Start to sweat so hold me tight - Adam & Gabriel

Mon choix était fait, de toute façon, mais ça me rassure de savoir que mon frère aurait fait le même.

— Je pouvais pas prendre le risque qu'il en subisse une seconde dans si peu de temps. Pas alors que celle là aurait servi à rien... J'espère simplement que le chirurgien va être aussi bon que le sien. Qu'il va pas faire ça comme un boucher et que les cicatrices seront pas trop dégueulasse non plus.

Je soupire, est ce que penser aux marques tout de suite est vraiment utile ? Je ne crois pas, non.

— Si ça avait été pour la greffe, je t’aurais empêché de dire oui mais là... ça devrait aller. Y a pas de raison. Tant qu’il peut remarcher, c’est le plus important.

J'acquiesce en silence, le cœur toujours aussi lourd.

— Tu veux un truc à boire ou à manger ?

Je ne crois pas que retourner dehors soit une bonne idée, mais j'ai quand même besoin de bouger un peu.

— Promis je ne t'agresse pas et je ne redeviens pas un con.

— Ouais. Je vais aller chercher un truc, bouge pas.

Je ne lui laisse pas le choix parce qu’il vaut mieux qu’on nous trouve rapidement en fait. J’ai confiance en l’hôpital, le personnel semble investi d’une mission avec Logan et c’est pas toujours comme ça.

Quand je reviens, Adam tourne en rond alors je le force à s’asseoir et je lui parle de Balthazar. La plupart du temps il m’écoute, mais bon. Pas toujours. Quand Alexis revient nous dire que ça va être plus long que prévu car ils ont repéré plusieurs choses qui n’allait pas, sans qu’elle ne sache quoi, Adam se mure dans un silence de stress et c’est terminé, on ne parle plus.

Quand quelqu’un revient, ce n’est pas Alexis, mais une femme qu’on n’a jamais vu. Apparemment, c’est la chef de l’établissement.

— Mr Wheeler est en salle de réveil mais nous aimerions vous communiquer plusieurs choses. Pouvez-vous me suivre sans mon bureau ?

Je n'aime pas la tournure que ça prends. On repère des choses imprévues en premier lieu et voilà que maintenant, je dois aller dans un bureau pour avoir des informations particulières. Pourquoi je ne les aient pas ici, hein ?

Vivement je me relève de sur le lit et je suis la responsable venue à nous. Je ne panique pas, pas encore, ou peut-être que c'est parce que ce n'est pas possible d'angoisser plus que je ne le fais déjà depuis tout à l'heure.

— Bien sûr, on vous suis.

Je ne pars pas sans Gabriel, parce que si ça ne va pas, je ne veux pas qu'il ne soit pas là. Elle saura nous le faire savoir s'il n'a pas à être là plus tard.

On s’installe sans le bureau et la tension est palpable, mais elle ne fait pas durer le suspense éternellement.

— Pour commencer, votre compagnon va bien. L’opération s’est très bien passée, la rééducation se fera ici, dans nos locaux, cinq jours par semaine, comme convenu avec lui au préalable.

Mon frère soupire de soulagement, puis affiche une tête de « hein ? Cinq jours de quoi ? Je vais le tuer » et puis le visage du médecin devient plus sérieux et il blêmit carrément. C’est tellement un ascenseur émotionnel que je sais d’avance qu’il va faire un malaise à un moment ou à un autre. Ou perdre les pédales.

— Durant l’opération, le chirurgien a repéré une inflammation anormale au niveau de la hanche, sur l’un des scanners des scanners de contrôle. Même s’il ne devait pas ouvrir au niveau de la hanche aujourd’hui, il a pris le risque. C’était infecté, purulent. Il a d’abord pensé que c’était un rejet de la greffe, mais tout va bien de ce côté là. Durant sa précédente opération, l’un des internes ou... eh bien, nous n’en savons rien, nous ne pouvons pointer du doigt personne et assumons l’entière responsabilité de cette erreur, l’une des personnes présentes ce jour-là à oublié un bout de compresse avant de refermer.
— Oh la vache. Mais il devait souffrir le martyr !
— J’en suis désolée. Et c’est pour cette raison que nous avons pris la décision de le plonger dans un coma artificiel pour les jours à venir. Pour lui éviter de souffrir de trop.

J'écoute ce qu'elle me dit, hors de moi, mais désireux de tout entendre jusqu'au bout. J'ai conscience que ce n'est pas sa faute à elle, mais j'ai l'impression d'assister à l'enregistrement de Vidéo Gag. À quel point cette journée pouvait être aussi horrible. Je revois Logan souffrir le martyr, comme l'emploie si bien Gabriel, et ça me retourne le ventre. J'ai hâte qu'il soit là, qu'il se réveille et peut-être aussi que je l'embrouille pour ces cinq jours semaines dont il a complètement oublié de me parler. Et sans doute volontairement, cette fois.

