Sick boy - Adam & Logan

— Peut-être, oui.

Je dis en me redressant pour finalement le regarder. Il a vraiment une sale mine.

— Mais c’est l’image que t’as renvoyé malgré tout, dans un moment où tu ne pouvais être que toi-même puisque t’étais au plus mal.

Je soupire avec lassitude,

— Qu’on se bouffe la gueule pour des conneries, je m’en contre fou, on est comme ça. On se chamaille, on se pique, on se fait mal. On le sait. Mais t’aurais envie d’entendre de ma bouche que j’irais bien parler avec Max de la manière dont je te déteste ? Hein ? Que tu le penses ou pas, les mots ont un impact. Putain t’as envie d’être éditeur bordel de merde ! Tu le sais, non ? Y a des trucs qu’on se dit pas Adam, même pas pour rire. Je voulais simplement prendre soin de toi, à la base. Et t’as pris à partie Olivia pour me rabaisser. Plusieurs fois elle m’a demandé pourquoi je m’occupais pas de toi alors que t’étais malade et que je lui avais dit qu’on allait le faire. Bah j’lui réponds quoi ? Que je suis un menteur et un mauvais mari ? Bah elle le sait déjà figure-toi. Parce que Moïra lui dit exactement la même chose. Et c’est vrai. Alors ne vient pas me dire qu’on est une équipe et une famille si même toi tu me démontes à ses yeux. C’est pas parce que j’ai l’air d’avoir confiance en moi que je peux tout encaisser. Moi aussi, j’ai peur de te perdre et ça t’as pas l’air de le comprendre. T’es pas tout seul dans le couple, t’as tes peurs à toi et certainement qu’elles sont fondées parce que tu m’as connu infidèle, parce que t’es jeune et que t’as peur de pas être à la hauteur, mais moi aussi j’te signale. Moi aussi, je me dis que quand t’auras 30 ans et envie de parcourir le monde et que tu seras au meilleur de ta vie, moi j’en aurais 45 et plus le temps passera, plus je serais proche d’être un poids pour toi. Et peu importe ce que tu penses, moi, aujourd’hui, je ne me vois pas sortir avec un vieux de 50 balais. Alors qu’à ton âge, j’étais comme toi.

J’hésite à poursuivre, mais je me dis que pour une fois qu’il entend vraiment ce que je pense, je ne vais pas m’arrêter.

— Je fais du sport pour continuer de garder la forme, de te plaire, je m’implique dans ta vie, dans la notre. J’essaie de rester à la page de tout ce qui pourrait t’intéresser. C’est constant. J’ai envie de prendre soin de toi, mais si c’est trop, tu me repousses parce que t’es pas un gosse, si c’est pas assez, tu crois que je t’aime moins et tu perds confiance en toi. La plupart du temps, je me dis que ça va, je ne m’en sors pas trop mal. Et j’ai toujours cru que nos disputes émaneraient du fait qu’on s’aime trop, comme jusqu’ici. Alors... ça va passer, c’est pas grave. Mais ça m’a fait mal que cette dispute-ci ce soit passée parce que tu me détestais.

Peu importe que ce mot ait été utilisé juste comme ça, c’est le seul que je retiens.

— Je ne te déteste pas...

J'ai les yeux trempées par les larmes. Je n'ai pas compris à quoi il faisait référence quand il m'a parlé de Max et maintenant que je l'entends dire une seconde fois que je le déteste, ça me prends à la gorge. Je ne me souviens pas exactement du comment et du pourquoi, j'étais trop dans le gaz, mais je me reentends malgré tout lui dire que je le déteste.

— Je ne sais pas pourquoi j'ai dis ça, je m'en rappelle plus, mais ça pouvait pas vouloir dire pour de vrai que je te déteste. Jamais je pourrais penser comme ça à propos de toi ! Jamais !

Ça me semble si évident que ça me comprime l'estomac. Comment il peut y croire et comment moi, surtout, j'ai pu dire une telle chose.


— Je sais pas quoi te dire tellement j'ai honte de moi et de la façon dont j'ai agi. J'ai honte d'avoir agi comme Moïra alors que je t'ai promis que rien ne serait pareil avec moi. Depuis qu'on se connait tu prends soin de moi et même si j'y arrive pas toujours, tout ce que je souhaite c'est te rendre la pareille. J'ai jamais imaginé une seule seconde que tu pouvais avoir peur toi aussi, parce que j'ai toujours du mal à comprendre pourquoi c'est moi qui ai la chance de t'avoir à mes côtés. Et je suis tellement... Putain mais je crève tellement d'amour pour toi que ça semble invraisemblable que tu puisses imaginer que je partirai un jour.

