Help me leave behind some reasons to be missed.

3h du matin, le portable de Gabriel sonne. C'est Tristan un gars du lycée. Il ne lui laisse même pas le temps de parler.

— Mec, il faut que tu viennes, on est dans la forêt, Austin est là, il est bourré et il veut prendre sa voiture.

Pour une fois, je dormais. Je me suis couché tôt parce que je stresse pour tout et rien et que ça continue d’aller mal. Je n’ai pas revu Austin depuis sa compétition. Pas un message de sa part, rien. Je lui ai dit que je partais et il s’en fout. Alors je dors pour oublier parce que je n’ai même pas envie de boire ou de baiser. C’est mon portable qui me réveille. Je réponds à l’aveuglette.

— Austin boit pas, ta blague est nulle.

Mais le silence qui suit m’inquiète. Putain, il ment pas.

— J’arrive. Empêchez-le de conduire.

Je le lève d’un bond ; j’ai jamais pédaler aussi vite de toute ma vie et avec ce froid, c’zst Insupportable. Mais j’arrive un bon quart d’heure plus tard. Je balance mon vélo dans un coin, à bout de souffle.

— Il est où ?

Tristan c’est le premier que j’aperçois.

Je suis avec un groupe de mecs, j'en connais même pas la moitié. Je reprends une bière, je la décapsule et boit une gorgée quand je vois Gabriel.

— Heyyyyyyyy !

Je titube jusqu'à lui en souriant en passant un bras autour de ses épaules.

Il est complètement pété, je n’ai jamais vu ça. Ça me retourne les tripes d’ailleurs parce qu’il va tellement le regretter demain que je n’ai pas hâte d’y être.

— Allez, viens. On rentre.

Je ne perds même pas de temps en négociations ; il veut garder sa bière, pas de problème. Il veut s’accrocher à moi comme un koala, pas de problème. Tant qu’il me suit.

— Où sont tes clés ?

Je le suis ou plutôt il me soutient et me traine jusqu'à la voiture, sauf qu'arriver devant je me détache de lui.

— J'veux pas rentrer.

— Ok, on rentre pas. Mais tu peux monter dans la voiture s’il te plaît ?

— Pourquoi ?

Je râle.

— On s'amuse bien ici, allezzzz.

Je tire un peu sur son t-shirt.

— Reste. Il y a de l'alcool.

— Y a de l’alcool ouais. Tu t’entends ou pas ?

J’attrape doucement son visage entre mes doigts pour l’obliger à me regarder.

— De l’alcool Austin. Tu comprends ? Alors monte en voiture, ok ? Personne ne va rester ici, en plus il fait -4 degré ! Puis tu les connais même pas !
— LES GARS Y A GABI ! Ramène-toi allez !!

Je les ignore.

— Monte, s’il te plaît. Le toi de demain matin n’a pas envie de rester.

Il prend mon visage entre ses doigts, et ça me perturbe d'une façon agréable. Moi aussi j'ignore les gars qui gueulent.

— Mais le moi de c'soir se sent bien, j'veux pas rentrer. J'veux boire encore. J'veux m'amuser comme tout le monde, pour une fois.

Je le supplie du regard alors que les gars nous rejoignent.

J'hésite un long, très long moment et j'attire son menton jusqu'à moi pour déposer un baiser sur son front.

— Ok. Mais pas trop longtemps alors.

Je ne sais pas pourquoi je fais ça, mais sur le coup, ça me semblait vraiment naturel. Sauf que là, j'ai l'impression que j'aurais pas dû. Alors bon, je lâche son menton et j'essaie de noyer le poisson comme je peux en demandant une bière qu'on me balance presque instantanément.

Quand il embrasse mon front et qu'il accepte de rester, je souris en grand. Je ne sais même comment c'est arrivé mais on est plusieurs à danser et cette fois j'ai une bouteille de vodka dans la main. Tout tourne autour de moi, je rejoins Gabriel qui est assis sur un morceau de bois et j'attrape sa main.

— Viens danser !