Mais la suite arrive. La suite arrive et je ne m'enerve pas. Je suis choquée, sonné et je n'arrive plus à penser à rien. Ils ont replongé Logan dans le coma. Comme si c'était normal. Comme s'il n'y avait pas de risques qu'il ne s'en réveille pas. Comme si je ne suffoquais pas déjà assez de le savoir anesthésié.

— C'est une blague ? Pour... Combien...

Finalement je ne crie pas ni ne hurle. Je tombe juste par terre.

— Oh merde.

Je n’ai même pas le temps de le rattraper qu’il s’écrase par terre, la tête la première.

. . .

Quand Adam ouvre les yeux, je me lève immédiatement. Il est allongé dans le lit d’en face de celui de Logan. Il a été out au moins deux heures, j’ai hésité à prévenir maman, mais elle aurait retourné l’hôpital entier.

— Salut. Touche pas ta tête t’as des points de suture. Genre tu t’es éclaté contre le carrelage, j’ai eu mal au ventre. Ça va ? T’es sonné ? Logan est là, en face.

Je dis en le pointant du doigt.

— Mais te lève pas trop vite ! Hey, tu vas t’évanouir encore !

Quand Gabriel me dit de faire attention, je comprends vite pourquoi. J'ai la nausée et je me rallonge tout de suite pour ne pas risquer de vomir à ses pieds.

— Pourquoi je me retrouve avec des points de suture et pourquoi t'as eu mal au ventre ?

C'est flou, tout. Ma vision, mon estomac, ce qu'il s'est passé. Logan est là, juste en face de moi, mais je n'ai aucun souvenir de l'avoir vu remonter de la salle de réveil.

— C'est quoi l'embrouille ?

— Bah.. tu te souviens pas ? On t’a dit que Logan était plongé dans un coma artificiel et t’as perdu connaissance ?

Je le regarde interdit pendant deux secondes avant de me souvenir de tout ce qu'il s'est réellement passé. Le mauvais chirurgien, la compresse oubliée, le coma artificiel, mon malaise... Vie de merde. Je soupire en fermant les yeux. Je dois croire que ça va me faire oublier tout ça.

— J'aurais mieux fait de rester dans les vapes un peu plus, j'ai la gerbe c'est dégueulasse.

Je rigole, sans même savoir pourquoi, puis je réalise.

— Attends mais si ils ont eu le temps de recoudre, c'est que j'ai été comme ça combien de temps ? Recoudre quoi, d'ailleurs ?

Je demande en me touchant la tête malgré la remarque de Gabou. Et je me fais mal.

— Mais le front ! Genre pourquoi tu tombes pas sur moi ? J’étais juste à côté ! Toi tu choisis de tomber de l’autre côté la tête la première. Donc bon... le carrelage t’as dit bonjour... c’est pas grave. Ça t’as calmé.

Je dis en retenant un sourire.

— T’as dormi deux heures. Entre temps ils ont remonté Logan. J’ai toutes les informations pour porter plaintes. Le coma artificiel durera trois jours et ensuite ils l’en sortiront pour qu’il se réveille par lui-même. Enfin trois jours si jamais sa hanche va mieux, plus si ça ne va pas. C’est pour le soulager.

— Ils t'ont dit si c'était risqué ? Il se passe quoi s'il ne se réveille pas quand ils le sortiront du coma artificiel ?

Je suis à peine sorti d'une chute et d'un trou de deux heures que je m'inquiète déjà de nouveaubet que je dois stresser Gabriel.

— Pardon, je vais essayer de me calmer. De relativiser un peu.

Je lui souris et je crois que je n'ai jamais autant remercié mon frère d'avoir été là pour moi. J'espère qu'il peut lire toute ma gratitude dans mon regard.

— Merci d'avoir géré, autant pour moi que pour Logan.

— C’est pas moins risqué que l’anesthésie en elle-même. C’est comme son prolongement donc... quand ils arrêteront de le maintenir endormi, ce sera à lui de se réveiller. Comme pour l’anesthésie. Mais c’est normal, t’inquiète, j’suis là pour ça.

Je vois vraiment sur son visage qu’il essaie de se détendre mais c’est dur. J’ai envie de l’aider à penser à autre chose alors je lui fais part de ce à quoi j’ai pensé pendant son temps off.

— J’crois que j’ai envie d’être famille d’accueil pour les enfants des pays défavorisés qui viennent se faire opérer en Angleterre.

J'assimile plus ou moins ce qu'il me dit sur Logan et c'est seulement après que son projet monte à mon cerveau.

— Attends ! Ceux qui les garde, les emmène à l'hôpital et tout ?

Il acquiesce et je suis fasciné. Ce gosse est clairement devenu un adulte et il est sûrement le plus riche de nous tous.

— Mais genre plus tard ? Quand t'auras ta maison et tout ? Ou t'entraines maman et papa dans le truc ? Enfin, maman, parce qu'elle sera trop capable de faire ça elle aussi !

Je secoue la tête.