J'ai envie de me jeter contre lui et en même temps, je sais que ce n'est pas le moment pour ça. Pas alors qu'on parle si sérieusement.

— J'expliquerais à Olivia pourquoi vous n'êtes pas resté ce week-end. J'assume ce que j'ai fais et je ne veux pas qu'elle pense du mal de toi par ma faute. T'as rien à te rapprocher et elle doit le savoir.

Je l’écoute et une fois de plus, il ne comprend pas.

— Non, tu n’expliqueras rien à Olivia. Je ne veux pas qu’elle soit impliquée dans nos disputes. Elle a passé un bon week-end malgré tout et elle n’a que quatre ans.

Je soupire.

— Je t’aime Adam, mais là j’aimerais assez que tu retournes te reposer. J’ai besoin d’assimiler ce qu’il s’est passé. C’est pas grave, d’accord. Je vais revenir vers toi. Juste je suis fatigué et je n’ai pas envie qu’on se dispute encore.

Plus les jours passent et plus je me rends compte que je serai tout bonnement incapable de m'occuper d'un enfant. J'agis encore comme le ferait un adolescent et comme vient si bien de me le faire remarquer Logan, je ne suis même pas capable de comprendre quand il est bon ou non d'impliquer un enfant. Mes intentions ne sont pas mauvaises, loin de là, mais à quoi ça peut bien servir si derrière elles ne me mènent pas à faire de bonnes choses ?

— Je suis désolé...

Et j'ai l'impression de ne savoir dire que ça, en boucle. Je m'insupporte moi-même de ne pas être capable de voir au delà de cela. Ce n'est même pas un comportement d'adulte, ça non plus. J'aimerais fuir, ne plus être ici à supporter l'angoisse qui se tisse partout autour de moi. Je ne sais pas surmonter les crises, mais lorsqu'elles concernent Logan, c'est encore plus compliqué à gérer.

— J'y vais, oui. Essaie de ne pas te coucher trop tard.

Le sourire qui s'étire sur mes lèvres est faux, mais il a au moins le mérite d'être poli et de saluer l'homme que j'aime un temps soit peu dignement.

— Bonne nuit Logan.

— Bonne nuit, mon bébé.

Je dis pour clore la conversation. Je crois que je préfère quand on se dispute et qu’on se hurle parce qu’on a conscience que ce ne sont pas de véritables engueulades et qu’elles ont peu de conséquences. Cette dispute-là est différente de toutes les autres et j’espère que nous n’en aurons plus jamais.

Je l’entends aller se coucher et je m’aventure quand même à aller manger quelque chose. Je traîne au salon jusque tard dans la nuit et quand je somnole, je réalise que je suis calmé. Que l’avoir vu dans cet état et si désolé m’avait rappelé à quel point je l’aimais. Alors je ne vais pas me coucher dans la chambre d’Olivia, mais je le rejoins dans la notre. J’entends à sa respiration qu’il dort. Je pose une main sur son front et il est bouillant. Je vais ouvrir la fenêtre pour faire un peu d’air et je m’allonge doucement à côté de lui pour le veiller ; tant qu’il dort, il n’aura pas mal, alors même si j’ai envie de lui faire un câlin, je garde mes distances.

Pour ne pas changer des bonnes habitudes, je me réveille en pleine nuit, mort de chaud. Je suis toujours nauséeux, mais comme je n'ai rien consommé depuis samedi soir, je n'ai plus rien à vomir. À part l'eau que j'ai bu pour prendre mes médicaments.

Je dégage la couverture comme je peux et c'est seulement à ce moment là que je remarque que Logan est là, près de moi. Il a été une nuit loin de moi et j'ai eu la sensation que j'allais en mourir. Maintenant, même s'il est à l'autre bout du lit, je pourrais pleurer de savoir que je n'ai qu'à tendre la main pour caresser son visage.

— Je t'aime...

Je murmure avant de me lever pour aller rejoindre la salle de bain, titubant. Je crois qu'il va falloir que je mange quelque chose.

Il se lève en titubant alors je me précipite pour le réinstaller sur le lit et je lui tends une bassine.

— Ok, mon bébé. T’as pas mangé depuis combien de temps ?

J'ai à peine le temps de faire quelques pas que Logan m'attrape et me force à le rasseoir sur le lit. J'ai l'impression d'être tombé de quinze mètres.

