Be happy — Romie & Edouard

— Aujourd'hui oui, mais a l'époque c'était pas le cas. Qu'est-ce que tu veux que je devienne pompier à mon âge, alors que j'ai même plus le temps de faire de sport ?

Quant à la femme que j'ai choisi, j'ai pas eu besoin d'eux pour la perdre. J'ai été con, tout seul... Je soupire en acceptant volontiers qu'il me serre contre lui.

— C'est pas à cause de toi Max, c'est à cause d'eux. Je ne savais pas qu'ils agissaient de la même façon vis à vis de toi, je comprends pas ce qu'ils cherchent. J'espère que quand je suis venu ici, ils ont compris qu'ils pouvaient pas lutter contre nous. Je serai jamais de leur côté si c'est pour aller contre toi, j'espère que tu le sais.

— Je le sais. Et je te remercie d’être là pour moi tous les jours, ça m’aide à aller mieux.

Je lui souris sincèrement.

— Mais tu peux toujours être pompier. Si c’est ce que tu veux, plante tout, remets-toi au sport et montre leur que tu peux faire carrière et que t’as pas besoin d’eux. L’argent tu l’as déjà. Les actions tu les as dejA. Alors fais ce que tu aimes et montre leur.

— C'est ce que Romie m'a dit aussi. Même si elle ne savait pas toute l'histoire avec les parents.

Je soupire, en songeant à tout ce que je pourrais faire de ma vie si je décidais d'agir pour moi même, et non plus pour mon père.

— J'ai merdé sur toute la ligne...

— C’est faisable, Eddie. Si t’as envie de changer les choses, tu peux. Ça tient qu’à toi.

Je dis en souriant.

— Tu veux qu’on commande à manger ? Qu’on regarde une caserne ?

— Il paraît, oui.

Je lui souris, même si le cœur n'y est pas. Et je ne veux même pas regarder de caserne avec lui, j'aurais du le faire avant.

— Je sais même pas si j'ai faim. Mais tu dois avoir du boulot encore, pas vrai ? T'embêtes pas pour moi, je vais aller dans ma chambre.

— Je peux faire une pause et rester avec toi, si jamais tu en as besoin. Ou envie. Mais je comprendrais si tu voulais être un peu seul.

Il ne réalise pas encore que Romie ne reviendra pas demain. J’ai peur qu’il souffre autant que moi.

— Demain, je prends ma journée.

— Sans déconner ?

Je demande, vraiment étonné, mais content je crois.

— Mais je veux bien une petite pause ce soir, ouais.

Je souris.

— Ok. Alors on commande.

Et je crois que, lui comme moi, on avait besoin de cette soirée.

Quand je me réveille, le contrecoup fait mal. Pendant quelques instants, je me suis demandé où était Romie et quand j'ai réalisé, j'ai eu envie de me foutre une claque monumentale. Elle me manque, alors qu'elle était encore ici hier. C'est incohérent au possible, mais c'est encore pire parce que je sais que tout ça c'est de ma faute et que la culpabilité est blottie en moi. Si j'ai mis longtemps à accepter que j'étais sûrement tombé amoureux, je risque d'en mettre autant plus à comprendre que je l'ai vraiment chassé. Est-ce qu'elle ne reviendra plus ? Plus jamais ?

Je mets un temps fou à sortir de mon lit, parce que je n'ai envie de rien, et quand je me décide enfin à descendre manger un truc, Max est toujours enfermé dans sa chambre. Faut dire qu'on s'est couché assez tard.

Je traine les pieds dans la cuisine en me prépare un café, puis je traine en le buvant, puis je finis par me dire qu'il y a peut-être quelque chose d'intéressant dans la boîte aux lettres. Quelque chose qui me fasse éviter de penser à Elle.