— Non, j’ai envie de faire ça sans les parents. Genre mon expérience à moi. Donc je vais faire cette formation d’abord pour avoir un appartement et ensuite lancer les démarches ! Avec mon métier je serais qualifié. Je vais faire du baby-sitting. J’ai déjà mon brevet de secouriste avec le bénévolat. Faut que j’en parle à Austin. Ça va être super de pouvoir accueillir des enfants et les rassurer et rendre l’opération moins effrayante ! J’ai trop hâte !

Je souris, la fierté dans les yeux. On en revient toujours au même : même s'il n'en veux pas, Gabriel à un contact et un attachement aux enfants qui est fou. Il a un truc qui les aidera à se sentir mieux et en sécurité, c'est évident. J'espère qu'il saura en faire profiter les enfants que j'espere avoir un jour. Même si ce sera bien moins tôt que ce que je lui avais annoncé.

— Y'a des démarches à faire pour ce genre de choses ? J'y connais rien putain. J'ai l'impression d'apprendre mille trucs avec toi !

Toujours allongé, j'essaie de me relever un peu.

— C'est bien que tu veuilles faire ça seul ! C'est un engagement que tu prendras consciemment et c'est beau. Austin serait ok tu crois ? Vous comptez bien emménager ensemble ?

— Bah ouais, ouais. Y a une enquête quand même. Ils peuvent pas confier les enfants à n’importe qui. Même si c’est du bénévolat.

Je lui souris fièrement.

— Bah.. j’avoue que j’en sais rien. J’en parle pas, j’ai trop peur qu’il me freine dans mes délires. Fin j’sais pas, ça fait bientôt un an qu’on est ensemble et j’ose pas parler d’avenir du coup ça me fait peur. S’il me quitte, je meurs. Mais en même temps j’ai mille projets, et y a Darcy.. je sais pas. En fait, j’ai pas envie d’y penser. Même si va falloir en parler.

— Tiens toi bien alors, on sait jamais.

Je rigole doucement en essayant de lui donner un coup, mais je vise un mètre à côté.

— Faudra bien qu'il l'a lâche un jour sa sœur, Gabou. Même elle a un moment elle va l'envoyer se faire voir. Il peut pas la couver comme ça jusqu'à ses dix huit ans.

Ça semble normal à tout le monde, mais pour aller faire comprendre ça a Austin.

— Mais si toi l'idée te plaît, alors fourni les efforts pour ! Ça vient de te venir, la ? Ou t'y avais déjà pensé avant ?

J’ai peur de pas être celui qui donnerait envie à Austin de tout quitter. Et pourtant, je l’aime comme un dingue.

— Ouais j’y ai pensé là, en attendant que tu reprennes conscience. J’ai envie. Ça va être super de les aider. J’adore les enfants.

— T'adores les enfants, les enfants t'adorent, t'as l'autorité pour les maîtriser et le caractère pour les amuser. Ça passe toujours bien. Regarde ne serait-ce que Salomé et Sephora, tonton Gabi elles en peuvent plus. Alors t'assurerais forcément, encore plus en ayant conscience que tu les aides à aller de l'avant pour une vie meilleure !

— Ouais ! Ça va être génial !!

Ce sera toujours mieux qu’avoir des enfants.

— Alors... ça va mieux ? Puis t’as pas trop mal ?

— Trop hâte de te voir concrétiser tout ça !

J'acquiesce quand il me demande si ça va.

— Je crois que j'ai bien plus mal émotionnellement que physiquement, mais bon...

Je jette un œil à Logan et je me rends compte que ce soir, je vais devoir essayer de trouver le sommeil tout en sachant que lui n'aura pas quitté le sien. Et ce pendant plusieurs jours encore. J'ai l'impression de ne vivre qu'à moitié, de le voir ici comme ça

— Tu sais si Alexis est encore là ? Comme je suis tombé, je peux peut-être dormir là ce soir, on sait jamais.

— Non, tu peux pas. On n’est pas dans un film et on n’a pas les moyens de payer un lit pour le fun. Par contre... tu vas pas le voir ? Lui parler ?

Ça me parait tellement bizarre qu’il ne soir pas déjà à son chevet que j’ai peur que ma présence le gêne.

— Je peux vous laisser tous deux, si tu veux. Mais je crois qu’il aimerait bien t’entendre.

Moi je lui ai déjà expliqué la situation, au cas où. Pour pas qu’il pense qu’Adam l’ait abandonné.

— Je sais pas si je vais réussir à ne pas pleurer...

Ça semble dramatique et grossier dit comme ça, alors je poursuis.

— Je veux dire... J'ai pas envie de lui faire subir ça encore en plus. Je pense qu'il a bien plus de raisons que moi d'avoir mal, dans tous les sens du termes.

Je m'assoie enfin sur le lit et même si la nausée est toujours présente, c'est déjà bien mieux qu'il y a quelques minutes. C'est à moi d'être fort, je le sais, je ne suis plus ni un enfant ni irresponsable. Logan a confiance en moi et je dois agir comme tel.

— Tu peux juste m'aider à me stabiliser Gabou s'il te plaît ?

Je lui demande en m'appretant à me lever.