It's gonna be fine. — Adam & Gabi

Je le tape dans l'épaule comme je peux et rigole.

— Justement ! Si jamais tu meurs là-bas je pourrais te faire passer pour un gars trop cool. Je ferais payer la visite de ta piaule et tu passerais pour un mec qui avait des goûts de malade. Tu veux quand même pas qu'on se recueille à côté de tes magazines pornos ?

— Des magazines porno ?

J'éclate de rire.

— Désolé grand-père mais j'ai pas ça, moi. Pourquoi se faire chier avec des images moisi quand on a Internet, hein ?

Je rigole quand il me parle d'Internet.

— Attends, me dis pas que tu vas sur YouPorn et compagnie ? Je croyais que y'avais que les gros pervers qui faisaient ça putain !

L'aéroport est indiqué sur le panneau qu'on passe signe qu'on est plus très loin et mes mains se crispent sur le volant. J'aimerais faire demi-tour, mais c'est pas possible.

— Les gros pervers.

J'me marre parce que mon frère c'est vraiment le roi des clichés.

— Attends, mais tu te branles jamais, tu vas me dire ? 'Fin j'dis pas qu'il faut forcément aller sur des sites pornos pour se branler, mais c'est pas un truc de pervers.

— Si ça m'arrive oui ! Mais pas devant des sites comme ça. C'est pas que des trucs hyper dégueulasses là dessus ?

En réalité, je me suis jamais posé la question de si je voulais aller regarder ce genre de chose. Mais à priori Gabriel en connait encore un rayon de plus que moi là dessus.

Je secoue la tête en riant.

— Bah... franchement, y a de tout. Y en a pour tous les goûts, quoi.

— Tu m'excuseras, mais j'ai pas envie d'avoir un cours la tout de suite. Ma vie sexuelle me suffit amplement !

Je rigole et lui indique la route droit devant.

— Je crois bien qu'on est pas loin.

— Tu m'étonnes ouais, il doit en connaître des choses, ton mec.

Je dis en riant pour le taquiner.

— Il est meilleur que Max ?

— Évidemment. Max c'était mon premier, j'étais son premier. On avait aucune expérience, et y'avait aucun enjeu et... Je sais pas, c'est passionné là. C'est pas pareil !

C'est hyper cliché je sais, mais c'est vrai. La passion que je ressens avec Logan est toute nouvelle pour moi etca rends forcément les choses meilleures.

— Mais putain on en est arrivé à parler de ça ? je rigole comme un con.

Je hausse les épaules et ça me fait rire. C'est pas la première fois qu'on en parle, bien au contraire, mais souvent on sait jamais comment on en arrive là.

— J'sais pas. Comme d'hab.

La conversation s'essouffle, mais c'est pas parce qu'on n'a plus rien à se dire, c'est parce qu'on arrive sur la route de l'aéroport.

— Terminal 2, je lui rappelle.

Je me souviens du Terminal, mais à nouveau, j'aurais sans doute voulu me perdre.

— On a mis combien de temps pour venir ?

J'espère qu'Austin va venir, pour Gabriel. S'il a eu la moindre estime de lui un jour, faites qu'il vienne putain.

— Pour savoir dans combien de temps tu partais. Mais on a encore du temps devant nous, c'est bon !

Il a encore le temps de se décider, c'est bon. Et moi, je peux encore profiter de mon frère !

— Largement. On trouve une place pour se garer parmi tout ce bordel et on se mange un petit truc en attendant.

Ton vol ou ton meilleur ''connard'' pote. J'ai envie de regarder s'il m'a répondu, mais ce serait briser Gabriel s'il m'avait dit qu'il s'en foutait. Alors je me calme pour le moment et je me contente d'entrer dans l'aéroport. Mon ventre se tord, on y est presque.

— Ouais, largement.

Et c'est ce qu'on fait. Mon frère prend certainement sur lui pour ne pas pleurer parce que tout le repas, il fait tout pour me changer les idées et ça me fait plaisir. On parle sans arrêt et j'oublie un peu ma peine et mon stress – j'aurais plusieurs heures de vol pour ça. Puis c'est l'heure alors on quitte le restaurant et il tient à m'accompagner pour enregistrer mon bagage.

C'est au moment où je m'apprête à passer les portiques pour rejoindre la douane qu'un annonce prévient que mon vol va avoir du retard.

— Putain, c'est un gag.

Je ne sais pas depuis combien de temps on roule, Darcy n’arrête pas de pleurer et quand elle me dit qu’elle veut pas que Gabriel soit dans un cercueil, je m’arrête sur le bord de la route et j’essaie de la rassurer comme je peux, en la prenant sur mes genoux. 



— Mais tu veux pas qu’il parte parce qu’il va rentrer dans un cercueil… 

— J’ai dit ça sous la colère. Il part dans un pays dangereux. 

