De deux à trois - Luke & Max

On a essayé en vain de trouver une semaine pour pouvoir partir à Paris tous les trois avec Axel et Max, mais c’était jamais le bon moment. En fin de compte, ils sont partis passer la semaine tous les deux chez les parents de Max et même si Tristan a tout fait pour que je ne sois jamais vraiment seul, ils m’ont énormément manqués. C’est la première fois qu’on s’est retrouvé séparé comme ça, mais je n’ai vraiment pas pu faire autrement à cause du boulot. Je voulais les rejoindre vendredi, mais je n’ai même pas réussi à me libérer et je pars seulement passer le week-end avec eux avant qu’on ne rentre.

Je sais que Max est déçu, mais j’espère qu’il ne m’en veux pas trop. Et si c’est le cas, j’espère que je saurais me faire pardonner. Je suis loin d’être bilingue comme Romie, mais à force d’entendre Max parler français à Axel je m’y suis mis et j’arrive à me débrouiller.

Une fois que le taxi me dépose près de chez les Weaver, je passe chez un fleuriste. Ça peut paraître cliché, mais on est dans la ville de l’amour et à la sortie de l’avion, j’ai pas trop d’autres choix. Quand je sonne à la porte, j’espère juste tomber sur Max directement et pas sur sa mère ou son père.

J’ai toujours eu beaucoup de reproches sur mon travail, du fait que je travaillais trop, que j’étais incapable de prendre de pause ou de souffler un peu. C’est pour ça que j’ai toujours compris Luke : je sais que c’est compliqué de tout lâcher quand on est impliqué mais j’ai su lever le pied, contrairement à lui.

C’est la première fois que j’accepte d’écouter mon frère et que je décide de partir en France pour les vacances scolaires et je pensais sincèrement que Luke se joindrait à nous mais pas du tout. Je sais qu’il n’a même pas essayé, il m’a juste dit qu’il ne pouvait pas. Ça m’a rendu triste. Pour Axel, pour moi.

On est alors quand même parti mais j’ai passé une semaine vraiment difficile. Axel est désorienté de ne plus avoir ses repères et si on passe des journées géniales, quand vient le soir, c’est un cauchemar.

Mes parents sont très inquiets et ils ont vraiment hésité à me laisser seul car ils partaient en week-end chez des amis mais je leur ai assuré que ça allait bien se passer.

On appelait Luke tous les jours et... je reconnais que je pensais qu’il viendrait jeudi ou vendredi et il n’est pas venu hier. Et c’est la pire nuit que j’ai passé de toute la semaine. Heureusement que mes parents étaient déjà partis.

Axel a hurlé plusieurs fois dans la nuit, même en dormant avec moi. Et j’ai découvert qu’il pouvait être somnambule : je me suis assoupi et en me réveillant en sursaut à 4 heures du matin, il n’était plus là. J’ai retourné l’appartement pendant presque une heure avant de le trouver dans le panier à linge en train de dormir.

Après ça, j’ai pleuré un long moment et je me suis rendormi dans le canapé.

Je suis réveillé en sursaut par la sonnette de l’appartement. Merde ! Il est dix heures ! J’ai du mal à émerger. Axel s’est allumé la télé et il a su trouver les gâteaux. Il ne m’a pas réveillé et j’ai vraiment honte d’être aussi nul. Je sais que si Luke avait été là, Axel aurait dormi au milieu de nous et ce serait senti en sécurité et il n’aurait pas fait toute ces terreurs nocturnes. Mais l’important, c’est qu’il ne se souvienne de rien : pour lui, ce sont de superbes vacances.

Ça resonne.

— Papa tu vas pas regarder qui est là ?
— Si, si mon cœur. J’ARRIVE !

J’annonce en me levant.

— T’aurais du me réveiller mon chéri.
— C’est les vacances ! Il faut faire des grasses mat. C’est toi qui as dit ça.
— Oui, ok... j’irai te faire un lait chaud après ça.

Je lui fais un énorme bisou et je vais ouvrir.

— Désolé j’ai...

Je réalise que c’est Luke et j’ai presque envie de fondre en larmes mais je me retiens ; je suis simplement très très fatigué.

— Axel ! Viens voir qui est là ?!

Il déboule en courant avant de se jeter dans les jambes de son père.

— Waaa t’as des belles fleurs !! C’est pour moi ?

Il s’agrippe à sa jambe comme un koala et ça me fait sourire.

Après le deuxième coup de sonnette, je peux entendre Max me crier qu’il arrive. Je m’apprête à en rire quand il ouvre la porte, mais sa tête me coupe toute envie de le faire. Il a des cernes qui descendent jusqu’aux joues et il ne prends même pas la peine de me dire bonjour, il se contente d’appeler Axel aussitôt.

