Missing — Logan & Adam

— C'est le plus important.

Je souris.

— T'es sûr que ça va aller ?

Je demande en resserant ma main autour de lui. J'ai vraiment pas envie de le laisser ici bon sang.

— Olivia est avec Romie et Édouard, je peux rester encore un peu tu sais. Il suffit juste que je passe un coup de fil.

Et Livie, je sais qu'elle ne va pas mal. Contrairement à mon mari...

— J’ai envie que que tu restes.

J’avoue assez facilement.

— Mais Livie elle... je l’ai oublié dans un parc. Faut aller la chercher et la rassurer. Alors vas-y. Elle est plus importante. Tu sais très bien qui tu dois choisir entre les enfants ou moi. Tu le sais. Mais ne roule pas vite.

— C'est pas une question de choix ou d'importance. T'es tout aussi important qu'elle ou que les jumeaux mon Cœur.

Je réponds en le blotissant contre moi. Mais je comprends ce qu'il veux dire et il a raison, Livie est sans nous et elle a besoin qu'un de nous arrive et la ramène chez elle.

— Tu vas aller dormir un peu, et tu auras à peine fermé les yeux qu'on sera déjà rentré et tous blottis dans tes bras, parce qu'on t'aime tous les quatre très fort.

Mes doigts se lient aux siens et je le tire à ma suite. Ça va lui faire du bien de relâcher la pression en se laissant aller au sommeil.

Je suis soulagé qu’il n’insiste pas plus parce que je n’aurais pas tenu plus longtemps. Je suis tellement fatigué. Ça n’était pas arrivé depuis longtemps.

— Merci, mon ange. Je suis désolé.

Je le laisse me border. Les jumeaux ne pleurent pas, certainement parce qu’ils sentent que c’est une situation d’urgence. Je veux qu’ils restent mais j’ai trop peur qu’ils leur arrive quelque chose par ma faute.

— Dis-leur que je suis désolé.

— Je vais leur dire, c'est promis.

Je caresse tendrement son visage alors qu'il se laisse aller dans les draps.

— T'es sûr que tu veux pas que je te laisse les jumeaux ? Si je lance un film, ils vont être collé à toi tout en étant absorbé par la télé.

Je souris en songeant à nos petits coeurs. Je crois que ça me fait vraiment peur de le laisser seul, même si j'ai conscience que les jumeaux je pourront rien faire pour lui s'il quelque chose arrivait.

— C'est toi qui me dit mon cœur.

Je termine en embrassant la commissure de ses lèvres avec tendresse.

— Je vais m’endormir. J’ai envie qu’ils restent mais c’est trop dangereux.

Je dis avec un pâle sourire.

— Vas chercher Livie. Ils n’ont pas de siège auto, ils ne peuvent pas la ramener.

Je peux lire dans son regard qu'il ne dit pas ça seulement pour aujourd'hui et ça me brise le cœur. J'espère pour lui comme pour les enfants qu'il se fera confiance de nouveau d'ici quelque temps. Et je ferais tout pour que ce soit le cas.

— Alors je file.

Je souris en l'embrassant encore.

— Tiens, garde mon portable au cas où. Dès que j'arrive à l'église, je récupère le tien et je t'envoie un message.

Je caresse ses cheveux.

— J'habille les enfants et on passe te faire un bisou avant de partir...

Je prends son portable et je tire sur son bras pour lui faire un énorme câlin. Je me sens affreux et si la police avait été au courant, je perdais la garde d’Olivia. On perdait notre grande fille. Par ma faute. J’ai du mal à le laisser partir mais quand il s’en va vraiment, je me couche et je m’accrohe à son téléphone en attendant qu’ils reviennent. Même si c’est bref, le câlin des jumeaux me fait du bien. Je ne tarde pas à m’endormir.

J'ai beaucoup de mal à partir et à quitter Logan, c'est seulement pour Olivia que je le fais. Quand j'installe les enfants à l'arrière, je me retiens de ne pas pleurer et je fais de même sur tout le trajet. Je leur parle, je les vois rire, mais je n'ai qu'une envie, être à ce soir et avoir Logan et tous mes enfants contre moi.

