusion... tout le monde a pensé qu’il était là pour l’opération, mais ce n’était pas le cas.

Elle explique alors que mon frère tourne en rond.

— Franchement, ça n’arrive pas souvent, vous n’avez pas eu de chance. Mais c’est un super chirurgien, y a aucun risque !

— Tu déconnes ? Non mais c'est plus que pas de chances là putain ! T'imagines si l'autre gars avait pas été là ? Si le seul type dispo ça avait été un chirurgien dentiste ou j'sais pas quoi !

Je dis, hystérique. Je suis en colère, mais pas contre Alexis, simplement contre l'équipe de nuit qui n'a rien su gérer.

— Merde mais c'est quoi ces cons qui oublient de transmettre ce genre d'infos ? Si on nous avait informé ce matin qu'il avait eu un décès bien sûr qu'on n'aurait rien dit et qu'on aurait attendu. Le pauvre... Mais là ils l'ont endormis putain ! Ils l'ont endormis et l'autre là il arrive avec ses grands yeux ''Oui le chirurgien est pas là on fait quoi ?'' ! Putain mais je suis au bord de la crise cardiaque parce que j'ai peur qu'il se réveille même pas et ils font ça ! Merde !

Quand je fini ma tirade, je suis en train de pleurer et ça fait du bien. C'est tout ce que je retiens depuis quelque jours qui sort enfin et la panique que je viens de vivre n'a rien arrangé.

Alexis s’approche pour lui faire un câlin et ça m’évite de me lever. Il est dans un état de nerfs et de stress tel que j’en arrive à stresser moi-même. Moi je me dis que j’espère qu’il ne va pas se réveiller avant la fin de l’opération mais je ne le dis pas à haute voix.

— Il y a toujours un chirurgien sur place. Il a annulé une opération pour Logan. Tout va bien se passer, je t’assure. Sa plus grosse opération il l’a eu y a quelques mois apparemment, donc c’est plus routinier.
— Adam a besoin de se reposer un peu. Ça ira mieux quand Logan sera sorti. Quels sont les papiers à signer ?

Gabriel me fait sortir de ma transe et je me rappelle soudain pourquoi Alexis est là, à la base. Elle se détache en essuyant mes larmes et je lui souris doucement. Ça va aller, si même l'infirmière y croit, c'est bon. Non ? En même temps, elle est plus mon amie qu'autre chose...

— Tu crois que tu pourras me prévenir quand ils le remonteront en salle de réveil... ?

— Oui, bien sûr. Même de l’avancée, si tu veux.

Elle la lâche et sort tous les papiers.

— Allez, signe-moi ça que je puisse retourner bosser et aller chiper des informations. Tout le monde en parle de ton mec, ici. C’est la mascotte. J’avais jamais réalisé que c’était ton kiné, c’est dingue. Je m’en suis pas mal occupé quand il était dans le coma, le pauvre.

— La mascotte ? Pourquoi ?

C'est bizarre de me dire que tout le monde le connaît plus ou moins ici. Peut-être parce qu'il est resté ici longtemps pendant qu'il était dans le coma et que c'est pas commun, à White Falls.

— Je parlais pas trop de lui... Comme t'as du le comprendre, il était marié, alors c'était pas hyper évident. En plus Charlie bossait dans le même immeuble que lui alors bon. Voilà.

Je rougis, partagé entre la honte et la gêne. Je sais qu'Alexis ne me jugera pas, mais quand même. Je l'écoute attentivement me dire où signer et quand je fais ça, je prends conscience que je suis en train de signer un papier officiel pour Logan. C'est moi, la personne à contacter. Pas Moïra, mais moi. En seulement deux semaines, on a plus avancé que pendant des mois lors de notre rencontre. Ça me fait sourire, et ça fait du bien.

— Bah... attends, t’as vu l’accident qu’il a eu ? Neuf mois dans le coma et il revient à lui alors que personne ne venait le voir...J’te jure quand sa femme, enfin son ex, est venue.. on a tous été choqué. Depuis on voulait qu’il se réveille. On lui parlait tout le temps.. on s’est attachés à lui. C’était bizarre de le voir partir.

Elle sourit de toutes ses dents.

— Il a beaucoup parlé de toi à son réveil. Enfin, je suppose que c’était toi. Il était confus.

Elle lui explique les choses à signer, ce qu’il fait rapidement, et ça me fait réaliser à quel point il est important pour Logan. En seulement deux semaines ils sont fusionnels à ce point-là alors que moi, en 18 ans, je n’avais jamais mis les pieds chez Austin.

— Bon.. je dois retourner bosser, je transmets tout ça à l’administration ! Dès que j’ai des nouvelles, je te préviens !

Au fond, j'espère aussi sans doute que ce soit de moi dont il parlait. J'aurais voulu être là, qu'il ne soit pas seul, mais grâce à eux tous il ne l'a pas vraiment été. Et maintenant, il ne le sera jamais plus. Je serai là avec lui, tout le temps, peu importe ce que ça doit me coûter.

— Merci d'être venue nous expliquer tout ça. Je sais pas si tu t'es désignée oubsi c'est un hasard, mais voir une tête familière parmi le personnel ça fait du bien.

Alexis me serre brièvement l'épaule et quand elle part avec tous les papiers, je m'assois sur le lit de Logan.

— J'ai été un peu excessif, c'est ça ?

Je demande à Gabou, toujours assis sur sa chaise.

Je secoue la tête.

— Non. Enfin pas à mes yeux. Moi aussi, j’aurais paniqué à ta place. Et j’aurais fait le même choix pour éviter une deuxième anesthésie.