Hawai en famille #1

On a posé le pied ici seulement hier après-midi, mais j’ai déjà tout un tas de souvenirs dans la tête. Je savais qu’il faisait très beau ici, mais pas qu’en plein automne il pouvait faire aussi chaud que nos plus belles journées d’été. On a pu passer un beau moment sur la plage et ce soir, Luca et Alessandro ont prévus un dîner dehors, un feu de camp ! Ça va été génial.

Malgré le décalage horaire je suis réveillée relativement tôt, sans doute à cause du bébé. Ça commence à pousser et les premiers mois sont aussi compliqués que ça l’avait été pour Will. Mais aujourd’hui j’ai Kit et tout est différent, j’ai l’impression d’être une véritable princesse et c’est vraiment agréable. Je fais tout pour qu’il soit un prince comblé lui aussi.

— Y’a quelqu’un ?

Je demande en descendant dans la cuisine pour me servir un verre d’eau. Peu importe sur qui je pourrais tomber, je ne serais pas contre un peu de compagnie. Je suis surprise de trouver Luca parce qu’il avait l’air très fatigué hier, mais c’est sa maison et j’imagine qu’il veux faire en sorte que tout soit parfait. On se connaît pas trop encore tous les deux, c’est l’occasion.

— T’as bien dormi ?

Alessandro m’a mis un coup en se retournant ce matin. Ça m’a réveillé en sursaut alors j’ai ronchonné et même s’il s’est confondu en excuses, il s’est rendormi à coup de câlins. Mais moi j’ai pas réussi à me rendormir. Je suis trop excité que tout le monde soit là. Même Adriel et Keziah. Les enfants aussi ! Enfin, sauf Nellie qui est encore trop petite.

Je me suis levé discrètement pour rejoindre la cuisine ; Annie a tout préparé et dressé la table mais elle n’a pas encore préparer café, thé et lait chaud. Comme elle n’est nulle part, je n’ai aucun doute sur le fait qu’elle est allée chercher du pain frais et des viennoiseries.

Je me prépare un thé quand je vois Rose arriver. Ça me surprend et je panique un peu car je ne suis jamais resté seul avec elle, mais elle est très gentille.

— Bien et toi ? T’es debout tôt !

— Pareil ! La chambre est hyper agréable et on se sent vraiment à l’aise dans la maison, ça aide.

Je lui souris sincèrement. Il a de la chance d’avoir grandit dans un tel endroit, c’est à couper le souffle.

— Et oui il est un peu tôt, mais j’arrive jamais à me rendormir. C’est à cause du bébé.

J’avoue en riant en posant une main sur mon ventre. Je l’aime déjà très fort.

— Mais t’es pas enceinte et t’es debout aussi ! je fais remarquer à mon tour.

— Mon bébé à moi aussi bouge beaucoup.

Je dis avec un sourire.

— Est-ce que tu veux boire quelque chose ? Grignoter, d’ailleurs. Annie va revenir de la boulangerie !

J’éclate de rire, avant de me rappeler que tout le monde dort à l’étage et de baisser le volume.

— T’es comme moi, tu l’aime très fort mais t’aurais bien aimé dormir un peu plus !

Je hausse les épaules en hochant la tête.

— Je veux bien juste un verre d’eau s’il te plaît ! Pour le reste je peux attendre tout le monde, c’est plus sympa. C’est toi qui a préféré tout ça ? Ou c’est Annie ? Vous vous connaissez depuis longtemps elle et toi ?

— C’est ça. Bon, je peux toujours faire une sieste tout à l’heure. C’était les vacances après tout.

Je lui serre un verre d’eau avant de lui tendre.

— On va s’installer dehors ?

Il fait bon à cette heure-là et on sera mieux sur les banquettes.

— C’est Annie. Je la connais depuis mon adolescence mais c’est pas si loin, du coup. Enfin, j’ai l’impression que je la connais depuis toujours ; elle s’est beaucoup occupée de moi.

— Je sens que ça va être des vacances mouvementées ! L’avantage c’est qu’au nombre qu’on est, y’aura toujours moyen de trouver un moment pour se reposer si d’autres préfèrent se jeter dans l’eau.