— Depuis samedi soir... J'avais pas faim hier et j'en pouvais plus de vomir sans cesse. Je me suis dit que si je mangeais pas, j'aurais plus rien à vomir.

Et c'est maintenant que je le dis à haute voix que je me rends compte d'à quel point c'est con.

— Ok, c’est pas grave, mais il faut que tu manges, ça ira mieux. Je vais te faire cuire des pâtes. Tu devrais sortir un peu dans le jardin. Ça va te faire du bien. Prends Poisson, j’arrive.

Notre jardin est bien fermé, mais il a besoin de prendre l’air. Il peine à bouger alors finalement c’est moi qui le porte jusque sur la terrasse. Il fait frais, juste ce qu’il faut, et j’allume les lumières. J’ai pris une couverture au cas où. Poisson court comme un fou.

— J’arrive, ok ?

J'ai pas envie de manger, je ne veux pas vomir encore, mais je ne débats pas avec Logan. Je me contente de suivre ce qu'il me dit et de me laisser faire lorsqu'il finit par me porter dehors.

— Merci de m'avoir emmener dehors. Il fait meilleur ici...

Je réponds en hochant la tête quand il me signale qu'il arrive. Je n'ose toujours pas le regarder dans les yeux, mais au moins, je lui parle sans pleurer.

Pandore nous rejoint et vient s'installer sur mes genoux. Ma chatonne d'amour. Elle n'a pas arrêté de me faire des câlins depuis que je suis malade.

Je me presse et en une dizaine de minutes j’arrive avec médicaments, sirop à l’eau et pâtes.

— Tu vas voir, t’auras beaucoup moins mal au ventre après avoir mangé. Même si c’est cinq cuillères. Ça te fera du bien.

Je caresse tendrement son dos avant de m’asseoir à ses côtés.

Logan me mets l'assiette entre les mains et bien sincèrement, ça ne me donne même pas envie. La seule chose sur laquelle je me concentre, c'est sa main dans mon dos.

— Jamais j'aurais cru qu'un plat de pâtes me degouterait et pourtant...

Je mange une bouchée, plus pour faire plaisir à Logan parce qu'il vient de cuisiner que parce que j'en ai vraiment envie.

— C'est dégueulasse, mais merci.

Je rigole doucement alors qu'il n'y a ni sel, ni bouillon, ni même beurre dans les pâtes. C'est sa vengeance pour mon riz blanc insipide du début de semaine.

Je soupire quand il me dit que c’est dégueulasse.

— J’ai fait vite, excuse-moi. Tu veux du ketchup ? Du sel ?

Je dis en me levant pour aller chercher ce qu’il veut pour faire passer ces pâtes dégueulasse.

— T’as pas intérêt à être malade souvent toi, j’te le dis.

Mon sourire en dit long sur le ton de ma phrase, mais je sais qu’il est conscient que ça ne m’empêche pas de le penser. Il est casse-couille j’ai jamais vu ça. Pire qu’un gosse. Et encore, les gosses ne sont pas comme ça.

J'attrape sa main à la vitesse possible, pour le forcer à se rassoeir. Et je lui souris à mon tour en osant le regarder dans les yeux.

— Je me plaignais encore, mais je veux rien. Si je vomis du ketchup ou de la crème, je vais rappeler sos médecin en leur disant que ça y est, je suis mort.

J'ai conscience d'être horrible et je lève les yeux au ciel tellement je me sais insupportable.

— Je suis moins chiant quand j'ai la grippe, à bon entendeur. J'ai conscience d'être irascible quand je suis malade, mais quand je vomis je deviens odieux parce que je déteste ça plus que n'importe quoi d'autre. Mais je pense que j'ai eu ma leçon là.

— Personne n’aime vomir. Mais si t’as envie que je m’occupe de toi, faudra mettre de l’eau dans ton vin sinon tu vas retourner chez ta mère.

Je dis en riant un peu. Je préfère désamorcer la crise parce que je vois qu’il n’est pas bien.

— Souviens toi juste que je suis pas ton père et ça ira. Allez, mange. Ça va soulager ton estomac et les médicaments seront efficaces. Là t’as dû te faire vomir tellement t’avais rien dans le ventre à prendre des médicaments comme ça.

— Je ferais tout pour que ça ne recommence pas. Mais si jamais, un jour, ça devait... Me parle pas. Laisse moi dans la galère, prendre conscience que je suis un bouffon et je me calmerais moi même.

