Travel the World - Maximilien & Luke

C'est lui qui termine mon geste et j'aime vraiment beaucoup trop ça pour le cacher. Mon sourire doit illuminer la pièce.

— Patates douces pour moi ! C'est bien meilleur et en plus, ça va me changer des frites dégueulasses que j'ai mangé toute la semaine à Manchester.

Je rigole, tellement heureux d'être passé de Manchester, seul, à Paris, avec lui.

— Bon alors, on le goutte ton foie gras en apéro ?

Je fais oui dans la tête et je serre tendrement ses doigts avant de le lâcher pour le servir.

— Tiens !

Je lui tends un petit toast. On nous apporte un verre de vin blanc pour l’apéro et on en profite pour commander.

— Tu peux rajouter du confit d’oignon, du gros sel. C’est très bon.

— Ça là ?

Je l'interroge en montrant le truc qui ressemble à de la compote. Il acquiesce et quand je mange le toast, je dois faire la grimace la plus horrible de toute ma vie.

— Oh mon dieu ! Ça a un goût horrible ! T'aimes ça toi ?

Je demande en riant. Mon palais est habitué aux McDonald's et aux chips, pas aux choses qui sortent de l'ordinaire.

— Je peux essayer avec le gros sel ? Ce sera forcément meilleur ! Au pire tout seul, tout seul je sais que c'est délicieux !

J’éclate de rire.

— Oui moi j’aime !

Je dis en mettant de la compoté sur mon toast.

— Avec le gros sel, tu vas aimer. J’le sens !

— Tu es vraiment beau, quand tu rigoles.

Je souris, avant de me reprendre.

— Enfin, pas seulement quand tu ris, tu vois ce que je veux dire ! Ok. Bref. T'es beau !

Quitte a être sincère, autant l'être jusqu'au bout.

— C'est vraiment meilleur comme ça ! Je suis pas fais pour manger des choses trop originales, tu le sais maintenant.

— Merci. T’es très séduisant.

Je réponds sans le quitter des yeux cette fois-ci.

— Je note. Pas très original. Même si c’est étonnant pour un anglais... en France on dit que tout ce que vous mangez est vraiment bizarre.

Je souris malicieusement.

— Tu cuisines bien, j’ai cru comprendre ?

Je n'ai pas l'habitude de rougir, parce que j'ai appris dans mon métier à cacher mes émotions, mais le regard qu'il a en me disant cela me laisse tout pantois.

— Ce que Nous mangeons ? Je rêve ou t'es carrément en train de renier ta partie anglaise là ?

Je rigole, faisant mine d'être outrée.

— Je cuisine pas si mal, oui. Mais je suppose qu'avoir un père pâtissier m'a aidé à apprécier faire la cuisine sans même le savoir !

— Quand on parle nourriture, je suis obligé de la laisser de côté.

Je dis en riant.

— Pâtissier ! C’est génial. J’ai hâte de goûter ça !

Je reprends un toast avant de prendre une gorgée de vin.

— Ah non mais là je sais pas si ça va pouvoir coller entre nous. Tu peux pas renier ta patrie comme ça ! Ça veux dire quoi ? Que si l'année prochaine on regarde la coupe du monde ensemble, tu seras pas forcément pour l'Angleterre ? Je n'accepte pas !

Je lève les yeux au ciel en lâchant mes couverts, avec un air dramatique.

— T'emballes pas trop sur la cuisine, moi je cuisine pas Français !

— Je suis né en France... j’ai la double nationalité alors théoriquement, je suis des deux camps. Mais je me rangerai de ton côté pour le sport.

Je dis en riant franchement.

— C’est dommage, c’est très bon.

— Je te remercie pour l'effort.

Je rigole à sa suite.

— Et dans ce cas, si tu acceptes de faire des sacrifices pour le foot, peut-être que je pourrais apprendre à te faire des plats français. Lequel tu préfères ? Que je puisse m'entraîner en attendant de te faire découvrir mon chez moi.

— Le pot-au-feu ou la tartiflette.

Je réponds sans réfléchir. Il m’invite chez lui implicitement et j’ai bien plus de hâte que d’appréhension. Je me sens sincèrement bien avec lui. Jamais je n’aurais cru que ça pourrait m’arriver à nouveau.

— La tortiquoi ?

Je demande en essayant de me retenir de rire, face à ce nom à coucher dehors.

— Faudra que tu me notes ça quelque part, je veux faire de mon mieux pour toi. Vraiment au mieux. À plein de niveaux.

— Je te le noterai !

Je dis avant de froncer les sourcils.

— À plein de niveau ? Qu’est-ce que je dois comprendre ?

— Tu peux l'interpréter un peu comme tu veux.

Je souris, le cœur battant la chamade.

