Bad news. — Charlie et Alexis

Je la vois se lever, motivée comme si elle allait au bagne.

— Tu préfères qu'on se fasse livrer japonais ici ? Comme ça on peut rester ici et on n'a pas à se presser !

— J’ai pas très faim finalement..

Je dis en me penchant pour collecter mes vêtements, sans trop oser le regarder.

Je soupire en fermant les yeux quelques secondes. J'ai envie d'attraper mes clés, de trouver sa mère et de lui rouler dessus jusqu'à ce qu'elle ne puisse plus se relever.

— Et si je fais des sushis moi-même ? Tu refuses de les goûter ?

On trouve les techniques qu'on peut, en feintant. Parce que si elle ne mange pas ce soir, ça irais encore, mais je la connais et il est hors de question qu'elle reparte en vrille à cause d'une vieille peau.

Je hausse les épaules.

— Bah.. juste un alors. Ou deux. Mais on n’a pas de saumon au frigo.

Je balance mes fringues dans le bac à linges sale et je continue de ranger, la tête baissée vers le sol. J’ai pas envie de parler de nourriture aujourd’hui.

— Mais j’ai juste pas faim, tu sais. Ça m’a contrarié, c’est tout. Ça va.

Je me relève, enfile enfin un boxer que je trouve dans le panier de linge propre et vient entourer sa taille de mes bras.

— T'as des journées épuisantes mon Bébé, c'est juste histoire que tu ai un truc dans le sang et que tu te lèves pas demain matin avec la tête qui tourne. T'es infirmière, tu sais mieux que moi à quel point c'est chiant !

Pendant un long moment je ne réponds pas ; je ne veux surtout pas qu’il s’inquiète parce que je vais bien. Tout va bien. Alors je prends sur moi.

— Commande pour toi et je picorerai dedans. Promis.

C’est dur d’accepter qu’il me serre dans ses bras aujourd’hui, j’ai l’impression d’être énorme. Mais je sais aussi que je ne dois pas le repousser pour ne pas l’inquiéter. Tous les jours, je dois le laisser faire pour qu’il ne se rende pas compte de mes variations de poids.

Quand je réalise que mes vieux mécanismes se mettent en place malgré moi, je prends un peu peur. Mais ça va aller. Je suis simplement contrariée.

— T’avais encore du travail ?

Elle réponds à peine, mais plutôt que de la braquer, j'essaie de me convaincre que tant que ce n'est que ce soit, ce n'est pas grave.

— Non, j'arrête pour aujourd'hui. J'en peux plus et j'y ai passé des heures. Je reprendrais plus tard.

J'embrasse sa joue, longtemps, avant de la laisser un peu avec elle même. Vaux ça qu'un silence pesant entre nous.

— Je vais commander, comme ça ça n'arrivera pas trop tard et on pourra se mettre un film tôt !

— Hm, hm.

Il quitte la chambre et je termine de ranger tout pour m’occuper l’esprit. Je range, je nettoie, je remets chaque chose à sa place et je trouve une place à chaque chose qui n’en a pas. Je traîne tellement que lorsque l’interphone retentit, je sursaute. Merde.

Je suis sur la pointe des pieds en train d’astiquer un miroir et Charlie doit être en train de faire du vaudou sur ma mère. Ça va passé. J’ai simplement été contrariée. Ça va passer.

Je termine quand même de nettoyer le miroir avant de le rejoindre dans le salon. Il a tout installé sur la table basse et j’arrive avec une petite moue mignonne.

— C’était rapide...

Je tente, on sait jamais.

—Aussi rapide qu'une tortue qui aurait traversé la pièce en prenant son temps, oui.

Moi je crève la dalle, mais pour ce soir j'accepte que ce ne soit pas son cas. Je n'ai pense qu'à sa mère depuis tout à l'heure et même si j'ai envie de la brûler vive, je comprends que ça peine Alexis et que ça puisse couper l'appétit.