J’aurais aimé avoir le temps de lui demander comment ça va, même si je pense déjà connaître la réponse, mais Axel me saute dessus et s’accroche à moi. Il a l’air d’aller à merveille, alors j’en conclus que ce sont les nuits qui ont été un calvaire pour Max.

— Hey salut toi ! Tu m’as manqué !

Je souris en faisait un énorme bisou à Axel.

— Désolé mon chéri, elles sont pas pour toi. Elles sont pour papa.

Je réponds en relevant les yeux vers Max. Même à travers son sourire on peut voir qu’il est au bout du rouleau.

— La chance ! Faut lui donner !!!

C’est évident pour lui et ça me fait sourire. Moi elles étaient là pour me faire pardonner et maintenant que je suis là, j’ai l’impression qu’il aurait fallu au moins dix bouquets pour espérer compenser mon absence.

Je prends les fleurs avec un grand sourire.

— Merci chéri. Je t’ai même pas dit bonjour, excuse-moi.

Je prends le bouquet et je lui donne un vrai baiser. J’attrape son bras pour l’entrainer à l’intérieur.

— Viens. T’es là tôt ! T’as pris un Eurostar aux aurores !

Pendant de courtes secondes, je le garde contre moi puis j’embrasse sa joue avant de le suivre.

— J’ai pris le premier qui partait de Londres ce matin ! Au moins je peux profiter de la journée avec vous deux !

Et si j’avais pu imaginer l’état de Max, je me serais plus battu pour venir dès hier.

— Tes parents dorment encore ? Je les aient pas réveillée en sonnant j’espère.

— Non, ils sont partis hier soir parce qu’ils passent le week-end chez des amis. Un anniversaire, je crois...

Je dis avec un sourire.

— On est que tous les trois. On allait prendre le petit déjeuner mais.. comme t’es là, peut-être qu’on peut aller le prendre dans une boulangerie ? Y en a une pas loin.
— Mais oui !! Papa dit oui !

— Oui ! Je dis oui !!

Je rigole en voyant Axel heureux comme tout. Il part comme une fusée, certainement mettre ses chaussures sans réfléchir.

— C’est à prendre sur place ou on revient là ? Je peux aller le chercher sinon, je me débrouille de mieux en mieux. Je peux commander des croissants !

J’essaie de dire le mot en français comme il me l’a apprit, mais c’est toujours compliqué.

— Sur place. Y a un petit salon, Axel adore y aller.

Je souris et je vais me blottir contre lui.

— Bien sûr que tu te débrouilles bien, parce que t’as même pas réaliser qu’Axel t’avait parlé français.

Depuis qu’on est là et que tout le monde parle français, il a fait le timide cinq minutes mais il a parlé constamment français avec ses grands-parents.

— Tu verrais comme il sait commander son propre pain au chocolat. Tu veux te reposer un peu, avant ? Te changer ou...? Enfin, tu viens d’arriver et on te saute un peu dessus. Mais tu nous as manqué.

J’embrasse ses lèvres.

— Merci pour les fleurs.

— Sérieux ? J’ai même pas réalisé non ! Faut que je le félicite pour ça !

Je réponds en serrant Max dans mes bras.

— Moi ça va, j’ai pu dormir un peu dans l’eurostar et j’ai pris une douche avant de partir tôt ce matin. Mais toi t’as vraiment l’air fatigué... Je suis désolé de pas être venu plus tôt. De pas avoir été là. On en parlera plus tard, ok ? Quand on sera tous les deux.

On ne parle pas de ça devant Axel et jamais on ne le fera. C’est un problème d’adulte, c’est à nous d’être là pour lui et pas l’inverse. Il n’a pas du tout à entendre ces conversation là. Du coin de l’œil je peux voir que lui il va bien, il doit pas se rappeler qu’il a passé de mauvaises nuits. Comme d’habitude. Mais je le vois sur le visage de son père.

— Vous m’avez manqué aussi. Une semaine c’est vraiment très long.

Je murmure en l’embrassant encore un peu. On n’est jamais séparé en fin de compte, jamais plus que mes heures de travail. Et sans eux la vie n’a pas du tout la même saveur.

— J’aurais bien pris tes chocolats préférés avec, mais je connais pas encore assez bien le coin et je me serais sûrement perdu. Câlins illimités tous le week-end c’est bien aussi ?

— Je comptais pas te le cacher.

Je réponds honnêtement ; ça m’a beaucoup inquiété et je pense qu’il faut qu’on ait notre propre chez nous ici parce qu’Axel a du mal à trouver sa place et que ça le perturbe beaucoup.

— Ça me va. Et je t’aime.

Axel revient dans le salon, tout habillé. Le pull à l’envers, mais habillé.

— Je suis prêt !

Ça y est, il parle anglais parce qu’il nous a entendu parler anglais. Même lui ne doit pas s’en rendre compte.