La nuit a été courte : j’ai calculé toute la nuit tout l’argent que je devais à Édouard depuis le début parce que je n’ai plus envie d’être une pute et j’ai eu beau me doucher, rien n’y faisait. Je me sens sale et minable. C’est encore pire d’être amoureuse parce que j’ai honte. Honte d’être moi, d’être si décevante et si sale et nulle. Je n’ai pas arrêté de pleurer et quand j’ai fini, c’est le petit matin alors je prépare les cadeaux qu’il m’a fait, l’argent que je lui dois dans une enveloppe et je m’en vais à pied.

Meme avec un manteau il fait froid alors je me presse. Quand j’arrive devant l’église, je suis gelé et prise à la gorge par ce même sentiment de honte. Mais je réalise également à quel point je suis amoureuse et à quel point il me manque déjà et c’est effrayant. J’ai comme un vide et je suis incapable de savoir comment le combler.

J’essaie de glisser l’enveloppe et le colis dans la boîte aux lettres mais c’est impossible alors j’ai l’intention de tout laisser derrière le portail et quand je me décale pour l’ouvrir, je tombe nez à nez avec Edouard. Il est là avec son café et je me fige presque instantanément, les larmes aux yeux et la gorge serrée.

— J’ai compris que je devais pas revenir, j’te jure. C’est juste que je voulais te rendre ça parce que je crois qu’on c’était mal compris et je ne voulais plus me prostituer.

Le dire à haute voix fait directement couler mes larmes. Je glisse l’enveloppe dans le sac.

— J’ai calculer en arrondissant au-dessus si jamais j’avais oublié quelque chose.

Je pose le sac à ses pieds n’ayant pas le courage d’affronter le fait qu’il puisse refuser de le prendre. J’ai énormément de mal à le regarder aussi. Parce qu’il me manque. Alors je fixe le sol.

— Désolée que mon beau-frère ait blessé ton frère comme ça. J’espère qu’il va trouver quelqu’un parce qu’il le mérite. Il est gentil et... je suis sûre qu’il va aller mieux. Je voulais pas te décevoir alors pardon d’avoir été une personne minable et j’ai pas de MST c’est promis. Je te souhaite d’être heureux avec une femme qui a un bel avenir et qui te mérite.

Je voulais lui dire ça hier mais j’ai pas pu alors maintenant que c’est dit, je me sens un peu soulagé et je m’enfuis en courant pour rentrer chez moi et ne plus en sortir.

Je traine même des pieds dehors, me foutant de tout. C'est seulement en arrivant au bord du portail que j'arrête tout, même de respirer. Romie est là et je me dis qu'elle est là pour moi. Pour nous. Je me dis qu'elle va tenter de me récupérer, parce que ce qu'on a vécu était fort et réel, et qu'elle ne croit pas un mot de ce que j'ai pu dire hier. Elle est forcément là pour cela.

Ou pas. Ses larmes me retourne et quand j'entends son discours, je ne sais même plus quoi dire et faire. Elle est tellement belle, et ses joues sont ravagés de larmes par ma faute. J'ai envie de la retenir, de lui tenir tête, envie de lui dire que c'est tout sauf une pute et que je ne l'ai jamais vu comme ça. Pas même hier. Pas même en sachant son histoire.

Elle me rends de l'argent dont je ne veux pas, elle s'excuse alors qu'elle n'a pas à le faire, elle va même jusqu'à m'assurer qu'elle n'a pas de MST et que tout ira bien pour moi. Et puis elle part en courant, alors que je suis toujours immobile, et je ne fais rien pour lui courir après. J'ai juste un sac en plus avec moi, un sac rempli de tout ce que j'ai pu lui offrir.

Et c'est trop. Je repense à ses mots, a ce qu'on a vécu, a tout ce que Max a pu me dire hier. Je l'ai blessé sans aucune raison, par vengeance et fierté, alors que j'en suis dingue. J'en suis dingue, mais elle ne reviendra plus.

Je retourne dans la maison tel un Zombie. Plus que Zombie lui-même. Je vais directement vers la chambre de Max, je rentre sans même frapper, et je m'en fous qu'il dorme encore. Je vais directement m'allonger a côté de lui et je le pousse un peu pour qu'il se réveille.

— J'ai besoin de mon frère.

