This is where used to be my happy place.

Il n’a plus le temps et j’aurais aimé qu’il le trouve. Pour me faire la lecture. Mais je n’ai pas envie qu’il amène du travail qu’il ne partage pas avec moi à l’hôpital alors je ne dis rien.

— Je sais. Mais s’ils me font des injections, je vais y passer la nuit.

Avec les enfants et me connaissant, je sais qu’ils ne me laisseront pas repartir pour être sûrs que je reste allongé.

— Allez, aide-moi à me lever.

— Tu crois ?

Je demande, inquiet.

— Tu veux que je te prépare un sac au cas où ? Non, non ! Si jamais tu dois y passer la nuit, on viendra te l'apporter avec les enfants !

Je me rends compte que la panique me gagne, alors j'essaie de me reprendre.

— Pardon, désolé. Viens, appuie toi sur moi.

Je lui souris en me levant.

— Ça va, mon bébé. C’est pas la première fois que ça arrive.

Mais le voir s’inquiéter à nouveau me laisse entendre que tout n’est pas perdu.

— Je suis prêt.

Je me positionne et je le laisse faire la manœuvre. En quelques secondes je suis debout, béquilles en main.

— Merci. On y va ?

Aussi rapidement qu'on le peut, on est dans la voiture. Romie dort toujours, Poisson est rentré après son tour dans le jardin et moi, je peux me consacrer à mon mari comme il se doit.

— T'as déjà eu mal à ce point ces derniers temps ? Je veux dire... Sans m'en parler, à cause de tout ça ?

— Pas à ce point, mais j’étais souvent dérangé en ce moment. Pourquoi ?

— Savoir à quel point ça pourrait être grave. Et à quel point je n'ai pas su être là, par la même occasion.

Je réponds en démarrant la voiture. L'hôpital n'est pas loin, c'est déjà ça.

— Arrête de te dévaloriser. T’es là aujourd’hui. Quand j’ai le plus besoin de soutien. C’est ça qui est important.

Je dis en posant une main sur sa cuisse.

— Je me dévalorise pas et je ne dis pas ça pour entendre ce genre de choses en retour Logan.

J'attrape sa main que je serre fort dans la miennes malgré tout.

— J'ai conscience de ce que j'ai fais et de ce que je ne veux plus faire, c'est tout. Mais je vais sûrement avoir quelques choses à rattraper, sans qu'on s'en rende forcément compte.

— Tu es là aujourd’hui.

Peu importe ce qu’il pense, moi je n’ai pas envie de vivre dans le passé. Surtout s’il me promet que ça va changer.

Je caresse tendrement sa main avant de la lui rendre : je préfère qu’il ait ses deux mains sur le volant. Mais je ne romps pas le contact avec lui. Je n’y arrive pas, ce matin.

J'aime sa façon de me faire comprendre qu'il a plus confiance si mes deux mains sont sur le volant, mais sans pour autant me lâcher. Depuis combien de temps ce n'était pas arrivé ? A nouveau, trop longtemps pour que je m'en souvienne...

Quand on arrive à l'hôpital, je l'aide à sortir de la voiture et on se présente rapidement à l'accueil, sans que je ne le lâche.

— Bonjour, Messieurs Wheeler. J'ai appelé ce matin pour prévenir des douleurs de mon mari depuis hier soir, le Dr jsaisplusquoi m'a demandé de me présenter à vous dès notre arrivée.
— Logan, c'est cela ? Il a laissé la chambre 204 à votre disposition, au second étage. Dès qu'il peut passer, il le fera. Certainement entre deux consultations.
— Merci beaucoup.

Je peux voir le soulagement sur le visage de Logan.

Moi, tout ce que je voulais, c’était une chambre. Je souris à l’infirmière que je connais plutôt bien.

— Merci Missy !
— Des nouvelles d’Alexis ? Elle est toujours en congé sans solde !
— ils rentraient de Bali, là. Mais elle est de nouveau enceinte, Charlie va refuser de la rendre !
— Ah !

