Une grande nouvelle peut en cacher une autre ! — Wheeler & Milton

Les Wheeler m'avaient manqué. On rentre à peine de deux mois en Indonésie et la première chose qu'on a fait après avoir posé nos valises, c'est aller déjeuner chez eux. Les décalages horaires nous a mis hors service, mais ils nous manquaient trop, tous les cinq. On skype régulièrement et pourtant, ce n'est jamais assez. On a raté les premiers pas des jumeaux, ils ont raté les premiers mots de Max... c'est nul. Mais Charlie est tellement heureux de voyager que je n'imagine plus ma vie autrement. Moi aussi, j'y ai pris goût et Maxine n'a pas le choix puisqu'elle a moins de 18 ans.

— Alors.. vous repartez quand ? Où ?

Logan me sourit et j'attends que Charlie se réinstalle près de moi pour me caler contre lui. Lui et Adam sont partis coucher la colonie de vacances et le silence qui règne soudain est vraiment apaisant.

— Même Livie dort ?

Logan hoche la tête.

— C'est cool !

Je jette un oeil à Charlie avec un large sourire et je lui vole un baiser.

— On va pas repartir avant un moment parce que bon... vous connaissez Charlie, toujours en train de paniquer alors il m'a fait promettre que pendant mes grossesses et les trois premiers mois de nos enfants, on ne quitte pas l'Angleterre.

Revoir Alexis et Charlie, ça fait un bien fou. On est occupés, y'a pas de problème là-dessus, mais ils sont nos meilleurs amis et je sais que ça fait autant de bien à Logan qu'à moi de les revoir enfin. Et Maxine a tellement grandi que j'ai failli lâcher une larme lorsqu'ils sont arrivés.

— Ça m'étonne pas de lui, ça !

Je souris pour le taquiner, avant de me rendre compte de ce que ça laisse entendre. Et en me tournant vers Logan, je vois à son visage que lui aussi il semble assimiler les pièces du puzzle.

— Attendez-là, vous êtes quand même pas en train de nous annoncer que Maxine va être grande sœur ?!

Je demande au cas où, prêt a exploser de joie.

— Bah si !!

Je dis avec un large sourire, en mettant un coup de coude à Charlie pour qu'il leur annonce le sexe du bébé.

— J'crois qu'il est encore traumatisé par l'hôpital de Bali dans lequel on s'est rendus pour faire une écho. On n'avait même pas fini le rendez-vous qu'il était en train de réserver un vol pour qu'on rentre.

— Doux Jésus !! Félicitations !!!

Je jubile comme un con et c'est plus fort que moi, je vais les serrer contre moi, tous les deux.

— Je vais être tonton de nouveau !

J'essaie de rester digne, et surtout de ne pas réveiller nos enfants.

— Mais ça fait combien de mois ? Vous savez déjà le sexe ? On veux tout savoir !

— Apparemment presque trois mais... on sait pas trop. Je pensais être malade à cause de la bouffe mais c'était pas le cas... Je sais que c'est une fille, j'le sens. Alors c'est une fille.
— T'es consciente que c'est pas toi qui décide ?

Logan me jette un regard de travers et je lui fais un beau doigt d'honneur.

— Toi tu décides bien qui t'adopte, non ? Bah moi j'ai une fille.

Il éclate de rire et je le suis volontiers, même si je sais que j'ai raison.

Je lève les yeux au ciel devant leur connerie. Lexie est déterminée, alors j'espère de tout mon cœur que ce sera une fille.

— Pourquoi ton mec il fait la gueule là ?
— Dégage toi, je fais pas la gueule ! Mais la seule fois où j'ai évoqué que ça pourrait aussi être sympa d'avoir un petit mec, j'ai failli rester à Bali avec le nez pété.

Charlie rigole, mais vu le regard qu'il lance à Lexie, je suis sûr qu'elle l'a déjà envoyé balader.

— Vous avez fixé un rendez-vous ici rassurez-moi ? Vous pouvez pas rester dans le flou comme ça !

— On n’est pas dans le flou.

J’insiste.

— On va se mettre à jour dès que possible, là on revient limite de l’aéroport...
— Ça va le décalage horaire ?
— Ouais, mais cette nuit... d’ailleurs ça m’étonne que Max n’ait pas fait de comédie, ça fait deux semaines que fait la sieste sans son père c’est impossible.

Je passe un bras autour de la taille de Charlie. Je trouve ça trop adorable.

— Elle dort avec les autres ? Parce qu’elle va les réveiller sinon.

Ils sont adorables tous les deux. Ils sont publiés aussi amoureux qu'au premier jour et ça me fait sourire niaisement. J'en vole un baiser à Logan, au passage.