— Y va plus aider des enfants ? 

— Si, mais dans un de ses pays dont je t’ai parlé, tu te souviens ? 



Je n’avais pas eu le choix, un soir en rentrant du travail je l’avais trouvé devant la télévision. C’était un reportage au Liban, juste après un attentat. J’avais immédiatement changé de chaine mais c’était trop tard. Alors j’avais essayé de lui expliquer ce que je pouvais. Elle hoche la tête avant d’ouvrir de grands yeux. 



— Il part dans la guerre ? 

— Oui, mais il ne lui arrivera rien, il sera protégé par plein plein plein de militaires. Là-bas il va aider plein de petits enfants qui ont pas à manger et à boire, ou qui ne peuvent plus aller à l’école. 



Elle a l’air d’assimiler mes mots et de réfléchir à tout ça. Ses yeux se remplissent de larmes à nouveau. 



— Je veux pas qu’il part…

— Moi non plus. 

— Alors retiens-le ! 

Je soupire. 


— C’est pas si simple Darcy… 

— Pourquoi ? 

— Parce que c’est sa décision, pas la mienne.



Elle tord ses doigts. 



— On va plus retourner chez tata ? 

— Non. 

— Pourquoi ?… 



Je repense aux mots d’Adam. 



— Parce que c’est pas notre maison Darcy, tu le sais… c’est pas chez nous. 



Et ce soir je l’ai bien compris. Je crois que c’est pour ça que j’ai toujours gardé des distances avec les Saint-Clair, que je me suis préservé, contrairement à Darcy, car je savais au fond de moi que quelque chose comme ça arriverait. C’est dur, je sens la boule dans ma gorge se reformer alors qu’elle n’a même pas disparue. 



— On va aller où ?…



Elle demande timidement parce qu’elle reconnait pas la route. 



— Ailleurs. 



Je dis avec un sourire qui sonne faux. Je la réinstalle correctement et l’attache avant de reprendre la route. J’entends mon portable vibrer mais je ne regarde pas. 

2H plus tard. 

On s’arrête dans un restaurant au bord de la route pour manger, Darcy avait faim, moi je suis incapable de manger. Pendant qu’elle mange son hamburger et ses frites je regarde mon portable, quand je vois le numéro d’Adam, j’ai même pas envie de lire le message. Pourtant je le fais. Troisième gifle de la soirée. Je reste bloqué pendant presque 30 secondes, avant de réagir. Je regarde l’heure de son message, et l’heure tout court. Son avion décolle dans 2h30, et on est à environ 2h de Londres. 

— Darcy prend tes affaires, on y va. 

Si je ne dois plus jamais revoir Gabriel de ma vie, je ne veux pas que les derniers mots que je lui ai dit, soient ceux-là. 



— On va où ? 

— Voir Gabriel. 



Ses yeux s’illuminent et en moins de 3 minutes on est dans la voiture. Quand on arrive à JFK, on regarde tout de suite les panneaux d’affichages, avant de marche rapidement vers les embarquements. Darcy est la première à repérer Adam et Gabriel. Elle lâche ma main et part en courant vers eux.

Quand je vois Darcy courir vers nous, je vois flou. Putain je lui demande de venir soutenir son meilleur pote et lui il nous ramène sa sœur ? Il croit quoi ? Que je vais faire la nounou alors que mon petit frère quitte le pays dans une heure ? Non Adam, stop, il est venu et c'est tout ce qui compte. Il est là pour Gabriel.

Malgré tout, ce n'est pas la faute de Darcy, alors je la prends dans mes bras alors que Gabriel a la bouche grande ouverte et me regarde sans comprendre.

— J'ai pas hyper envie de le voir actuellement, mais je me suis dit que toi tu voudrais peut être le faire...

Et j'embrasse sa joue rapidement, alors qu'Austin nous rejoint sans un regard pour moi.

Je prolonge mon attente avec mon frère d’une dizaine de minutes, mais je le préviens que je vais quand même passer les portes d’embarquement pour passer de l’autre côté. J’ai les yeux rivés sur le panneau d’affichage.

— Bon.. je vais y aller.

Je me tourne vers lui et presque à ce moment-là, je vois Darcy foncer dans ses bras. J’interroge Adam du regard et quand il s’explique, j’y comprends encore moins quelque chose. Les larmes me montent aux yeux parce que j’ai pas envie de souffrir encore plus.

— Où est mon sac ?

Je demande pour pouvoir l’enfiler sur mon dos et partir. J’veux pas entendre que je suis nul, que je vais revenir dans un cercueil ou que j’ai pas de soutient. J’veux pas. J’ai pas envie qu’il soit là parce qu’il s’en fiche. Sauf que je réalise qu’il est loin de s’en fiche quand je le vois arriver en courant vers moi, le regard si inquiet que j’en suis tout retourné. Moi aussi j’ai envie de courir vers lui, mais je n’ose pas alors je m’avance quand même timidement. Il est venu. Adam l’a prévenu et il est venu.