Je le remercie en le suivant dehors. C’est complètement différent de ce qu’on a acheté en Australie, mais je trouve ça tout aussi beau. Et très intime. On pourrait ne croiser personne d’autre pendant tout notre voyage.

— Pas si loin ? Attends mais t’as quel âge ? Tu fais pas si jeune que ça ! Quand on discute je veux dire, t’as pas la tête d’un type de quarante ans non plus !

Et en même temps, entre sa maladie et la mort de ses deux parents dont m’a parlé Kit, ça fait vieillir le corps et l’esprit à la fois.

— Ça se voit que vous êtes proches, y’a une belle complicité entre vous, ça saute aux yeux.

— 22 ans. Je suis très vieux pour quelqu’un qui a une cardiopathie.

Je dis avec un sourire.

— Elle met de la vie dans la maison, même quand on n’est pas là. C’est important. On s’appelle de temps en temps, mais c’était compliqué en ce moment. Tout s’arrange. T’es plus âgée que Kit, toi, c’est ça ?

— Je suis contente que tu sois très vieux alors. Je sais qu’on se connaît pas encore beaucoup, mais j’étais là quand t’as eu cette greffe et je suis vraiment heureuse pour toi que ça ai pu se faire.

Je lui souris sincèrement. Ce nouveau coeur va sûrement lui ouvrir tout un tas de possibilités et je n’imagine pas tout ce qu’ils ont déjà du prévoir Alessandro et lui.

— Elle vit ici toute l’année ? C’est chouette aussi bien pour elle que pour toi, ça mets de la vie en effet.

Et c’est impeccable, y’a pas à dire.

— On a dix ans d’écart tout pile, oui. J’aurais pas cru que je sortirais avec quelqu’un de plus jeune que moi un jour, mais c’est quoi l’âge quand l’amour s’en mêle ? C’est juste un chiffre. Ça définit pas notre histoire et la façon dont on s’aime. Alessandro il a quoi ? Un peu plus de trente ans ? Vous avez une dizaine d’années d’écart aussi en fait.

— Je crois que je suis content aussi. C’était pas une étape simple dans ma vie. Mais j’ai l’impression de revivre un peu, c’est agréable.

Au fond, je sais que c’est simplement retarder l’échéance mais je suis content d’avoir du temps avec Alessandro. Je n’en ai jamais trop.

— Non, elle vit dans une maison plus loin. Avant elle vivait dans la maison des invités, mais elle préfère sa nouvelle maison maintenant. Mais quand on est là, même si je lui dis qu’on va s’en sortir, elle viendra quand même pour cuisiner et tout ranger. Elle fait vivre la maison et l’entretien quand on n’est pas là.

Mais c’est vrai que c’est un vrai confort. Et c’est une personne formidable.

— À peu près, oui. Faut pas lui dire mais là... je me rappelle plus de son âge. J’irai voir sur son passeport. Je connais sa date de naissance mais... j’crois qu’il à 30 ? Ou 31. Moi en tout cas, j’aime bien cet écart. J’apprends beaucoup de lui, et lui de moi. On a des façons de voir les choses différentes.

— T’as encore des effets indésirables suite à tout ça ?

Je demande sans trop insister. Il a droit de ne pas me répondre s’il le souhaite comme ça.

— La maison des invités c’est là où Keziah et Adi sont installés ? Ça lui sépare sa vie personnelle et son travail comme ça, c’est peut-être plus facile pour elle. Elle doit avoir énormément de souvenirs ici elle aussi.

Tout comme Luca elle a connu cette maison pleine de vie.

— Je lui dirais rien, promis ! Mais fais en sorte d’être discret quand t’iras fouiller son passeport, on sait jamais ! Mais c’est vrai que c’est agréable parce que sans être de la même génération, on n’est pas les exacts opposés. Je sais pas pour vous, mais parfois Kit me parle de choses dont j’ai aucune idée et quand je lui expose mon point de vue je me sens jamais stupide. On se complète, c’est bien aussi de pas être pareil et se savoir que l’autre comble nos lacunes !

— Les médicaments et tout ça... bon c’était difficile les soins alors pour l’instant, je n’ai que des bons cotés. Ça va mieux, c’est le principal.

J’acquiesce quand elle me parle d’Annie.

— Oui, c’est ça ! Je pense aussi qu’elle préfère ne pas vivre sur son lieu de travail.