Je dis simplement, la gorge nouée.

Je suis tiré du sommeil par Édouard. J’ai un peu de mal à émerger.

— Eddie ? Qu’est-ce qu’il y a ? Ça va pas ?

— Non ça va pas...

Je réponds les larmes aux yeux.

— Y'a Romie qui vient de passer.

— Ah oui ? T’as pu lui parler ? Qu’est-ce qu’il y a ? Elle a dit quelque chose ?

Je suis en train de réaliser que c'est réel, que je ne vais plus la revoir, du tout.

— Elle m'a rendu de l'argent, et les cadeaux que je lui ai fait, parce qu'elle n'est plus une pute et qu'elle ne veux pas que je crois que ça a pu être le cas.

Je déglutis difficilement.

— Mais je voulais pas qu'elle croit ça. Je sais pas pourquoi je me suis dit que c'était la chose à faire. Je voulais pas Max...

— Alors essaie d’arranger les choses ! Tu peux, j’en suis sûr ! Si c’est ce que tu veux vraiment, tu dois essayer.

Je dis sérieusement.

— J’ai jamais laissé tomber, moi. J’ai simplement attendu trop longtemps. Ne reproduis pas mes erreurs.

J'écoute et je comprends ce qu'il veux dire. S'il était revenu ici plus vite, Adam n'aurait pas rencontré Logan et je sais qu'ils seraient heureux aujourd'hui tous les deux. Je sais qu'ils se sont sincèrement aimé malgré tout ce que je peux penser.

Je ne veux pas attendre qu'elle en rencontre un autre pour agir.

— Elle va jamais vouloir me parler. Je suis censé faire ça comment...?

Je demande très sérieusement en tourné mes yeux embués vers Max.

Je hausse les épaules.

— J’en sais rien... j’ai... j’ai pas de solution. J’ai retapé une église et tout fait et j’ai échoué. Alors j’en sais rien. Excuse-toi, dis-lui que t’as fait le con, que c’était pas ce que tu voulais... essaie de la voir. Je suis désolé, j’ai pas de conseil mais sois honnête avec elle. Dis-lui qu’elle te manque... j’en sais rien.

— De la voir ?

Je demande en ricanant.

— Et où ça ? Chez elle ? Si son frère me voit, il va me demettre la mâchoire. Ou pire.

Ou alors, je guette un moment où il n'y a que Adam qui est là. Ou quand ils bossent tous les deux !

— J'ai pas envie de la perdre. Je dois essayer ! De lui envoyer un message pour commencer ! Ou non, de l'appeler ! Et le SMS si jamais elle ne me réponds pas ?

— Oui. Ce que tu peux. Des lettres, des mots... essaie de la voir en ville, c’est pas bien grand. Il faut lui parler. Qu’elle entende de ta bouche ce que t’as à dire.

— Que je l'aime ? Je dois lui dire ?

Je souffle doucement. Plus la peine de le cacher.

— Elle va pas croire que je dis ça juste pour me racheter ?

— Dis-lui. Faut pas regretter quoi que ce soit alors tente tout et tu pourras simplement te dire que tu as tout essayé.

Je secoue la tête, à la fois convaincu et vaincu. Je n'ai jamais fais ça et j'ai l'impression que c'est une montagne à franchir. Mais l'autre côté en vaux tellement la peine.

— Je vais faire ça.

Je me décalle pour me rapprocher de Max et le prendre dans les bras.

— Je te fais à manger ce midi ?

Ça veux dire mille merci et il le sait.

— D’accord, oui. Je vais dormir encore un peu si tu veux bien, j’ai veillé tard. Mais surtout tu me réveilles au moindre truc, d’accord ?

Je le serre dans mes bras.

— Elle est vraiment amoureuse alors la seule barrière c’est Adam et Logan.

Je souris un peu contre lui, avant d'en perdre toutes traces.

— Je veux pas encore y penser. Surtout à Logan, il fera mal s'il tape, lui.

Je ris jaune avant de quitter la pièce. Ça va m'occuper de cuisiner pour mon frère.