— Oh ma petite puce ! Elle est dans la chambre de Blanche et ça a eu l'air d'aller. Si elle commence a s'agiter, on pourra toujours la mettre dans le bureau, mais y'a aucune veilleuse, ni musique.

Je soupire. Nous y'a pas besoin de papa, mais il y en a un, s'il n'a pas de musique pour dormir, ça peut durer des heures.

— Bon. Et bien, on va fêter ça ! On n'a pas de champagne, même pas de bière non plus, mais on peut trinquer avec du Perrier ?

Je demande en riant.

Logan aussi, nous félicite. Je sais qu’il va fêter ça avec Charlie.

— Comme si je pouvais boire de l’alcool, pff.

Je dis en riant.

— Hey au fait, Adam, j’ai noté pleiiiiin de recette de là-bas, pour toi. Je me suis dit que c’était le meilleur cadeau. J’ai acheté un livre de recette, je le remplis et je te le donne. Puis je le remplirais chaque fois que je rentrerai d’un pays.

— Excuse nous de tous être des hommes !

Je réponds à Lexie en riant, avant d'avoir des étoiles plein les yeux.

— Mais c'est génial comme idée. Comment je vais me l'a péter avec ça ! T'es une championne !!!

Je lui envoie plein de bisous et je lève les yeux vers Logan, aux anges.

— Tu vas goûter à des plats du monde entier sans quitter ton canapé ! Tu rêves pas déjà là ?

On dirait un gamin.

— Mon rêve de vieux gars, ça va être de gagner au loto et d'ouvrir un restaurant, je le sens !

— Ouais bah seulement si on gagne au loto parce qu’avec le crédit qu’on a, on va éviter de se retrouver à vivre dans les cuisines du restaurant...

Logan rigole, même si je sais qu’il est sérieux. Si Charlie voulait ouvrir un restaurant, moi j’aurais foncé tête baissée comme une andouille.

— Ça va depuis qu’ils marchent ? Je vois que vous avez mis des protections partout !

Logan s’apprête à me répondre au moment où ça sonne à la porte.

— T’y vas mon bébé ?

Je grimace en voyant mon rêve de restaurant partir en fumée et quand ça sonne, j'acquiesce a la demande de Logan. Un dimanche après-midi, alors qu'on n'attends personne ça doit être une erreur.

— Oui j'y vais ! Continuez, j'arrive.

J'embrasse la joue de Logan et je file ouvrir la porte. Comme je l'avais pressenti, c'est une erreur. Parce que cette fille qui frappe chez moi, je ne la connais ni d'Eve ni d'Adam.

— Bonjour ! Vous désiriez ?

Ça fait une demi-heure que je galère dans cette ville parce qu'il a fallu que le seul taxi que je trouve soit le débile du coin qui s'est retrouvé là par erreur et qui ne connait pas les rues. Puis quand j'arrive enfin, un mec qui n'est pas mon frère m'ouvre la porte.

— Ah merde, j'ai dû me tromper. Pourtant, c'est bien ici le 88 ? Non ? Ah mais j'suis bête, t'es le mari de Logan ? Il est là ? C'est toute une histoire pour le retrouver, franchement ! Qui déménage aussi souvent ?

Je ris un peu, je crois que c'est nerveux. Surtout qu'il me dévisage d'une manière que j'apprécie peu.

— Bah quoi ? Tu peux lui dire que Romie est là ? Enfin Romie sa soeur parce que sinon, il va dire qu'il n'en connaît pas. Ou tu peux me laisser entrer, peut-être ?

Je demande avec une petite moue.

Je reste devant elle comme un con, à écouter tout ce qu'elle peut me dire et je me prends une claque énorme. C'est pas que j'avais oublié qu'il avait une sœur, maintenant quelle est là et qu'elle se présente, je sais qu'on en a déjà parlé Logan et moi. Mais ca semble tellement dingue que je ne sais pas comment réagir. Ils ne sont pas censé ne plus avoir aucun contact elle et lui ? Comme avec ses parents ?

— Oui, bien sûr, entre. Désolé, je ne m'attendais pas du tout à te rencontrer. Bref... Adam, son mari, oui.

Je lui souris poliment, avant de refermer la porte derrière nous et j'ai à peine le temps de réaliser ce qu'il se passe vraiment que j'appelle Logan.

— Mon cœur ? Y'a Romie, enfin, ta sœur, qui est là.

Et tout le monde se retourne sur nous quand on passe l'entrée.