Je n'ai même pas eu le temps de retenir Darcy, elle est partie comme une flèche. Gabriel est encore là, il n'est pas parti. Je me précipite vers lui. Je suis incapable de penser correctement, si je n'avais pas lu le message d'Adam il aurait pu partir sans avoir eu le chance de lui dire au revoir. Quand j'arrive devant lui mon coeur bat vite. Je crois que mes yeux parlent pour moi.

- Ne me demande d'accepter sans rien dire quelque chose qui pourrait t'enlever à moi.

Et pour la première fois de ma vie, je ne réfléchis pas, ni à mes actes, ni aux conséquences, ni à ce qui est bien ou mal. Je prends son visage entre mes mains et je l'embrasse, je ne sais pas si c'est de la passion ou de la détresse. Mais je parle entre chaque baiser.

- Promets moi de revenir. Vivant.

On se retrouve face à face et c’est difficile pour moi parce que j’ai envie de le toucher, de lui faire un câlin et, sans que je ne m’y attende vraiment, il s’approche et me donne un vrai baiser. Je le sens dans dans la passion de ses gestes, dans les recommandations qu’il me fait. Je passe mes bras autour de son cou et je n’ai plus envie de le lâcher.

— Promis.

Je lui rends son baiser alors que mes mains s’aggripent tendremenf à ses cheveux.

— Mais te coupe pas de ma famille, d’accord ? Ma mère m’a dit qu’elle t’appelerai demain, elle est inquiète.

Je l’embrasse encore.

— Tu pourras dormir dans ma chambre, si tu veux.

J’ai trop peur qu’il s’en aille et il ne peut pas me faire ça, pas maintenant. C’est trop tard.

Quand il me rend mon baiser, je sens quelque chose exploser dans mon ventre. Il passe ses bras autour de mon cou, s'aggripe à mes cheveux, m'embrasse encore. Mais quand il me parle de sa famille, c'est mon coeur qui se serre.

- Rentre, c'est tout ce que je te demande.

Je l'embrasse encore, c'est comme si j'étais incapable de le lâcher, comme si une fois la barrière tombée, je ne peux plus m'arrêter.

- Mais c'est un bisou d'amoureux ça !

S'exclame Darcy à nos pieds, les mains sur les hanches, pas contente parce que Gabriel c'est son prince. Si elle a toujours considéré Adam comme son frère, Gabriel c'etait son amoureux.

Je comprends le message et ça me peine de savoir qu’il compte rompre le contact avec ma famille maintenant. Quand Darcy nous interrompt, je réalise que j’en sais rien. Ce baiser soulève des miliers d’interrogations et je ne sais pas si je suis l’amoureux de quelqu’un parce que lui, une amoureuse, il en a déjà une. Je ne sais pas quoi répondre à Darcy alors je lui fais un câlin.

— Il faut que j’y aille...

Je dis dans un soupir. Je cherche le regard de mon frère et il est carrément choqué. Je crois que moi aussi, au fond, je suis sous le choc. J’aimerais bien qu’Austin m’éclaire avant de partir, mais j’ai peur qu’il réalise son erreur alors.. je m’approche pour lui donner un baiser. Celui-ci est un au revoir.

— Merci d’être venu.

Même si je n’ai pas entièrement son soutien, c’est important pour moi qu’il soit ici.

Il se recule et fait un câlin à Darcy. On annonce l'embarquement de son vol et ça me tord le ventre. Vraiment. La peur qui lui arrive quelque chose là-bas, me tord les entrailles. Je ne le supporterais, je ne m'en relèverais pas, et ce n'est pas en tant que frère, j'en ai conscience.

— Je t'attendrai.

C'est tout ce que j'arrive à murmurer quand il m'embrasse encore une fois. Je soulève Darcy dans mes bras.

— Tu reviens pas dans un cercueil hein ?...

Elle demande, avec une petite voix. Je m'en veux d'avoir dit ça devant elle.

Je secoue la tête.

— Non. Tu sais, je vais être avec l'armée et avec d'autres personnes qui font la même chose que moi. Il ne m'arrivera rien du tout. Mais je vais aider des enfants qui vivent des choses très difficiles. C'est tout.

Je dis pour la rassurer. Je m'approche pour faire un bisou sur sa joue.

— Tu sais que, si tu as besoin de quoi que ce soit, tu peux appeler ma mère. Elle viendra te chercher à l'école comme d'habitude, d'accord ? Catéchisme et toutes tes activités habituelles, d'accord ?

Je préfère le lui dire, des fois qu'Austin pense le contraire. Puis je me tourne vers mon frère pour lui faire un énorme câlin.

— Tu vas grave me manquer.