— Pour ma part, j'entends par là que je me suis sincèrement attaché à toi depuis qu'on se connaît, que ce déjeuner confirme mon ressenti et que la seule chose à laquelle je pense depuis tout à l'heure, c'est que j'aimerais être celui qui t'aide à combler les vides avec lesquels les gens t'ont laissé vivre. Je voudrais faire de mon mieux, pour toi.

Je n’ai pas de réponse à donner à ça parce qu’une parole comme celle-ci, elle ne se gâche pas. On n’y répond pas. On l’attrape, on s’en imprègne et on la garde en nous en espérant que ce qu’on ressent durera toujours. Moi aussi, je tiens à lui, à ce qu’il y a entre nous mais le lui dire ne servirait à rien d’autre qu’à l’imiter et à m’approprier son magnifique discours. Quand je me lève un peu de ma chaise pour me pencher par-dessus la table, je ne réfléchis pas. Je dépose un baiser sur ses lèvres, sans y être invité et j’en rougis presque instantanément lorsque je m’en rends compte. Parfois, les gestes suffisent à exprimer tout ce qu’on ressent et je sais qu’il n’a aucune idée de ce que ce simple baiser peut signifier pour moi, mais c’est la promesse qu’on va de l’avant et qu’il n’est en rien un pansement ou une transition.

— Depuis que tu fais partie de ma vie, je me sens moins seul. Pas plus entouré parce que je le suis, mais ces vides dont tu parles, tu les occupes et j’oublie que j’ai mal, que j’ai peur. Je m’en rends compte maintenant que tu les évoques.

J’en ai la voix qui tremble d’émotion et l’arrivée du serveur pour nous débarasser me permet de me recentrer juste un peu. J’aime sa franchise, elle me fait beaucoup de bien. Il ne me mentira pas, je le sens et ça me rassure. J’en ai assez des gens qui prétendent m’aimer et qui s’en vont.

Lorsque le serveur arrive, j'ai encore le toucher de ses lèvres sur les miennes. Le goût de reviens-y est plus fort que jamais et je regrette presque d'être dans ce restaurant. Mais que ce soit Maximilien et sa timidité qui est initié ça, ça me touche. Je crois qu'on est en parfait accord, lui et moi.

— Merci.

Je glisse au serveur qui repart après avoir déposé nos assiettes et nous avoir servi deux verres d'un nouveau vin. Rouge, cette fois.

— Je suis obligé de t'avouer que je sais pas comment je vais faire pour te savoir à la fois si proche et si loin de moi quand on va devoir se séparer tout à l'heure.

J’attrape sa main quelques secondes.

— Peut-être qu’on n’est pas obligé de se séparer...?

Je pince les lèvres doucement, espérant comprendre ce qu'il veux dire par là.

— Tu veux dire pas de séparer, du tout ? Jusqu'au mariage ?

Un sourire s'étire sur mes lèvres à cette simple pensée.

J’acquiesce non sans que le rouge me monte aux joues.

— Puis jusqu’à Londres...? Comme je dois rentrer le lendemain du mariage... enfin, si ça te dit ?

Mon regard doit parler pour moi, mais je réponds quand même avec un sourire.

— Ça me dit encore plus que ce que tu dois imaginer. Personne va mal le prendre chez toi, que tu sois à Paris sans être avec eux ?

Je demande, avant de me rendre compte qu'il s'attendait peut-être à ce que j'aille chez lui, et non à ce que lui me rejoigne à mon hôtel.

Je secoue la tête. Puis même s’ils le prenaient mal, j’ai envie d’être avec lui, c’est plus fort que moi.

— On sera avec eux demain. C’est tout ce qui compte. J’ai hâte que tu rencontres mon frère.

— J'ai hâte aussi ! Même si j'imagine qu'en plein dans son mariage, il aura autre chose à faire que de prendre le temps de se présenter.

Je rigole en imaginant tout ce qu'ils doivent avoir à faire, avec le peu de temps qu'ils ont eu.

— Mais on aura l'occasion de se revoir lui et moi ! Une fois de retour en Angleterre, on va se séparer pour mieux se retrouver, pas vrai ?

— Je sais qu’il aura le temps.

Mon frère mettrait sa vie en pause s’il le pouvait. Juste pour me voir aller mieux durant quelques secondes.

— Tu es le bienvenue à l’église. Tu pourras y venir aussi souvent que tu le souhaites. J’ai quelques chantiers en cours mais je n’en prendrai pas plus alors... ça dépendra de ton travail.

— Je ferais de mon mieux. Je bouge beaucoup je vais pas te le cacher, mais avec une bonne raison de m'arrêter un peu je devrais trouver le temps de venir enfin voir cette église.

Je souris en attaquant mon plat.

— Mais tu devras venir un peu toi aussi, que tu puisses plonger à ton tour dans mon univers.