Quand je me gare devant l'église, je ne pense plus à rien hormis voir Olivia et je descends en vitesse. J'aurais presque pu laisser les jumeaux dans la voiture, dans la panique. Et je dois faire un tel boucan en entrant dans la propriété avec les enfants que je vois Romie ouvrir la porte au loin, Olivia sur ses talons. Je pourrais en pleurer de soulagement.

Quand on a entendu une petite voix appeler à l’extérieur, on a d’abord cru que c’était Zombie. Mais il était à nos pieds. C’est vrai qu’on a entendu le portail mais en journée il est ouvert pour le facteur, les livreurs...

Puis Edouard est allé voir et il est revenu avec un « j’crois que c’est ta nièce, elle te demande », j’ai cru halluciner. Ma nièce. Laquelle ? Le bébé ou la petite de 6 ans ? J’ai pensé qu’il me faisait une blague, mais non. Olivia était là. Portable à la main.

— Bah... qu’est-ce que tu fais là, mon cœur ? Entre.

Je l’ai conduite jusqu’au salon, inquiète. Elle m’a tendu le téléphone.

— Il faut appeler Papou. Papa est parti sans moi. Mais c’est pas grave, il m’aime toujours, des fois il oublie. C’est lui qui m’a dit.
— Parti sans toi ? De quoi tu parles ?
— Bah au parc ! Papa il a dit, si il est plus là alors je vais à la grande église parce tata Romie elle est toujours là.
— Papa est toujours au parc ? Il se sentait mal ?
— Non. Je jouais et quand j’ai regardé car il allait faire nuit, il était plus là. Alors je suis là. Tu peux appeler Papou ?
— Euh.. oui. Oui, je l’appelle.

Mon frère est perdu dans la nature, il a oublié Olivia et il se passe presque une demi-heure avant qu’Adam n’appelle enfin. J’ai dû me retenir de pleurer un millier de fois alors heureusement qu’Edouard était là pour jouer avec Livie parce que je n’aurais pas assuré.

Quand je sais que mon frère va bien, je me détends mais c’est la première fois que j’assiste à une perte de connaissance aussi importante et je suis complètement chamboulée.

Quand on entend Adam et les jumeaux, Livie quitte les bras d’Edouard qui lui faisait la lecture et elle court vers la porte. J’ai à peine le temps de l’ouvrir qu’elle court dans les bras d’Adam. Il dépose les jumeaux au sol pour la serrer contre lui et si elle n’a pas vécu ça comme un traumatisme, je crois qu’ils ont eu le temps de se rendre compte qu’elle avait disparu.

— Mais qu’est-ce qu’il s’est passé ? Il est où Logan ? Ça va ?

Je m’inquiète, Edouard sur les talons.

Je serre Olivia tellement fort contre moi que je termine par la lâcher seulement par peur de l'étouffer. Je lui fais mille bisous et à voir sa tête, elle est en effet la moins traumatisée de nous.

— Tu fais de gros câlins à Arthur et Blanche ma puce ? Tu leur a manqué dans le bain !

Je lui glisse à l'oreille pour m'approcher de Romie, sans qu'Olivia n'entende trop. Elle est trop intelligente cette enfant, elle comprendrait beaucoup de choses.

— Il est resté à la maison, il a besoin de se reposer. Je peux avoir son portable s'il te plaît? Juste pour lui envoyer un message. Je lui ai laissé le mien.

Romie le sort de sa poche et me le tends. Ça me prends cinq secondes.

De Logan à Adam.
Je suis à l'église. Livie va bien mon cœur. On fait au plus vite. Je t'aime.

Quand je remets le portable de Logan dans ma poche et que je relève les yeux vers Romie, je me rends compte qu'elle est pendue à mes lèvres. Elle attends des explications.

— Je sais pas vraiment ce qu'il s'est passé. Il est rentré en retard sans Livie, sans savoir ce qu'il faisait au parc. Il m'a demandé si je faisais du babysitting en me voyant avec les jumeaux...

Je sens les larmes me remonter aux yeux, encore sous le choc de tout ce qu'on vient de vivre.

— Je sais même pas comment il a pu retrouver la maison... Ça a duré une éternité, il voulait pas me croire. J'ai eu tellement peur pour Olivia, et pour lui...

Et le dire à haute voix me serre la gorge au point de laisser couler les larmes.