Je grimace un peu.

— Oui, c’est ça. On se complète. On se tire vers le haut. En tout cas, je n’avais jamais vu Kit comme ça. Je pensais qu’il était heureux avant, mais en fait... il l’est mille fois plus aujourd’hui.

— C’est le plus important, oui. J’imagine qu’on peut pas faire grand chose, mais si vous avez besoin surtout n’hésitez pas. Même toi. Je sais qu’on n’est pas encore très proche, mais j’espère que ça va changer et si ça peut être plus facile de parler à quelqu’un qui ne partage pas ton quotidien, je saurais écouter.

C’est mon instinct maternel sans doute.

— Il mérite d’être heureux, c’est quelqu’un de tellement génial. Je sais qu’il croit que si ses anciennes copines l’ont trompés c’est parce que c’est lui le problème et je me suis juré de lui prouver qu’il n’avait rien à voir avec ça. Alors entendre qu’il est heureux et que même vous qui êtes très proches de lui vous pouvez le voir, c’est agréable !

— C’est très gentil. C’est vrai que je me confie pas à quelqu’un d’autre qu’Alessandro, parce que j’en n’éprouve pas le besoin pour l’instant. Mais merci de la proposition.

Je sais tout ce qu’elle a fait pour Adriel. C’est magnifique. C’est forcément une personne géniale.

— Bah... il a l’habitude de s’engager en cinq minutes, c’est vrai. Mais il est quand même réfléchi. Alors il aurait pu te proposer de vivre à deux le lendemain de votre rencontre, ça c’est vrai. Mais... jamais il n’aurait adopté William s’il ne savait pas ce qu’il faisait. Je crois que même lui réalise qu’il n’avait jamais été aussi heureux.

— Je t’en pris, c’est sincère.

C’est aussi très beau qu’ils soient si ouverts d’esprits l’un envers l’autre. Ils ne se confient qu’à eux et ils s’en portent bien, c’est admirable. D’autant plus qu’ils ont su trouver du soutien ailleurs quand ils en ont eu besoin.

— Je sais pas s’il vous en a déjà parlé, peut-être à Keziah et encore, mais très peu de temps après notre rencontre j’ai cru que j’étais enceinte. Je sais que je suis enceinte alors qu’on s’est pas rencontré y’a si longtemps que ça non plus, mais bon, on vit ensemble, j’ai rencontré ses parents et il y a Will en effet ! Là c’était vraiment très tôt... Et bah aussi fou que ça semble, ça me faisait pas peur. Je crois même qu’on a déçu que ça n’arrive pas vraiment. Je sais pas si on réalisait, mais je savais déjà qu’on ne jouait pas et que Kit était sincère. On semble s’être précipité, mais on sait ce qu’on fait. C’est cool de voir que vous n’êtes pas des cons et que vous acceptez tout ça. Encore merci de nous avoir invité, et d’avoir accepté que Will soit avec nous.

— Ça me fait plaisir. J’avais envie d’être entouré de mes amis après tout ça. Et puis se retrouver en vacances, il n’y a rien de mieux. Et puis je ne m’imaginais vous dire de venir mais pas les enfants... ce serait nul. Et puis c’est pas comme si on allait faire les fous et faire n’importe quoi !

Je dis avec un sourire.

— Ils vont bien s’amuser ici !

— C’est eux qui vont faire les fous et faire n’importe quoi, mais à leur façon !

Axel va certainement manquer à Tommy à un moment, ils sont très proches, mais Will lui permettra de pas trop voir le temps passer quand on arrivera sur les derniers jours.

— J’ai hâte de faire du surf !

— Moi aussi...

Je reconnais. Je sais qu’Alessandro va faire quelques mini crise cardiaque mais j’ai tellement hâte !

— T’as déjà appris en Australie, non ?

— Ça va te faire du bien de retrouver ça.

J’imagine qu’avec sa maladie, il pouvait pas être au max sur les vagues.

— Un peu oui ! Je me débrouille ça va, mais je vais quand même me prendre de sacrées gamelles je pense.

— Si tu sens que tu vas tomber, jette toi toujours en arrière. Essaye pas de te rattraper surtout. Il vaut mieux décider comment on tombe plutôt que de croire qu’on va réussir à se rattraper.