Dès l'instant où je me suis rendu compte que j'avais été trop loin je suis redescendu, mais il était déjà trop tard cette fois.

— Merci d'être revenu.

Son regard m'interroge, alors je poursuis.

— Je me doute bien que c'était pas une rupture, mais avec la fièvre et tout ça, j'avoue que j'ai assez vite réussi à me convaincre que j'allais plus jamais te revoir et que j'avais tout gâché alors... Merci d'être là, même si t'avais l'intention de revenir dès le début.

— J’te parle pas et je passe pour un mari ingrat ? T’auras toujours un truc à dire donc bon... heureusement que tu vas pas tomber enceinte toi, j’aurais pas survécu.

Je souris avant de froncer les sourcils. Merci d’être revenu de quoi ? Je lève les yeux au ciel.

— Arrête un peu de faire l’enfant, hein. On va se marier et c’est pas parce que t’es chiant que je vais partir définitivement. J’le savais déjà avant, c’est pas une découverte. Mais apprends juste à peser tes mots et à ne plus impliquer Olivia et ça ira. C’est tout. Il m’en faudrait plus pour partir sans revenir. Je n’avais même pas pris d’affaire. Même pas Poisson.

Quand il entend son nom, Poisson me court dans les jambes et je me penche pour le caresser.

— J'aurais été la femme enceinte la plus chiante de l'univers. Tu m'aurais butté avant même que j'accouche !

Je souris, parce qu'il le faut bien, mais j'entends bien ce que ça veux dire derrière. Je ne veux plus jamais qu'on connaisse ce genre de conflit lui et moi, alors si je dois m'enfermer dans une pièce pour lui éviter de me subir, je le ferais.

— Alors c'est comme ça ? Si un jour on divorce tu prends Poisson et moi Pandore ? On me pose même pas la question ?

Je lance ma main en arrière d'un air dramatique. Ma tête l'est déjà elle, pas besoin d'en rajouter.

— Et en même temps, j'espère que t'as conscience que je te laisserais jamais divorcer. Là je serai beaucoup plus chiant que je ne viens de l'être. Je te perds pas, hors de question.

— C’est toi qui parles de divorce tout seul. Moi j’ai juste l’intention de t’épouser. Allez, mange encore un peu, qu’on puisse aller nous recoucher.

Je pose une main sur son front.

— T’es un peu moins chaud, ça commence à redescendre. Mais t’as besoin de te reposer.

— Il fait moins chaud, je me sens mieux grâce à ça déjà. C'était une bonne idée de venir dehors, j'ai même pas pensé à ce du week-end tellement j'étais à la masse.

Je lève les yeux au ciel et essaie de manger aussi rapidement que je le peux, sans me faire vomir.

— J'ai hâte. De t'épouser je veux dire, pas d'aller au lit...

Mon sourire est entendu et j'essaie d'imaginer à quel point ce moment sera parfait. Plus encore avec Olivia tant impliquée auprès de nous.

— Moi aussi, j’ai hâte de t’épouser.

Je réponds dans un sourire. Quand je vois qu’il n’en peut plus, je récupère son assiette avant que ça ne le dégoute.

— Allez, on rentre. Tes yeux se ferment presque tout seul.

Je le laisse prendre mon assiette. Moi je prends juste Pandore dans mes bras, alors que Poisson nous suit sans qu'on ai besoin de prononcer son nom.

— Laisse tout ça trainer, on s'en fout. Je rangerais demain.

Je laisse entendre parmi mon bâillement. Et ça, ça montre vraiment combien je suis HS.

— T'as besoin de dormir toi aussi, viens te coucher.

— On a un lave-vaisselle, mon bébé. J’en ai pour une seconde. Va t’allonger. J’arrive.

Je dis en me dirigeant vers la cuisine.

— Puis si t’es en arrêt, c’est pas pour faire la vaisselle, c’est pour te reposer.

— Je suis en arrêt parce que je tiens pas debout, surtout.

Je dis en regagnant directement la chambre.

— On peut laisser la fenêtre ouverte ou tu vas avoir froid tu crois ?

Je demande en passant la tête par la porte.

— Bon sang mais t’es vraiment intenable. Tu ne sais pas te poser et arrêter de t’inquiéter de tout ? Va te coucher. Juste ça. Lâche prise, un peu.

Je dis en râlant. Je termine de ranger la cuisine et quand je rejoins la chambre, il est encore debout, complètement dans les vapes.

— Mais qu’est-ce que tu fous ?

Je demande en riant.