Elle rit en levant les yeux au ciel.

— On a prévu un fauteuil au cas où mais je crois me souvenir que debout c’est mieux qu’assis ?
— Et allongé mieux encore. Merci pour la chambre.
— Et c’est pas celle de ton coma !

Elle ajoute alors qu’on se dirige vers les ascenseurs.

— Merci !

Parce que venir ici et me retrouver dans cette chambre, y a rien de pire. C’est déjà arrivé plusieurs fois mais la dernière, c’était trop dur, j’ai commencé à me dire que c’est là que j’aurais dû mourir et j’ai préféré attendre dehors. Debout sur mes béquilles.

Avant j'étais comme chez moi a l'hôpital, ou presque. On y passé des dizaines d'heures entre les opérations de Logan, ses examens et tout le reste. Je connaissais l'endroit aussi bien que lui. Aujourd'hui, quand je le vois interagir avec la secrétaire alors que moi je me présente comme un inconnu, j'ai l'impression de ne même plus savoir m'y prendre sur ça. C'est pathétique.

Et si Alexis m'a affirmé qu'elles détestaient tous son ex-femme de ce qu'elle avait fait pendant son coma, j'imagine ce qu'elles doivent toute penser de moi de l'avoir abandonné aussi, à ma façon.

— Ca t'es souvent arrivé, de te retrouver dans l'autre chambre ?

Je demande alors que je sais à quel point il déteste ça. C'est arrivé quelque fois avec moi, et ça lui foutait le cafard. Ces derniers temps, je ne m'en suis même pas soucié. Une gifle de plus. C'est pas ça qu'il mérite, mais le Adam qu'il avait toujours connu.

— Ouais, de temps en temps. J’aime pas trop cette chambre, de toute façon mais c’est vrai qu’elle est souvent libre alors... mais j’ai déjà préféré attendre debout.

Y a des jours plus difficiles que d’autres.

J'aimerais lui dire que je suis désolé, même si ça n'aurait rien changé, même si maintenant c'est trop tard, mais il faut qu'on apprenne à aller de l'avant je crois.

— Alors profite d'avoir une chambre. Et ton mari.

Je souris en passant ma main dans sa nuque pour venir l'embrasser doucement, alors qu'on attends l'ascenseur.

— Qui sera là, promis.

Cette douceur m’avait manqué, je crois, parce qu’avoir les mains occupées par mes béquilles m’agacent fortement. J’ai envie de lui faire un câlin alors je réclame un autre baiser avant de monter dans l’ascenseur.

— Je t’aime.

Je lui glisse en souriant.

La chambre n’est pas très loin et Adam m’aide à m’installer confortablement. Quand il tire une chaise, je secoue la tête.

— N’y pense pas.

Je me pousse un peu. Il y a assez de place pour lui.

— J’ai mal, je veux des câlins.

— On ne dit pas je veux, on dit je voudrais.

Je lui réponds avec un sourire en coin, alors que je monte à ses côtés dès que j'ai retiré mon manteau.

Je m'étends auprès de lui et je passe mon bras autour de sa taille, pendant que l'autre retrouve sa nuque à nouveau. J'adore jouer avec ses cheveux, depuis qu'on s'est rencontré.

— Ça me fait du bien, d'être avec toi et de pouvoir en profiter un minimum. Je veux plus qu'on perde ça... J'ai pas envie que tu finisses par désirer quelqu'un d'autre ou qu'on se déchire, alors que je sais que c'est toi l'amour de ma vie.

— Ça me fait du bien aussi.

Je dépose un baiser sur son front.

— Tu sais, juste ça dans le canapé de temps en temps ça m’irait... j’ai l’impression que t’oses rien devant les enfants parce que t’as peur qu’ils finissent par poser des questions, enfin Olivia surtout... mais ça m’a manqué.