— Putain mais ils font quoi ces cons de médecins ?! Faut aller vers d’autres spécialistes qui auront peut-être d’autres approches. On peut pas laisser ça comme ça.

Je dis en allant directement prendre Adam dans mes bras. Il est complètement désemparé et moi aussi, ça me fait peur. Ça dure jamais longtemps. Il est toujours seul. Aujourd’hui, c’était pire.

— Est-ce que tu veux que je rentre ? Vous avez besoin d’aide ?

Contrairement à lui, je n’arrive pas à retenir les quelques larmes silencieuses qui glissent le long de mes joues.

J'accepte l'étreinte de Romie sans broncher, au contraire. Elle est très bouleversée elle aussi et y'a de quoi.

— Ils disent qu'ils savent pas, qu'il n'y a rien à faire. Parfois j'ai peur qu'il se souvienne pas et qu'il soit plus jamais capable de me reconnaître...

Jamais j'ai osé dire ça à Logan, et je sais pas si je fais bien d'effrayer Romie, mais j'ai besoin de me calmer avant de rentrer.

— Reste ici ma belle, ne t'en fais pas. Il s'excuse auprès de vous, de vous avoir fait vivre ça. Mais il a honte de ce qu'il s'est passé et s'il te voit, ce sera encore pire...

Il ne se souvenait pas non plus qu'elle était sortie de prison... Je renifle en croisant le regard d'Edouard. Édouard qui me sourit, semblant sincèrement désolé pour nous.

— Passe le voir demain si tu veux, ça lui fera plaisir, mais ça va aller. Je te promets que je prends soin de lui et que je le laisserais pas tomber.

— D’accord. Je passerai. Faut pas qu’il ait honte, c’est pas de sa faute. Dis lui que l’aime et que ça change rien. On vous retient pas plus longtemps.

Je me penche vers les enfants pour leur faire un calin. Olivia s’échappe uniquement pour aller faire un câlin à Edouard.

— Tata mimi, c’est ton amoureux ?
— Oui, ma belle.
— Alors t’es mon tonton ??

J'ai l'étrange sensation de ne pas être à ma place, parce que c'est quelque chose de grave et de difficile qu'ils traversent. Et en même temps, j'éprouve une peine réelle pour eux et pour la première fois depuis longtemps, je ne vois pas seulement Adam comme un connard. Aujourd'hui, je vois un homme profondément amoureux de son mari, qui a peur qu'il lui échappe et qui fait tout pour gérer au mieux leur vie de famille et les conséquences de son accident. Et j'ai aucun mal à avouer que je trouve ça beau et courageux. On n'agit pas comme ça pour tout le monde et je crois bien que si moi je donnerais ma vie pour Romie, Adam donnerait volontiers la sienne pour Logan. Actuellement, je crois même qu'il lui donnerait ses souvenirs si ça pouvait l'aider.

Ça m'emeut autant que ça m'attriste et quand Olivia vient me demander si je suis son tonton, je suis carrément pris de cours. Je ne sais pas quoi dire. Alors je relève la tête vers Romie qui sourit doucement, puis vers Adam. J'attends une sorte de signal, qu'il me donne en me souriant à son tour. Une partie de la hache de guerre est enterrée ce soir et c'est con qu'il ai fallu un tel drame pour en arriver là.

— On peut dire que je suis comme ton tonton, oui ! Puis je raconte pas si mal que ça les histoires, alors on va bien s'entendre tous les deux, pas vrai ?

Pour toute réponse, elle lui fait un énorme câlin et ça m’émeut aux larmes.

— Si jamais vous avez besoin, tu appelles. On sera là pour vous.

Parce que c’est comme ça quand on est une famille. Adam récupère les enfants et je vais même l’aider à attacher tout le monde pour qu’il reparte au plus vite. Après un dernier au revoir, je retourne auprès d’Edouard et j’accepte volontier l’énorme câlin qu’il me fait.

Je les remercie sincèrement tous les deux. J'ai conscience qu'Edouard vient de faire un pas énorme envers ma famille. Et ce qu'il a fait aujourd'hui en s'occupant d'Olivia, c'est un geste que je n'oublierais pas.