— Bon bah... je vais m’habiller, c’est mieux. Et puis on pourra y aller. Tu veux montrer à papa la peinture que t’as fait avec mamie ?
— Ah oui !! Viens voir !

— J’arrive Chéri !

Jnattrape sa main, mais j’embrasse Max avant qu’il file.

— Prends ton temps, on n’est pas non plus à la minute prêt.
— Allez papa !

Axel finit dans mes bras et bien vite, on se retrouve assis dans le canapé tous les deux. Il me montre sa peinture, qui est magnifique, et avec le français le plus approximatif du monde je le félicite de le parler aussi bien ! Ses yeux brillent de fierté.

— C’est papa qui m’a tout appris ! Mamie elle m’a aidé aussi. On parle que du français ici !
— Il est fort ce papa ! Moi aussi il m’a tout appris.

En quelques mois, il a réussi à mettre Axel dans le bain et à me faire plonger avec eux. C’était pas un pari facile mais il l’a remporté haut la main.

— C’était long sans toi ! C’était bien ton travail ?

Il me demande en venant se glisser dans mes bras et je lui fais un énorme câlin.

— C’était bien, mais vous m’avez beaucoup trop manqué papa et toi ! La prochaine fois, je viendrais avec vous pour toute la semaine !
— Trop chouette !!!

Je décide quand même de prendre une douche rapide parce que mon mari est là, j’ai pas envie de l’accueillir comme un dégueulasse. J’aimerais bien continuer de lui plaire jusqu’à la fin de mes jours.

J’en ai pour une dizaine de minutes avant de les rejoindre. Je suis un peu plus réveillé et, eux, ils regardent les dessins animés.

— Ça y est, je suis prêt.
— J’ai hyper faim !
— Nan, pas hyper !
— Très très faim.

Je vais lui faire un bisou avant de l’aider à enfiler son manteau. Je sais que c’est un peu vieux jeu et que c’est certainement mon éducation qui veut ça mais... j’aime bien qu’Axel parle correctement et qu’il ait un joli vocabulaire. Alors les hyper et les giga cool, je préfère qu’il les garde pour ses cousins, loin de mes oreilles de papa.

— On y va ?

Je souris tendrement devant leur échange. C’est pas forcément quelque chose qui me chagrinerait si Axel parlait comme ça tout le temps - j’ai pour ainsi dire élever Tristan et y’a qu’à voir - mais je comprends que ça tienne à coeur à Max. Du coup je le suis, je reprends Axel aussi quand il le faut et surtout, je fais attention à ne pas employer ces mots là devant lui.

— Je suis prêt aussi !

Je souris en attrapant mon écharpe sur le bout du canapé et en la passant autour du cou de Max.

— Il fait un peu froid dehors, tu seras mieux avec ça.

Vu son état de fatigue, il pourrait vite tomber malade et j’ai pas envie que ça lui arrive.

— Alors les rois de Paris ! Où est-ce qu’on va ? On suis le guide ?

Je demande à Axel en souriant.

— Merci.

Y a son odeur partout, ça me fait sourire. Je suis vraiment content qu’il soit arrivé.

— Ah oui ! Je suis le guide ! Mais j’ai un peu mal aux jambes.....

Je pouffe de rire ; qu’est-ce qu’Axel ne ferait pas pour être dans les bras de son père. C’est fou ces deux-là.

— Ah mince alors ! Tu crois qu’il faudrait faire quoi pour que t’ai plus mal ? Je te fais un massage des pieds en rentrant ?
— Mais non papa ! J’ai mal tout de suite !

Sa réaction me fait pouffer à mon tour et je l’attrape sans ménagement pour le mettre contre ma hanche.

— Est-ce que notre guide est bien installé ?
— C’est bon ! Maintenant faut aller à gauche !
— A gauche dans le mur ?

Je demande en tournant aussitôt.

— Mais non tout au fond ! Papa dit lui !

Il demande à Max en rigolant.

Je rigole en me blottissant contre Luke.

— C’est à gauche, une fois qu’on est dans la rue.
— Voilà ! C’est pour ça ! C’est une fois dans la rue papa d’amour. Et après la gauche... c’est tout droit et on est arrivés. C’est tout à côté.

— Pardon ! Toi t’as un peu mal aux pieds et moi j’ai un peu mal au cerveau je crois !
— C’est à cause de ton travail papa. Faut se reposer un peu !

Il est loin d’avoir tort et c’est pas faute de pas l’avoir entendu de la part de Max. C’est pas du tout dit de manière insolente, c’est jusque que notre fils aussi a conscience que je n’étais pas avec eux à cause de ça.

— Je me reposerais quand on rentrera à la maison. Pour l’instant je m’occupe des deux personnes que j’aime le plus de tout l’univers !

Je ressers mon bras autour de la taille de Max à ces mots.