Je tends mon bras pour qu'elle vienne s'assoir près de moi et ma main vient caresser ses cheveux une fois qu'elle est là.

— Petit film ? Je te laisse choisir ce que tu veux. Tant que c'est pas un truc tout pété non plus !

Je vais me blottir contre lui et je passe un bras autour de sa taille pour lui faire un câlin. J’ai peur qu’il en ait assez de me supporter, alors j’en profite tant que je peux.

— On peut mettre un film d’horreur. J’accepte. Mais pas un truc gore.

— Un truc avec des poupées ? Comme ça, pas de souci de trucs qui saignent ou qui font trop peur !

Alexis hoche la tête, elle semble me faire confiance quant au choix, alors j'allume Netflix pour lancer tout ça.

— J'ai pris un menu avec de tout, parce que je mangerais pour dix si je pouvais, pioche dans ce que tu veux.

Je dépose un baiser sur son front, en la blotissant un peu plus contre moi.

Je le laisse choisir le film et même manger. C’est seulement après plus d’une demi-heure que je me décide à attraper un sushi, puis deux. Mais pas plus parce que j’ai peur et que prendre à manger m’oblige à m’éloigner trop de Charlie.

— J’vais mal dormir là. J’suis en apnée.

Bizarrement, je n'avais même pas besoin qu'elle le précise. Même si j'ai bien compris que la bouffe ne l'attirait pas, là elle ne se détache même pas de moi. Au ça ou une poupée débarque à l'improviste à la maison...

— T'es déjà accroché à moi comme un koala, alors tu pourras passer la nuit comme ça. T'es plus à ça prêt.

Je souris en lui tirant la langue pour la taquiner.

— Je vous protégerais charmante demoiselle.

— Fais pas le BG, je sais que tu ferais pas le fier si on avait des poupées ici.

Je suis complètement affalée sur lui ; il est toujours en boxer et je sens son cœur cogner contre ma joue. J’adore ça et me concentrer sur ce son me fait beaucoup de bien.

— T’as ouvert au livreur dans cette tenue ?

— Oui mais on n'en a pas ! La seule chose qu'on a dans la chambre, c'est ta peluche énorme, et crois-moi que j'aurais jamais mis un film avec des peluches tueuses !

Elle soupire contre mon torse et je la trouve adorable, ainsi blottie contre moi.

— Bah ouais, je suis chez moi je me promène comme je veux. J'ai pas dépassé le palier, y'a pas d'attentat à la pudeur !

Je pouffe de rire.

— Les gens de l’immeuble doivent nous prendre pour des tarés parfois.

Mais ça ne me gêne pas parce qu’on est heureux comme ça.

— Heureusement que c’est ton boxer neuf, s’il avait vu tes boules il aurait peut-être trouvé ça too much.

— On mets un peu de folie dans cet immeuble ! Et les voisins nous aime bien, la petite mamie d'en bas nous inviterait à prendre le thé tous les week-ends si on pouvait.

Alexis comme moi, on va plutôt facilement vers les gens. Nous sommes un phénomènes particuliers de gens sociables, mais qui aiment bien quand même être enfermés chez eux tous les deux.

— S'il avait vu mes boules, il aurait été jaloux. Avec ce boxer là, il ne l'a été que de mon cul !

Je grimace.

— Personne n’est jaloux des boules des autres. C’est la partie la plus disgracieuse de votre corps. C’est juste... des boules.

Je rigole franchement.

— Mais je suis sûre qu’il a été jaloux de ton cul, tes abdos, tes tatouages, ton visage... et... pas de cette couleur blonde là. Faut arrêter les paris avec Logan, hein. Et pas de pari avant le mariage.. Adam sera vraiment pas content que Logan se rase la tête s’il perd. Ok ?

— Pfff, t'y connais rien. Elles sont magnifiques.

Je lève les yeux au ciel en rigolant.

— Mais on sait même pas encore la date ! Et s'ils se marient que l'été prochain, hein ?