On ne mets pas bien longtemps à rentrer à la maison les enfants et moi. Livie s'occupe de Blanche pendant que je détache Arthur et je trouve ça adorable. J'en souris encore lorsque j'ouvre la porte et qu'ils rentrent tous les trois dans la maison aussi vite qu'ils le peuvent.

— Il est où papa ?
— Dans notre chambre ! Mais je crois qu'il a bien besoin de se faire réveiller avec un énooooorme câlin !

Je rigole en mimant le geste.

— Whoaaaaa mais on a le droit de le réveiller ?

Olivia court dans la chambre et saute sur le lit. Je suis réveillé dans un sursaut et j’ai le droit à un énorme câlin.

— Pardon mon cœur.

Je la serre fort dans mes bras.

— Pas grave !! J’étais chez tata et tonton c’était vraiment chouette. On a lu des histoires en attendant que Papou arrive.

Je leur aurais bien laissé un moment tous les deux, pour Logan, mais les jumeaux ne sont pas de cet avis. Arthur commence déjà à escalader le lit quand je rentre dans la pièce.

— Je sens qu'il y a une petite fille qui aimerait bien aller chez tata et tonton de temps en temps pour jouer !

Je rigole en m'approchant pour m'assoir sur le bord du lit. J'aide Arthur à grimper en même temps, alors que Blanche s'agrippe à moi pour le faire.

— Ça va toi ?

Je demande à Logan en caressant sa nuque.

J’ai l’impression d’être dans le brouillard. Je ne relève pas. Je suis simplement fatigué. Je n’ai plus aucune énergie. Comme si les voir enfin m’avait soulagé.

— Hm.

J’articule simplement. Les enfants ses blottissent contre moi. Ils n’ont pas l’air fâché mais ma culpabilité ne me quitte pas. Je suis un mauvais père pour avoir mis ma fille en danger.

— J’ai faim, papa...
— Oh pardon. On va préparer quelque chose...

Logan est parmi nous sans vraiment l'être. Cette fois ça a été vraiment dur et dangereux et j'ai peur qu'il ne s'en remette pas aussi rapidement qu'il a pu le faire par le passé. Et si Romie avait raison et qu'il existait une solution, ailleurs, chez quelqu'un d'autre ?

Plongé dans mes pensées, je ne comprends même pas pourquoi Olivia se lève, Logan tentant de la suivre, puis j'entends parler de nourriture.

— Vous voulez qu'on fasse une pizza ? On a tout ce qu'il faut et ça prends peu de temps à cuire.

Je leur demande, en voyant l'heure et en voyant qu'il est déjà très tard. Tout le monde va finir par sombrer, petits comme grands, alors il faut faire ça vite.

J’écoute à peine mais les enfants ont l’air content alors je suis. J’agis un peu comme un automate. J’aide Adam du mieux que je peux mais je peine à me concentrer. Je pique du nez pendant que la pizza cuit et une demi-part plus tard, je n’ai plus faim.

Je n’arrive même pas à quitter le canapé pour coucher les enfants alors je leur fais plein de bisous et je laisse Adam se charger de les coucher.

Je fais mille baisers aux enfants et bien malgré moi, je reste un peu plus longtemps avec Olivia qu'avec les jumeaux. À ce jour, elle est devenue mon enfant autant qu'eux et aujourd'hui je m'en suis rendu compte plus que jamais.

Quand tout le monde est couché, bordé et que l'histoire de Livie est lue, je retourne en bas et Logan n'a pas bougé. Au diable la vaisselle et le bordel, j'ai plus important à faire ce soir. Ça aussi je l'ai compris.

— Tu veux qu'on aille se coucher maintenant ?

Je demande en venant me glisser contre Logan et en me blotissant contre lui.

— On a bien besoin de souffler un peu.

J’acquiesce et je me lève rapidement pour aller me coucher. Je ne sais pas comment il fait pour avoir envie de rester contre moi après ce qu’il s’est passé tout à l’heure.

Il se lève sans un mot et part dans la chambre, tout seul. C'est dur à encaisser, et un autre jour je me serai certainement mis à pleurer en me demandant pendant des heures ce que j'avais pu faire de mal pour que ça arrive. Mais je me contente de souffler un grand coup avant de me lever pour le rejoindre.

— Mon cœur, parle moi...

Je demande doucement, alors qu'il n'a même pas pris la peine d'allumer la lumière.