Gabriel & Austin

Je pensais qu’il connaissait cet endroit... mais non.

— Tu veux la vérité ou la version officielle ?

— La vérité.

Je dis en refermant ma portière et en regardant autour de moi.

— Je rejoignais des mecs ici. Ceux qui n’avaient pas envie que leur femme sache. Enfin pas du côté de l’étang, hein. Je t’emmène pas là où je couchais avec d’autres types. Mais j’ai trouvé cet endroit comme ça et je l’aime bien. Y a pas de jeunes qui viennent. Y a des vieux qui pêchent. J’ai même un pote.

Je dis en souriant.

— C'était plus loin. Dans la forêt. C’était pas ici. J’t’assure.

Je veux surtout pas qu’il pense que je l’emmène où je venais me faire sauter parce que ce serait hyper glauque.

Je récupère la vieille couverture que je garde toujours dans ma voiture, de l'époque où il nous arrivait avec Darcy de dormir dedans, puis je viens prendre sa main et embrasser ses lèvres pour le rassurer.

— J'aime beaucoup cet endroit. Tout va bien, d'accord ?

— Ok.

Ça me rassure et je m’approche de lui pour l’embrasser amoureusement. Il ne fait jamais de réflexion, il n’en parle jamais. Je ne sais pas si ça le gêne ou s’il s’en fiche. Mais il ne change pas de comportement avec moi et c’est le principal.

— On va s’installer au bord de l’eau ?

Il m'embrasse et si je n'avais pas les mains prises par la nourriture et la couverture, je le prendrais dans mes bras. Je hoche la tête et on s'installe au bord de l'eau, pour manger.

— Alors comme ça tu as un ami pêcheur ?

Je demande en haussant un sourcil.

Je rigole.

— Ouais, ouais. Il s’appelle Robert. Il vient là tous les dimanches à la même heure. Donc... 5 heures du matin.

— Et tu as déjà pêché avec lui ?

Je joue avec la croûte de mon sandwich.

— Je le regardais. Il m’a montré mais j’avais pas de canne donc.. voilà. Je partais toujours pour être à l’heure pour la messe de 11 heures, de toute façon.

Je commence à manger parce que mine de rien, je crève de faim.

Je ne peux pas m'empêcher de sourire.

— Tu me caches beaucoup de choses encore ?

Je hausse les épaules.

— Non, j’crois pas... et puis, j’te cache rien. C’est juste que j’en parlais pas sur le coup. Si tu me demandes, je te réponds.

— Je reconnais mon erreur, j'aurais dû te demander si tu avais un ami qui s'appelait Pierre et qui pêchait tous les dimanches matin à 5heures.

Je dis avec un petit sourire.

— Il s’appelle Robert et... oui, c’est évident que c’est le genre de question que tu devrais poser.

Je dis en riant un peu.

— Ça fait longtemps que je suis pas allé le voir, d’ailleurs.

— Robert. ((((Pardon c'est celle qui m'écrit qui a bugué du cerveau alors qu'elle a bien vérifié qu'il s'appelait Robert avant de répondre.))))

Je me corrige. Je pose mon sandwich pour boire.

— Pourquoi ?

(Pas grave c’était rigolo genre je l’avais pris en mode humour le Pierre ????)

— Bah.. parce que je dors avec toi dans ton lit depuis... bah depuis qu’on est ensemble presque. Et j’ai eu quatre moi d’assignation à résidence.

Je dis en riant.

— J’ai d’autre priorité que la pêche.

— Comme réfléchir à l'hypothèse de changer de lycée ?

Je tente doucement.

Je secoue la tête.

— Comme essayer de ne pas m’enfuir comme je le fais chaque fois que je ne sais pas quoi faire.

— Je ne vois pas ça comme une fugue, mais si tu le ressens comme ça, alors c'est à toi de décider, mais sache que ça ne me gêne pas de changer de lycée.

— Aujourd’hui, ce n’est pas une fugue, en effet.

Mais tout quitter pour partir à l’étranger, encore une fois, ce le serait.

— Je sais. Mais il ne reste que quelques mois, ça ira.

Je regarde le lac.

— D'accord. Puis on va passer beaucoup de temps sur nos projets de photographies et le reste du temps on pourra aller étudier à la bibliothèque.

— Pas la bibliothèque du lycée, rassure-moi ?

— Non, celle de la ville ou celle de l'université, elle est beaucoup plus calme.

Mais comme il a beaucoup d'amis à la fac, il la connait peut être déjà.

— Sauf si on fait l’amour dans les rayons des sections que personne ne fréquente.

Je dis en riant.

— Alors... ton rendez-vous ? C’est quand même plus important que ma crise existentielle passagère.

Je souris aussi.

— Ça va vraiment être dur de te surprendre.

Je détourne le regard et je hausse les épaules.

— Les tendons ont du mal à se reconstruire, mais dans l'ensemble tout se remet doucement.

— Me surprendre ?

Je souris parce que c’est malgré tout une bonne nouvelle.

— Tu as parlé du fait que tu nageais à nouveau ?