Je ne bois pas beaucoup parce que j'ai peur pour Austin ; il boit beaucoup, c'est la première fois et ça m'inquiète. Je suis bien, mais j'ai quand même les idées claires. Plusieurs fois, je lui ai demandé à rentrer et, plusieurs fois, il m'a dit encore un peu. Je suis incapable de lui dire non et ça me rend malade aujourd'hui. Je suis en train de me demander si je ne dois pas appeler mon frère, quand Austin s'approche et prends ma main pour m'entraîner avec lui.

— Austin...

Je râle, alors qu'il s'affale contre moi. Il ne tient plus debout. Là, c'est clair, il est hors de question qu'on rentre chez moi.

— On va aller à l'hôtel, ok ?

Il veut pas venir et je m'étale contre lui, une fois assis je réalise que tout tourne vraiment trop. Je bois encore une gorgée de vodka pourtant.

— Je connais hôtel.

— Ouais, c'est bien. Moi aussi, je connais hôtel.

J'essaie de ne pas rire parce que la situation est grave, mais, en même temps, je ne l'ai jamais vu comme ça et c'est drôle.

— Allez, pose ça. Tu vas bientôt trouver de nouvelles meilleures amies.

Parce qu'après les bouteilles, ce sera les toilettes.

— Grimpe sur mon dos, ok ?

J'explose de rire et je m'affale contre son dos alors qu'il est encore assis.

— Je connais hôtel pour de vrai, on y va des fois avec Darcy.

Quand il m'avoue ça, je me prends une claque. Ça me brise le coeur parce que ça ne devrait pas arriver. Mais pas la peine d'en parler maintenant, il n'est pas en état.

— Moi aussi j'le connais. J'y vais pour baiser avec des mecs plus âgés. Tu t'accroches ?

J'attends qu'il passe correctement ses bras autour de mon cou pour me redresser. C'est pas facile parce que je mets du temps à trouver mon équilibre, mais j'y arrive.

— Quand tu peux pas dormir chez toi, tu viens chez moi. Même si c'est tous les jours de l'année.

Je lui dis quand même, c'est plus fort que moi.

Je m'agrippe à lui et quand il se redresse, tout tourne c'est affreux. Il me parle de mecs avec qui il baise et je veux pas entendre. C'est facile de pas entendre ce soir.

— J'ai pas envie d'toujours passer pour un cas social.

— C'pas toi le cas social, c'est ta mère.

Je lui rappelle. On se casse en direction de sa voiture sans dire au revoir à personne – de toute façon, ils sont trop occupés à faire de la merde pour le remarquer.

— Vous avez une chambre chacun. Tu sais très bien que tu pourrais t'installer définitivement chez moi.

— Pas maintenant steplait.

Je ferme les yeux, en espérant que tout arrête de tourner parce que je commence à me sentir mal.

Même bourré, il m'envoie chier là-dessus et je comprends que finalement, il préfère certainement vivre dans la merde que fout sa mère. Y a des gens comme ça, tu leur trouves toutes les solutions du monde et ils s'en foutent. À croire qu'ils se complaisent dans leurs problèmes.

On arrive à la voiture et, quand je le dépose sur le sol, je vois qu'il ferme les yeux, il est complètement pâle.

— Ouvre les yeux. C'est pire quand on les ferme. Viens..

Je l'aide à s'asseoir et je l'attache après avoir ouvert la fenêtre.

— L'air frais va te faire du bien, si jamais t'as envie de vomir, tu me le dis et je m'arrête, ok ?

Il me pose au sol et tout tourne, je sais même pas comment je tiens debout. Il m'installe carrément et je me laisse faire. D'habitude c'est moi qui fais ça, les rôles sont inversés. Il démarre et je me concentre sur l'air frais pour pas vomir, j'ai des nausées.

— Jamais utilisé l'autre chambre.

— Hein ?

Je roule vite parce que je veux vite arriver – puis ici, y a jamais personne, surtout pas à cette heure-là.

— La chambre chez moi, tu veux dire ?

Je hoche la tête.

— J'ai jamais dormi seul.

J'aime pas parler des choses comme ça, mais je le réalise pas et parler m'empêche de vomir.

Je fronce les sourcils.

— Non ?

Puis, quand j'y pense, je crois que ça ne m'étonne pas.

— Ça te fait peur ?

Je hoche la tête. Je ferme les yeux parce que ça va vraiment pas.