Quand j'entre dans le salon, c'est la première personne que je vois et avant qu'Adam m'annonce, j'ai juste le temps de voir à quel point il est heureux. J'ai toujours peur que ça ne dure pas, si je suis là, alors je capture l'instant avant d'affiche un large sourire.

— Putain, Romie !

Lexie et Charlie sont là, je pensais qu'ils étaient en Thaïlande ou j'sais pas où. C'est la première qui se lève pour me faire un câlin.

— Mais qu'est-ce que tu fais là ??
— C'est Charlie qui m'a donné l'adresse.

Logan se lève à son tour et il me serre tellement fort que je crois comprendre qu'il est content de me voir.

— Mais qu'est-ce que tu fais là ? Tu ne devais pas sortir avec un moment !
— Prison surchargée, bonne conduite... comme j'suis devenue majeur, j'ai payé ma dette. Par contre, j'avais pas d'argent pour le taxi donc là, il attend dehors alors..
— Ok, ouais. J'y vais.

Il dit en levant les yeux au ciel avant de se détacher de moi ; au passage il embrasse son mari et j'trouve ça vraiment trop bizarre de voir mon frère officiellement avec un mec. Bizarre dans le sens génial, évidemment.

— Bon bah, vous faites quoi ? Réunion de famille ? Vous avez des enfants non ? Ils sont où ?

Je demande en regardant Adam. Ça doit être bizarre pour lui.

La scène à laquelle j'assiste me semble complètement surréaliste, similaire à un film. C'est comme si j'tais là, mais que je n'avais aucune influence sur la moindre chose. Tout le monde se connaît, sauf moi. Tout le monde semble se parler régulièrement, sauf moi qui ne connait même pas la soeur de Logan. Et tout le monde semble trouver ça normal d'entendre le mot "Prison" flotter dans les airs, alors que moi j'étais convaincu qu'elle vivait chez ses parents, je ne sais où en Angleterre.

C'est déstabilisant de tomber ainsi des nues. J'ai la vague impression de ne connaître mon mari qu'à moitié et je crois que ça me fait flipper. Est-ce qu'il s'est vraiment fâché avec ses parents quand il était ado ou est-ce que c'est un truc qu'il m'a raconté pour que je ne fouille pas trop et ne pas avoir à m'en dire plus ?

Logan m'embrasse rapidement avant de sortir de la maison et dès que mon regard croise celui de sa soeur, un sourire s'accroche sur mon visage. Ma mère m'a bien élevé et malgré tout, la venue de Romie semble faire plaisir à tout le monde, alors ce n'est pas le moment de faire de vague. J'aurais tout le loisir d'en parler ce soir avec Logan. Et puis, ce n'est pas de sa faute à elle s'il m'a caché ce genre de choses.

— Ils sont en train de dormir, c'est l'heure de la sieste.

Je réponds en réalisant qu'elle est même au courant pour nos enfants.

— Mais on peut monter si tu veux, c'est pas tous les jours qu'on rencontre sa tante.

— Ah merde ! Mais non, non, t’inquiète pas, je vais attendre leur réveil !

Je souris avant d’aller dans la cuisine pour fouiller et sortir un verre. Je crève de soif.

— Ils ont quel âge ? Elle est là Olivia ?

Quand je la vois fouiller dans la cuisine comme si elle était chez elle, j'en viens à me demander si c'est elle qui agit bizarrement, ou si c'est moi qui suis trop à cheval sur les règles. Est-ce que ça me choquerait si c'était Gabou ? Je ne sais pas. Et en même temps, il est déjà venu chez moi plus d'une fois.

— Ils ont presque un an. Et Livie cinq ! Elle dort aussi, ils sont épuisés.

Je lui souris, alors qu'elle semble avoir trouvé ce qu'elle désirait.

— Tu veux manger quelque chose avec ?

J'ai envie que Lexie vienne me sauver, ou Logan, ou même qu'un des enfants se mettent à hurler. Je n'ai pas la moindre idée de quoi dire.

— Nan t’inquiète pas, je vais demander à Logan quand il va rentrer.

Et il arrive vite, d’ailleurs.

— T’es venu d’où comme ça ? Franchement, tu sais combien j’ai payé ?
— Mais c’est pas de ma faute !

Je vais tout de suite lui faire un câlin pour l’empêcher de se fâcher.

— Tu peux me faire un sandwich ? J’ai pas mangé depuis hier. J’ai pas d’argent et ces connasses de surveillance m’ont volé ma montre et quasiment toutes mes affaires.

Il soupire mais dépose un baiser sur mon front.

— Va t’asseoir.
— Je vais aller dans le jardin, un peu. J’suis devenue claustrophobe avec ces conneries.

Je prends mon verre d’eau et j’ouvre la baie vitrée pour sortir.