— Je sais pas de quoi j'ai eu peur. C'est vraiment comme si devenir père avait volé la moitié de ma personnalité et que j'avais perdu ce côté un peu fou et spontané de moi.

Je m'en rends compte que tout ça, tous ces petits détails, toutes ces choses que Logan me faisait faire sans même me le demander vraiment, j'aimais ça. Je me souviens de notre lune de miel, de nos premiers instants, de cette fois où on a fait l'amour dans le jardin, de celle où on a passé une nuit à l'hôtel à Londres sur un simple coup de tête. Il est encore là, cet Adam là, celui dont il est tombé amoureux.

— Ca me manque aussi. C'est stupide de réfléchir avant d'agir, comme si tout était grave ou important, alors que j'ai juste à être celui que t'as toujours connu. Personne dans notre maison ne va juger ce que je fais putain.

Je réalise à haute voix.

Je lui adresse un faible sourire.

— Inutile de jurer...

J’embrasse ses lèvres à plusieurs reprises.

— C’est rien, mon bébé. Je te retrouve, c’est tout ce qui compte. J’avais besoin de toi aujourd’hui et tu es là.

— Pardon.

Je réponds en réalisant et en préférant me perdre dans ses baisers.

— On va être tous les deux beaucoup plus souvent tu verras. Comme avant. Mais avec des enfants. T'en auras de nouveau marre de moi, après !

J'ajoute en riant.

— J’en n’aurais jamais marre de toi mais... ne promets rien pour l’instant, ok ? J’ai pas envie que tu te sentes contraint d’agir différemment.

Je dis malgré tout.

— Les enfants restent une priorité, j’en ai conscience. Et j’ai plus d’occasion d’être seul avec eux, c’est plus facile pour moi.

— C'est vrai, oui. Mais j'ai aussi peu d'occasions d'être avec eux qu'avec toi et maintenant que j'en ai conscience, j'agirais pour notre famille.

Je souris en embrassant ses lèvres.

— Et tu es ma famille autant qu'eux.

Ma main caresse sa peau tendrement. C'était un automatisme avant, maintenant c'est presque nouveau.

— J'ai raté beaucoup de choses ? Enfin, tu vois ce que je veux dire...

Je hausse les épaules.

— J’en sais rien, qu’est-ce que tu entends par-là ? Enfin, à quel sujet ? Parce que t’as pas raté les premiers pas des enfants ou... enfin j’sais pas ?

— J'entends pour toi. J'ai passé des jours sans venir ici, je suis passé a côté de plein de choses je suppose. Je ne savais même pas où étaient rangés tes béquilles...

Je rappelle en rougissant.

— Il s'est passé des choses dont t'aurais voulu le parler, mais dont tu ne pouvais pas ? Ou dont je ne te laissais pas l'occasion ?

— J’en sais rien.. j’avoue que je ne sais pas depuis quand tu ne sais plus et j’ai eu un black out y a quelques semaines alors tu sais qu’après j’ai tendance à mélanger les choses.

J’essaie de réfléchir.

— On m’a parlé de prothèse. Pas pour tout de suite, mais quand les injections ne suffiront plus. Puis.. j’ai dû arrêter de faire des combats alors à la salle j’entraîne simplement. Surtout les petits parce qu’avec les adultes ça pourrait me demander trop d’efforts. Je continue quand même les cours d’autodéfense car c’est différent. Je n’ai plus le droit de courir. Enfin de faire du jogging. Le vélo si, mais parfois ça coince. C’est tout. Mon neurologue n’explique toujours pas certaines de mes pertes de mémoire. Mais d’après lui c’est bien que je continue d’aller voir le psy. J’y vois aucune corrélation, mais bon... si c’est bien, alors je continue. Il me donne des trucs pour me repérer dans le temps, me souvenir.

Je soupire.

— Je gère. Heureusement que ta mère les prend tous les mercredi comme ça je peux caler mes rendez-vous le matin.