Bahamas — Famille Saint-Clair

Je me blottis contre lui tout de suite.

— Je sais. Désolé. Mais j’ai l’impression d’être dans la mauvaise phase là... j’ai pas envie de tomber dedans. Ça m’angoisse et c’est encore pire.

J’ai pas envie de tomber dans une période de dépression. On est partis au bon moment mais je suis sur le fil, je le sais.

— Parle moi mon bébé. Je sais que c’est facile pour moi de le dire, mais je suis aussi là pour t’écouter et t’apporter tout le réconfort que je peux. Même si c’est pour me dire des trucs que tu trouves debiles, on s’en fiche. Je t’aime. Et je suis là pour te soutenir et t’éviter de tomber dedans. Je te rattraperais si t’approches trop du bord.

Je le serre contre moi avec mon bras libre.

J’essaie de lutter mais je me mets à pleurer d’un coup. Ça me dépasse. Après j’essaie de m’expliquer mais ça n’a aucun sens. Je bafouille. Je l’aime tellement que d’un coup ça me fait peur : je fais quoi sans lui ? Il me comprend tellement, il est tellement à l’écoute.

— Désolé.

Je m’oblige à suivre sa respiration et à force, ça me calme. Doucement. Aria me regarde avec des yeux tristes et ça me brise le cœur.

— Pardon mon ange.

Je lui fais un bisou et comme elle s’accroche à mon cou, je la prends dans mes bras pour lui faire un câlin. Je ne quitte surtout pas les bras de mon mari.

— Je sais même pas pourquoi ça va pas parce que là je suis super heureux d’être ici avec vous mais je me sens encore submergé par ces dernières semaines. Désolé de vous causer du souci. Peut-être que je devrais prendre un truc pour l’angoisse ? Juste aujourd’hui ?

Tous les deux sont autant vulnérables l’un que l’autre et quand je resserre mes bras autour d’eux, tout ce que j’espère c’est arracher au moins un peu de leur peine. Gabriel est perdu dans ses émotions et Aria perdue de voir son papa ainsi. Ils sont accrochés l’un à l’autre, et je les couvre de baisers et d’amour.

— C’est ça être une famille, je l’ai appris grâce à toi. On se serre les coudes et quand y’en a un qui va mal, les autres sont là. Même notre bébé veux prendre soin de toi, parce qu’elle a comprit que c’était important. On est une famille alors avec nous, t’as pas à t’excuser d’être mal.

J’embrasse sa tempe longtemps.

— Si tu penses que ça va t’aider à te sentir mieux, n’hésites pas.

— Vous êtes la meilleure chose qui me soit arrivée. Tous les deux.

Je leur fais un énorme bisou à chacun et je confie Aria à Matthew.

— Tu l’habilles ? Je vais prendre un médicament. Comme on va manger avec la sieste, ça ira mieux.

Avec eux, je ne me sens pas jugé, personne me prend en pitié et peu importe mon état, ils m’aiment quand même et n’attendent rien de plus que ce que je suis.

— J’y vais ! La tenue de tata Romie alors ?

Je rigole en faisant plein de bisous à Aria. On en a pour trois bonnes minutes, juste le temps de vérifier la couche et puis on rejoint vite Gabriel.

— Regarde la beauté qu’on a ! Ça va avec ses yeux ! C’est pas la plus belle petite fille que t’as jamais vu ?

— Si, c’est la plus belle.

Le retour au calme m’assomme presque mais ils ont le don de vraiment m’apaiser.

— Je me sens bien avec vous.

Je crois que c’est important de le dire. Surtout que pour couronner le tout, le service d’étage nous apporte le repas et le sert sur la terrasse. Ils ont même penser à une chaise pour Aria.

— Whoa mais t’as vu ça ? Ils ont déjà tout découpé en morceaux ! Tu vas te régaler !

— Grave ! J’avais la flemme de couper mes pâtes, je voudrais que tu fasses ça pour moi à la maison aussi s’il te plaît !

Je réponds en essayant de garder tout le sérieux du monde.

Il est tellement idiot que ça me fait rire.

— Arrête, Mattie, tu vas la perturber. Je suis déjà barge, ce serait bien qu’elle ait un parent stable dans sa vie.

Je mets son bavoir à Aria et je lui donne aussi son biberon d’eau.

— Elle a des parents stables. Le tout c’est qu’il faut qu’elle arrive à ce que les deux le soit en même temps ! Elle va s’adapter, faut pas t’en faire.

Je rigole en lui envoyant un baiser. J’aime pas qu’il dise qu’il est barge, mais quand je lui fais remarquer il n’apprécie pas non plus. Alors de manière détournée je lui fais comprendre que c’est pas sa bipolarité qui le rends barge, mais son grain de folie que j’adore. Ce grain de folie que j’ai aussi, qu’on a tous a différents niveaux..

Je sais qu’il veut avoir le dernier mot alors je le lui laisse avec un sourire tendre. Parce que je l’aime et qu’il fait beaucoup d’effort pour me garder à flot. Je sais que pour lui c’est normal, mais c’est pas le cas. Il porte beaucoup sur ses épaules et j’essaie de lui rendre la pareille chaque fois que je le peux. On a trouvé notre équilibre et par-dessus ça, on a un bébé formidable. Alors je suis heureux. Je le sais.

On termine de manger et on n’a pas besoin de lutter longtemps pour coucher Aria : elle piquait du nez à table. Entourée de ses doudous, elle s’est rapidement endormie. Moi, j’ai directement balancer mon mari sur le lit pour aller me blottir contre lui.