Je fais une tête offusqué, mais je sais pertinemment que si je faisais ça alors que le mariage pourrait être bientôt, Adam ferait du vaudou sur moi et mes quinzes prochaines générations.

— Je peux continuer de toucher aux parties qu'on verra pas ? Genre de raser la bite au lieu du crâne ?

Je demande, on sait jamais. Ça aussi, ça pourrait être drôle. Logan lui, il trouverait ça drôle en tout cas.

J’éclate de rire.

— Mais vous avez vraiment des paris complètement nul ! C’est pour ça que t’avais tes poils épilés avec une forme de cœur la dernière fois ?

Je ne demande meme plus quand je vois des trucs bizarres, parfois.

— Vous vous envoyez des photos de vos bites, parfois ? J’suis sûre que vous êtes ce genre de débile. Ou tu lui envoies des photos de moi quand je dors genre avec de la bave ? C’est comme ça que t’as eu la photo d’Adam qui c’était endormi par terre, c’est ça ??

J'explose de rire quand elle parle démesure poils en forme de cœur. Parier avec Logan, c'est une merveille, même quand je perds. Je termine toujours par trouver la situation géniale à un moment où a un autre. Et si je ne me serai pas permis la moitié de ce que je fais si je n'avais pas connu son mec, aujourd'hui qu'il est presque marié à Adam, j'en ai rien à foutre de le mettre mal à l'aise.

— La photo d'Adam endormi par terre, c'était rien. Tu te souviens quand t'as fais ta réaction allergique la dernière fois ? Devine qui a reçu une photo de mon bébé d'amour avec son visage déformée ?

C'est un jeu magistral auquel nous jouons.

— Et tu sauras pas à qui j'envoie des photos de ma bite ! C'est intime comme question !

— Putain mais t’es dégueulasse... j’étais affreuse ! On aurait dit un sumo !

Malgré tout, ça me fait bien rire. Je sais que ces deux-là passent leur temps à s’envoyer des messages stupides, mais j’aime bien qu’ils soient amis. Charlie, il en a plein des amis, mais y en a la moitié qui m’ont déjà dragué ou fait des avances dans son dos et Logan c’est quelqu’un de bien. Quand on a découvert que c’était lui, le mec secret d’Adam, on a été encore plus content de l’apprendre. Charlie est venu le voir souvent à l’hôpital, c’était bizarre de le voir perdu comme ça, sans son pote. Mais bon, aujourd’hui ils vont mieux que jamais apparemment.

— Pourquoi moi je reçois jamais de photo de ta bite d’abord ? C’est à moi que tu dois l’envoyer !

J’ajoute en riant.

— C’est mon intimité à moi !

— C'est le but ! Tu crois quand même pas que ça le ferait rire si je lui envoyais les photos canons que je prends de toi ? Celles là sont trop précieuses, je les garde pour moi !

Je rigole comme un con quand elle poursuit avec son délire sur ma bite. C'est pour ça aussi que je l'aime si fort, ma Alexis, elle est autant explosé que moi.

— Tu préfères la voir en vrai ou en photo ?

Je lui demande, joueur.

— Si tu me réponds en photo, je peux t'assurer que t'es pas prête t'y toucher !

— Bah une ptite photo quand on n’est pas ensemble j’vais pas dire non, hein !

Je dis avec un sourire taquin.

— Mais ouais, c’est mieux en vrai. Je capitule.

Je retourne me blottir contre lui pour tenter de suivre le film. Mais ça fait vraiment peur cette connerie.

— Le jour où tu arriveras à regarder les photos que je t'envoie sans demander d'aider à tes collègues ou sans les supprimer, on verra. Parce que sinon, y'aura pas que Logan et toi qui auront vu ma bite en photo.

Je lui tire la langue pour finaliser le débat, alors qu'elle se réinstalle contre moi. Et comme je vois qu'elle flippe vraiment, je nous allonge tous les deux et je l'entoure de mes bras et de mes jambes. Personne ne peut lui faire de mal.