— Vous avez une idée de ce qu’on peut faire cet après-midi ? Vous aviez déjà prévu quelque chose ?

— On avait prévu d’aller à la patinoire. Y en a une au Grand Palais en ce moment et je voulais vraiment y aller avec Axel pour qu’il voit ça.

Et là, j’ai encore plus envie d’y aller en famille.

— Ah mais on a un gros problème là du coup...

Je soupire en haussant fortement les épaules, sans manquer de faire un clin d’œil discret à Max.

— Comment Axel il va faire du patin s’il a mal aux pieds ? Tu vas nous regarder faire avec papa ?

Je vois de la malice dans son regard et ça enflamme mon coeur. C’est un enfant très sage, très poli et absolument adorable. Mais s’il a apprit quelque chose avec Tommy, c’est à savoir jouer de son charme et j’adore voir cet éclat de joie dans ses yeux.

— On va aller prendre le petit déjeuner, je vais retrouver des forces !!

— Évidemment. Le super pouvoir du pain au chocolat !
— Évidemment !

Il répète avec sa bouille de coquin. Faut que je raconte ça à Edouard, il va fondre.

— On y va ce matin comme ça y a pas trop de monde, on rentre manger, on faire une belle sieste et on va se promener au parc. Et puis peut-être même qu’on pourra aller dîner à la crêperie parce que papa adore ça !
— Cette journée c’est fantastique !

Je n’aurais pas mieux dit moi-même.

Cette journée est fantastique. On n’aurait pas pu trouver meilleur mot. Ça nous a fait beaucoup de bien de profiter en famille et j’ai été émerveillé de tous les côtés de Paris que je n’avais pas encore vu. Chaque fois Max m’en fait découvrir davantage et j’adore.

Quand on rentre de la crêperie, parce que bien entendu qu’on a finit par y aller, Axel est ko, Max est ko et je ne suis pas loin de les suivre. Mais on a des souvenirs plein la tête et ça vaux tout.

— Je peux regarder un petit peu la télé ?
— Tu files te mettre en pyjama et après si tu nous fais un énorme calin, peut-être bien que ce sera un oui !
— D’accord !

L’espoir est allumé et il part très vite pour se préparer.

— J’ai eu raison, non ? Ça va le calmer un petit peu avant d’aller au lit et si on se mets devant avec lui, ça va nous reposer aussi.

Je demande en entourant la taille de Max pour le rapprocher de moi.

— J’aimerais bien qu’il s’endorme dans le canapé.

Je reconnais.

— Je préfère qu’on puisse parler quand on est au salon plutôt qu’au lit. Je—
— PAPA C’EST LA NUIT C’EST LA NUIT !

Je plante Luke pour aller dans la chambre et lui allumer la lumière.

— J’arrive pas à allumer, je suis trop petit !
— Les interrupteurs sont hauts ici, c’est vrai. Tu as besoin d’aide ?
— Non, ça va. Mais j’ai un peu peur.
— Tu te souviens ce que tonton Edouard t’a dit ? Si t’as peur quand t’es tout seul, tu peux chanter. Mais je peux rester si tu préfères.
— Non, je vais chanter. Et si j’ai peur, je t’appelle.

Je lui fais un énorme câlin et je le laisse tout seul. Il chante une comptine de l’école. Dès qu’il fait nuit, il n’est plus du tout rassuré et depuis quelques jours, c’est pire.

— Il atteint pas l’interrupteur de la chambre. Ni aucun de l’appartement d’ailleurs.

Le cri d’Axel me comprime l’estomac, mais Max réagit beaucoup plus vite que moi et part en courant. Je le suis et finalement en les entendant avec Axel, je reste dans le couloir pour ne pas couper ce moment. Il a le courage de vouloir rester tout seul avec une chanson, j’ai pas envie de l’en empêcher.

Max sort et je retourne directement dans le salon avec lui pour qu’on puisse discuter.

— Il a du avoir peur la nuit s’il se réveillait et qu’il pouvait pas allumer la lumière. Il a dormi avec toi tout le temps ?

Je demande en attrapant sa main pour l’attirer sur les genoux.

— C’est pour ça que tu préfères qu’on en parle ici et qu’il s’endorme sur le canapé ?

— Je préfère qu’on en parle ici parce que quand on va se coucher c’est derrière nous. C’était une semaine horrible. Même en dormant avec moi c’était la catastrophe.

Je réponds honnêtement. J’ai déjà la gorge qui se serre.

— On en parle quand il dort, s’il te plaît ?

— Oui on attends qu’il dorme, t’en fais pas.

Sa voix se brise déjà un peu, alors je l’amène contre moi et je caresse son dos avec tendresse.

— T’es plus tout seul, tu vas pouvoir lâcher prise bientôt mon amour.

Je murmure à son oreille.