— Tu te sens un peu mieux mon bébé ?

Je murmure en le serrant contre moi. Je sais que dans très peu de temps, on va s’endormir pour sûrement plusieurs heures nous aussi.

— Tu vas voir, ça va vraiment nous faire du bien d’être ici.

— Oui, ça va. Ça m’a fait du bien de pleurer un peu.

Même si sur le moment, je me suis senti vachement coupable.

— Oui ça va nous faire du bien.

Je niche ma tête dans son cou pour déposer plein de baisers et puis je glisse mes mains sous son t-shirt.

— En plus t’as même pas pris ton maudit ordinateur.

— Je me suis dit que c’était pas le meilleur endroit pour bosser.

Je sais que j’aurais travaillé si j’avais pris mon ordi avec moi.

— Je préfère être avec vous. Et être au calme avec mon mari quand on peut se retrouver tous les deux. Je t’aime beaucoup plus que mon ordinateur, petit veinard !

— Et du coup, tu lui fais l’amour au petit veinard et ou t’attends qu’il se mette à neiger ?

Je murmure à son oreille.

— Parce que là, j’ai très envie de voir comment tu m’aimes beaucoup plus.

— J’attends qu’il me montre comment il peut m’exciter. Tout à l’heure je l’ai entendu dire qu’il savait bien s’y prendre alors...

Je souris en coin en relevant son visage pour embrasser ses lèvres, mon autre main déjà sous son t-shirt

— J’ai assez envie de te montrer comment je t’aime en plus, donc ça tomberait plutôt bien.

— J’ai pas d’inspi.

Mais je retire mon t-shirt et je m’assoie sur lui à califourchon.

— Ça ira, ça ? Moi qui te laisse faire ce que tu veux ? Sans raler et avec le sourire. Tout ce que tu veux.

Je lève les yeux au ciel pour le geste, mais dans les faits je m’en fous. On n’a pas besoin de trois heures de préliminaires pour se chauffer, on se suffit l’un à l’autre..

— Ça me va amplement.

Je souris sans pendre le temps de le laisser me répondre. Mes lèvres trouvent les siennes et bien vite, j’ai plus de t-shirt moi non plus. Puis plus de fringues du tout.

J’embrasse sa peau et dans chaque geste, je lui montre combien je l’aime. Fort, un peu trop et peut-être avec un peu trop de sauvagerie aussi. Mais on est fait pour être ensemble et chaque jour nous le prouve. Chaque instant.

Peut-être que c’est tout l’ambivalence de ce que je suis, mais j’adore mener mon monde par le bout du nez et pourtant, ce que je préfère chez Matthew, c’est quand il me rappelle à quel point je n’appartiens qu’à lui. Ce n’est jamais assez fort, à mon sens, et pourtant, j’ai l’impression que mon cœur va exploser. Il m’aime sans retenue, sans honte, sans aucune limite et c’est fou le bien que ça fait.

Il s’étale sur moi et ça me fait sourire. Je le couvre de baisers. Mon amour là.

— Tu sais ce que je me dis ? Que si on racontait ça à mon frère, il s’évanouirait. Mais moi j’me dis chapeau, on l’a même pas réveillée.

— Il a réussi à tenir debout quand il a su qu’on avait fait pareil avec sa fille, il est un peu préparé.

J’éclate de rire en me souvenant de ce moment en Islande. C’était un voyage vraiment sympa et ça nous avait permis de nous retrouver avec Gabriel, après un long passage difficile.

— Si un jour Aria nous appelle, j’te jure que je m’arrête pas. Elle attendra deux minutes, mais j’te laisserais certainement pas perdre le fil de ce qu’on fait.

C’est beaucoup trop bon. Tellement que j’ai du mal à m’en remettre, je me laisse faire sous les bisous de mon mari.

— Je crois qu’on a de la chance parce que c’est une grosse dormeuse.

Je caresse ses cheveux, sa nuque. Au début, elle pleurait beaucoup la nuit, mais maintenant que ses angoisses sont apaisées, il lui arrive de nous faire des grasses matinées de fou. Elle se rendort souvent au lit avec nous le matin.

— C’était vraiment une bonne idée, les Bahamas...

Je dis alors que je sens la fatigue me tomber dessus.

— Je connais mon mari mine de rien. Je savais que ça te ferait du bien et que c’est un endroit où tu voulais venir.

J’enroule mes jambes autour des siennes et je caresse le bas de son dos.

— Je t’aime mon bébé.

Je veux qu’il l’entende avant de s’endormir.

Ça fait tellement battre mon cœur que je me dis que que j’aimerais bien qu’il ressente ça, lui aussi. Alors je murmure à son oreille :

— Je t’aime aussi, mon amour.

Un chuchotement, comme un secret, c’est plus facile à dire. Enfin, je trouve.

C’est à peine audible, mais mon coeur s’emballe. Mes jambes se serrent encore plus autour de lui et j’embrasse longuement sa tempe. Je sais qu’il le pense, mais l’entendre accompagné de ce surnom c’est quelque chose de magique. Rien ne pourrait me rendre plus heureux.

— Merci d’être toi et de m’avoir laissé ma chance.

— Merci de pas avoir baissé les bras dès que c’est devenu compliqué.

Je lui fais plein de papouilles parce que ça m’aide à m’endormir. Mes yeux se ferment tout seul et je ne peux pas m’empêcher de penser que Matthew passe son temps à me sauver. Le sommeil l’emporte et je tombe sans m’en rendre compte. Parce que je suis bien et détendu.