Surtout quand on débute.

— Faudrait pas que t’assomme votre bébé, il serait pas content.

Je dis avec un sourire.

— Toujours choisir comment on tombe. C’est ce que me répétait mon prof au début.

— Y’a pas que le bébé qui serait pas content.

Je grimace en riant doucement. Kit ne va pas m’empêcher de surfer malgré la grossesse, mais il va pas non plus falloir que je m’enflamme trop.

— Mais merci du conseil. Je ne connaissais pas et je n’oublierais pas ! Toujours choisir de tomber en arrière, j’intègre !

— Oh si, il serait le seul. Tous les autres seraient inquiets.

Je dis en souriant.

— Will surfe aussi, c’est ça ? Il a appris cet été ? On va aller louer des planches aujourd’hui, ça va être super !

— Oui on peut voir les choses comme ça, c’est vrai !

J’avoue en répondant à son sourire. Je pense même que Kit serait très inquiet, c’est son premier bébé et il découvre plein de choses.

— Il en faisait tout le temps avec Kit, il le prenait surtout avec lui. Mais il a déjà bien choppé le truc, il va bientôt vouloir monter dessus tout seul le connaissant. C’est des grosses vagues ici ? Je me rends compte, c’est vraiment un endroit que je ne connaissais pas du tout !

— Ça dépend des jours, ça dépend des endroits... c’est un peu comme partout. Mais en bas, à la plage que vous avec vu hier, où on va faire le feu de camp, c’est toujours comme ça. Y a des vagues mais rien de fou et pas de gros rouleaux. Donc c’est idéal pour s’amuser un peu, pour les enfants, les femmes enceintes, les novices et les greffés.

Je dis avec un sourire.

— On veut passer des vacances agréables, pas allez aux urgences car quelqu’un s’est cassé une dent.
— Qui va se casser une dent ?

Adriel arrive un peu par surprise. Il a des cernes jusqu’au menton et il est en manches longues. Comme hier.

— Personne justement ! On espère ? Ça va ? T’as mal dormi, on dirait.
— Ouais la pièce me fait peur, les bruits aussi, j’ai voulu mettre des bouchons d’oreilles : j’entendais plus rien donc j’avais encore plus peur. Je crois que je vais pas lutter longtemps pour les somnifères.
— Oh bah tu peux lutter, tu t’endormiras quand tu seras épuisé. Tant pis si c’est en journée, c’est les vacances. Moi c’est ce qui m’arrivait quand j’avais peur de mourir.
— Technique infaillible.

Il rigole. Il rigole toujours quand je dis ce genre de choses alors que ça jetterait un froid avec mon mari – que j’aime.

— Mais moi, quand je suis fatigué, je suis chiant et désagréable. Alors on va éviter ! Sinon, ça va vous ? Rosie ? T’es grave levée tôt pour une meuf qui dort 20 heures sur 24, nan ?

Il va lui faire un bisou sur la joue et il lui fait un très bref câlin. Y a que Kit et Rose avec qui il interagit comme ça. Enfin, à part Keziah mais c’est autre chose.

En effet ça se voit qu’il a mal dormi, mais les somnifères lui feront du bien. Contrairement à Luca, je n’essaie même pas de le convaincre lutter. Il lutte sans relâche contre vents marées, il peut bien lâcher prise. Tant pis que ce soit pour prendre des somnifères, mais lui aussi il est en vacances et si ça peut l’aider à mieux en profiter, je suis pour.

— J’aimerais que tout le monde arrête de croire qu’être enceinte ça fait de moi une petite chose fragile ! Je dors pas tant que ça. C’est juste que je dors pour deux, y’a une nuance !

Je fais mine de m’offusquer. Même si notre séjour à Londres n’était pas pour plaisanter, ça m’a permis d’en apprendre beaucoup sur Adriel. Pas sur la victime qu’il est, mais sur l’homme que ça l’a fait devenir. Et j’aime vraiment beaucoup cet homme. Je suis contente que Keziah l’ai convaincu de venir avec nous ici, y’a que lui qui pouvait le faire.

— Luca s’est fait attaquer par son bébé et moi par le mien alors par la force des choses, on s’est retrouvé ici. On va aller faire du surf cet après-midi ! T’essaies avec nous ?