Est-ce que je suis jaloux parce que mon mari vient d'embrasser sa sœur sur le front exactement de la même manière dont il le fait avec moi ? Non, absolument pas. Jaloux de quoi ?

— On va retrouver Romie ! Vous nous rejoignez dehors les pédés !
— Pardon ?

Je rétorque à la façon dont nous as appelé Charlie, mais il s'en fout et ils passent par la baie vitrée sans même se retourner.

— Je vais chercher le babyphone là-haut, c'est mieux qu'on l'ai avec nous si on finit tous dehors !

Ma timidité excessive reprends le dessus et je suis gêné à la simple idée de devoir les rejoindre à l'extérieur.

— Il est là, le babyphone. Tu l’as descendu tout à l’heure...

Même si les enfants sont plus grands, c’est un réflexe qu’on a gardé.

— Sauf si tu veux faire un gâteau, un repas pour ce soir et entamer la douche des enfants quand ils seront réveillés ?

Je soupire un peu parce que je le connais par cœur.

— Je savais pas qu’elle allait venir, sinon je t’en aurais parlé. Si ça te gêne, je peux lui dire de partir. Je la verrais plus tard, elle sera pas offusquée. Mais n’agis pas comme si t’étais pas le bienvenu dans ta maison, tu ne faisais plus ça depuis des mois. C’est juste ma sœur et elle me fait beaucoup penser à Gabriel. Tu devrais t’en sortir.

Je soupire, parce qu'il me tends une perche que je me sens obligé de saisir. Je sens bien que je l'agace et je ne comprends pas pourquoi c'est sur moi que ça devrais retomber.

— J'ai aucun problème avec le fait que ta sœur soit là, Logan. J'ai vu ton visage quand t'as compris que c'était elle et je sais à quel point ça te fait plaisir.

J'ai envie de lui demander comment mon propre mari a pu omettre non seulement de me dire que sa sœur connaissait nos meilleurs potes, mais aussi qu'il avait un contact régulier avec elle, alors qu'à moi il me dit qu'il ne parle plus à personne. Et le fait qu'elle sorte de prison, aussi. Mais non, parce que c'est pas moi le plus important aujourd'hui. J'ai appris a être moins égoïste grâce aux enfants, autant que ça continue.

— Mais vous vous connaissez tous, vous devez avoir énormément de choses à vous dire et inévitablement, j'ai du mal à me sentir à ma place. Justement, tu me connais, et tu sais que j'en fais pas exprès. Je vais venir avec vous, je vais essayer de passer au dessus de ça et je vais faire en sorte de passer un aussi bon moment que vous.

Je soupire. Donc parce qu’on se connaît, il n’a pas envie de s’intégrer.

— Tu crois que j’ai vécu quoi dans les repas du dimanche avec ta famille au début ? Et puis tu connais Charlie et Lexie, ma sœur, elle les connaît comme ça. C’est juste qu’ils sont contents parce qu’elle...

J’affiChe un air embêté.

— J’aurais aimé parler de ça avant qu’elle n’arrive, elle aurait pu prévenir, elle est chiante. C’est juste qu’elle sort de maison de redressement. C’est bien plus comme une prison, d’ailleurs. Mais voilà... donc même s’il la connaisse pas beaucoup, c’est qu’elle sort. C’est tout.

— L'enfer. T'as dû vivre l'enfer...

Je l'avoue sans mal. Parce que ma famille était encore sous le choc de ma rupture brutale, parce qu'il a quinze ans de plus que moi, et en plus, parce que Gabriel est chiant.

— On parlera ce soir de ce qu'il en est, de ce que j'aurais aimé savoir avant, et de tout le reste, d'accord ? C'est pas le moment. Tu l'as pas vue depuis une éternité, alors profites-en.

Je viens me glisser dans son dos un instant, alors qu'il termine le sandwich de Romie.

— J'ai grandi grâce à toi et aux enfants. J'ai plus envie d'être celui dont t'as honte, comme ça a pu arriver avec Moïra au début. Je te promets de faire en sorte de m'intégrer. J'ai clairement pas envie que ta sœur me prenne pour un bouffon. La famille ça compte beaucoup trop pour cela.

J'embrasse sa joue et j'inspire un grand coup. Ça va bien se passer.

— J’ai pas honte de toi, ça n’arrivera pas. Dis-toi que c’est une gamine de 18 ans un peu paumée et surexcitée. Ça va le faire. Au moins, t’auras jamais la pression de rencontrer mes parents.

Quand je referme le sandwich, je me tourne vers lui pour embrasser ses lèvres.

— Je t’aime.